Zappant tous les préjugés que l’on pouvait avoir sur l’idée de faire une série sur Norman Bates, la nouvelle série Bates Motel se révèle être une bonne surprise menée par ses deux interprètes : Vera Farmiga et Freddie Highmore.
Après le chef d’œuvre d’Alfred Hitchcock, l’univers de Psychose n’a pas vraiment connu d’extension digne de ce nom. Entre des suites assez dispensables sur Norman Bates et un remake plan par plan profondément inutile par Gus Van Sant, nous n’avons pas été gâté. Aussi, quand le projet d’une série télé servant de préquel à Psychose a été révélé, nous avons été plus que méfiants. Créée par Anthony Cipriano et produite par Cartlon Cuse (Lost) pour la petite chaîne câblée A&E, Bates Motel revient donc sur les années de jeunesse de Norman Bates et sur sa relation houleuse avec sa mère alors qu’ils s’installent dans leur nouvelle maison pour reprendre le célèbre motel.
Cependant, tout de suite quelque chose cloche. Car la série se déroule de nos jours. Les personnages ont des portables, écoutent du Radiohead ou BRMC, …. et en même temps, ils ont des styles vestimentaires passés, regardent la télé en noir et blanc, possèdent de vieilles voitures. Il y a donc un anachronisme permanent qui nous éloigne du film original et qui, paradoxalement, aide à recréer son ambiance étrange, à retrouver cette atmosphère de petite ville isolée aux habitants peu engageants. Du coup, on passe allègrement sur les éléments modernes pour plonger dans l’ambiance.
On y plonge d’autant plus volontiers qu’on se laisse happer dès les premières minutes de la série par le personnage de Norman Bates et de sa mère Norma. Campés par Vera Farmiga (Source Code, In the Air) et Freddie Highmore (Arthur, Neverland), leur relation est d’emblée passionnante. Un amour maternel trop protecteur, un complexe d’œdipe passionnant autour de pulsions meurtrières qui se sont transmises et créent un lien inaltérable entre la mère et le fils, peu importe les épreuves et les mauvaises fréquentations que chacun aura. Vera Farmiga entretien parfaitement son personnage de mère possessive pour qui la folie n’est pas loin alors que Freddie Highmore montre une face sombre de son jeu qui pourrait bien nous amener à vraiment avoir peur de lui à l’avenir. Le jeune acteur rêvait d’interpréter un méchant, et il se révèle pleinement capable d’assumer le rôle avec toute la subtilité qu’il demande. Sans doute le meilleur héritage d’Anthony Perkins.
Du côté de l’intrigue, on a beau savoir comment tout cela va se terminer grâce aux événements de Psychose, on ne peut que s’interroger de savoir quand les personnages passeront à chaque fois un nouveau cap qui nous y mènera. En ce sens, les scénaristes font un bon boulot pour nous maintenir dans l’attente et sèment habilement les graine de la folie de Norman. Par contre, on déplorera plus le peu d’originalité concernant l’un des fils rouges de la série, à savoir une affaire de trafic de jeunes files. Cet aspect assez artificiel sent vraiment le réchauffé, présent seulement pour nous occuper en attendant de développer le malaise des personnages. Artificiel, c’est aussi ce que l’on peut penser de la présence du demi-frère de Norman. Alors qu’il était représentait une menace intrigante à son apparition, il se réconcilie bien trop vite avec sa famille.
Toutefois, les créateurs de la série ne se sont pas contentés de faire une série autour de Norman Bates avec à chaque épisode « le client bizarre de la semaine» en surfant sur le nom de Bates mais offrent une véritable intrigue à suivre sur la longueur qui a droit à sa conclusion en fin de saison et qui permet aussi à la série d’avoir ses instants forts. Des instants violents que l’on voit peu à la télé (meurtre malsain,viol), qui contrastent avec la poésie avec laquelle est abordée l’adolescence et l’éveil aux sentiments de Norman.
Au final, ce Bates Motel est, grâce à son ambiance et à ses deux acteurs principaux, une très bonne surprise que l’on prend véritablement plaisir à regarder. On espère alors que l’intrigue va devenir plus palpitante et en même temps plus mystérieuse et malsaine pour nous maintenir sous tension sans trop tarder non plus à arriver au but qu’elle s’est fixée. Le risque est en effet de tourner en rond avant d’arriver aux événements que nous connaissons déjà.