Alors qu’il débarque de belle manière aux USA avec Stoker, replongeons dans le film qui a donné à Park Chan-Wook sa renommée internationale : Old Boy.
Après plusieurs succès en coréen et dans la continuité de Sympathy for Mister Vengeance dans lequel il initiait sa trilogie thématique sur la vengeance, le réalisateur Park Chan-Wook s’est ensuite penché sur le manga de Nobuaki Minegishi et Garon Tsuchiya, Old Boy. Une histoire parfaite pour continuer d’explorer cette thématique puisque nous y suivons Oh Dae-su, un homme enlevé et enfermé, sans explication le soir de l’anniversaire de sa fille. Quinze ans plus tard, il est relâché et se met alors en tête de se venger des hommes qui lui ont fait perdre sa vie.
D’emblée, le réalisateur impose un style addictif avec une réalisation bien léchée. La première partie du film est ainsi prise entre le rêve et la réalité pour nous faire comprendre la folie dans laquelle est tombé le personnage qui s’efface peu à peu derrière son avatar vengeur qui prendra vie par la suite. Malgré ses défauts détestables qui nous l’ont présenté au début, on se prend à apprécier ce personnage par les épreuves qu’il a subit, aussi lorsqu’il retrouve un semblant de vie normale par la suite on est attendrit mais cela ne dure pas longtemps.
Assoiffé de vengeance, le parcours amènera notre héros à user d’une violence particulièrement crue que le réalisateur manie avec un sadique recul. Le film est ainsi parcouru de scènes particulièrement marquantes, à l’instar de poulpe dévoré vivant, de l’arrachage de dents au marteau ou encore d’une superbe bagarre entre Oh Dae-Su et tout un clan d’hommes costauds et armés dans un couloir filmée en un seul splendide travelling. Tout cela jusqu’à un final dans lequel le réalisateur va basculer toutes les perceptions sur les personnages.
En effet, dans le final, Park Chan-Wook révèle donc les raisons de la détention du héros de manière particulièrement froide avec un méchant qui aura développé un plan vraiment machiavélique pour se venger lui aussi. Les personnages se révèlent alors tous aussi détestables les uns que les autres devant la morale transgressée (il est question d’inceste) vécue de manière bien différentes par les deux protagonistes. Aussi pathétique que charismatique, Oh Dae-Su révèle une nouvelle facette de sa personnalité, loin du héros sans peur et sans reproche. A ce titre, le jeu du comédien Choi Min-sik se révèle étonnant et intense à chaque instant, tenant tout le film sur les épaules d’un personnage que l’on aime détester et qui s’en prend plein la tête jusqu’au bout.
Prenant place parmi les nouveau chefs de file du cinéma coréen aux côtés de Bong Joon-ho (the Host) et Kim Jee-Woon (J’ai rencontré le Diable), Park Chan-Wook est l’un de ces réalisateurs influencés par les cinémas hollywoodiens, japonais et hong kongais mais qui vont y apporter toute la rage propre au contexte tendu de la Corée. A travers Old Boy, c’est un peu comme si la Corée du sud se réveillait d’un sommeil de 15 ans alors que son voisin des régner la terreur. Si le rapprochement politique n’est pas forcément voulu, c’est en tout cas un angle intéressant pour voir dans le film bien plus qu’une simple histoire de vengeance.
Présenté au Festival de Cannes, Old Boy rapportera à Park Chan-Wook un Grand Prix bien mérité, tant par l’intensité de son récit et de ses personnage que par la maitrise de la mise en scène du réalisateur. Ce prix lui vaudra alors alors une belle renommée internationale qui l’emmènera aujourd’hui à Hollywood où il a réussit à garder toute sa personnalité pendant que l’on se demande si le remake du film par Spike Lee à venir osera garder toute la transgression qui fait le cœur de Old Boy.