"Pendant ses vacances au Chili, Alicia, une jeune américaine réservée, se retrouve embarquée par sa cousine Sara et sa bande d’amis sur une île isolée.
Personne ne fait vraiment d’effort pour intégrer Alicia. Elle se replie de plus en plus sur elle-même et commence à perdre peu à peu ses facultés mentales sans que le groupe n’y prenne garde…"
Sebastian Silva possède une très courte filmographie puisqu’il a pour le moment seulement réalisé deux films qui se nomment La Nana (la bonne) et Les Vieux Chats. Même si son nom ne vous dit rien, il faut savoir qu’en terme de réalisation il a côtoyé les plus grands puisqu’il a été 1er assistant réalisation de Terrence Malick sur A La Merveille, de Alejandro Gonzales Inaritu sur Babel et de Robert Rodriguez sur Desperado. C’est donc avec une certaine confiance qu’il a mis en scène son troisième film qui est le film qui va pouvoir lui permettre de s’ouvrir au monde du cinéma. Porté par Micheal Cerra et Juno Temple, Magic Magic est le premier film international de Sebastian Silva, mais est-ce également son film le plus abouti ?
Chaque semaine paraissent une dizaine de films dans nos salles françaises et parmi ces dix films, on retrouve des blockbusters très attendus, mais également de petits films indépendants qui méritent le visionnage pour que le spectateur puisse se faire un avis sur son casting, son réalisateur et son histoire atypique. Magic Magic va nous plonger au cœur d’un groupe de jeunes qui décident de partir en vacances au Chili sur une île isolée. Pourquoi souhaitent-ils partir sur cette île isolée et qui sont ces jeunes ? Telle est la question que tout bon spectateur se pose dès le départ et même si certaines réponses arrivent de fil en aiguille, beaucoup de choses vont restés mystérieuses concernant le background du film. Sebastian Silva fait le choix assez singulier de plonger le spectateur dans ce groupe sans nous les présenter au préalable. C’est assez original, car le spectateur va donc devoir décrypté et apprendre à connaître les différents membres de ce groupe, telle Alicia qui ne connaît personne de ce groupe. Elle y est amenée via sa cousine afin qu’elles puissent passer de bonnes vacances. On comprend donc la volonté première du réalisateur, qui est de mettre Alicia et le spectateur sur un pied d’égalité afin qu’on soit plus proche d’Alicia que des autres membres du groupe. Ce sentiment à l’égard du groupe va s’amplifier très rapidement grâce à des actes malveillants envers des animaux et autres privates jokes. On sent donc une tension et une incompréhension entre nous (Alicia et le spectateur) et ce groupe durant toute la première moitié du film.
L’écriture du film va devenir intéressante à ce stade, car le spectateur ne va plus chercher à les comprendre, mais il va chercher à comprendre qui est Alicia. Jeune femme introvertie et qui ne parle à personne, elle est très mystérieuse et va se révéler incontrôlable. Tout va à nouveau changer à partir du moment où Alicia va totalement perdre tout contrôle psychologique sur sa personne. Le spectateur va rejoindre le groupe de jeunes sur l’incompréhension vis-à-vis d’Alicia et cette dernière va se retrouver seule. À la fois touchant et effrayant émotionnellement parlant, le film navigue entre plusieurs émotions grâce au personnage d’Alicia qui est très bien écrit. Durant tout le film, le spectateur va passer par diverses phases émotionnelles et c’est assez bien retranscrit à l’image grâce à une réalisation à l’épaule, très proche des personnages. La photographie quant à elle retranscrit bien à l’image les lieux visités par les protagonistes et tel un film de genre, on va retrouver une luminosité en cohérence avec la psychologie d’Alicia.
Tout n’est pas rose au Chili et malgré un personnage principal très bien écrit, le background du film manque de profondeur. On aimerait en savoir plus sur les environnements qui nous entourent, ainsi que sur les personnages secondaires afin d’amplifier les différentes émotions que l’on ressent. Si les personnages secondaires sont si peu attachants, c’est parce que le spectateur n’est pas familier avec eux. On ne sait rien sur leur passé respectif, ni sur leur situation familiale ou même leurs psychologies. La psychologie va être un point bien développé dans le scénario grâce à Alicia qui va provoquer des réactions très intéressantes chez chacun des personnages, mais le reste n’est pas bien exploité. Ce background manque clairement de travail et de recherche.
C’est vraiment dommage, car Magic Magic est un film intense sur le coup et il fait ressentir de très fortes émotions au spectateur grâce à un personnage principal très bien écrit, mais aussi superbement interprété. Alicia est interprétée par la très talentueux Juno Temple qui n’en est pas à son premier coup d’essai, mais cette fois il nous prouve qu’elle est bel et bien dans la cour des grands. Après un passage remarqué dans Killer Joe, Greenberg, Kaboom ou Mr Nobody, elle incarne à nouveau à la perfection une jeune femme mentalement perturbée. À la fois effrayante et touchante, elle est remarquable. Les seconds rôles sont quant à eux un peu plus en retrait et plus fades dans leurs interprétations, mais on remarquera surtout un Michael Cera en grande forme et une Emily Browning assez convaincante.
Petit film indépendant qui paraît en toute discrétion en cette fin août chez nous, Magic Magic est un film qui mérite le déplacement rien que pour son écriture et son personnage principal à la fois touchante et effrayante. C’est un film déroutant et à la limite du film de genre dans sa réalisation, sa photographie et dans les traits de caractère du personnage principal. Malheureusement, on lui reprochera un background pas assez bien exploité, avec des personnages secondaires mystérieux et qui restent sous silences. Ainsi que des environnements dont on ne nous dit rien. Malgré tout, on retiendra une palette émotionnelle assez large rencontrée par le spectateur, ainsi qu’une Juno Temple à son apogée. Une actrice dont il faut se souvenir du nom.