L’Etrange Festival 2013, 1re partie

Par Fredp @FredMyscreens

Depuis le 5 septembre, et jusqu’au 15, c’est reparti pour une cure de ciné alternatif percutant et dérangeant à la 19e édition de l’Étrange Festival. Le programme est lourd et voilà déjà ce que l’on a pu voir ces 4 premiers jours.

Après les présentations et un court-métrage avec un gamin qui explose, c’est le film d’espionnage coréen the Agent (the Berlin File) qui a donc eu la lourde tâche d’ouvrir ce nouvel Étrange Festival. Histoire d’agents doubles pris entre les ambassades de Corée du Nord et Corée du Sud mais aussi d’autres groupes d’espions comme le Mossad, The Agent joue la carte de la complexité et ne sera pas simple à suivre sans y prêter un minimum d’attention. Néanmoins, la compréhension doit certainement être plus claire au second visionnage de cette grosse dispute entre toutes les forces en présence. On pourra néanmoins noter des  séquences de combat particulièrement percutantes qui pourraient bien en remontrer encore à Hollywood et Hong Kong dans leur mise en scène et leur intensité.
Changement d’ambiance pour la seconde partie de cette soirée d’ouverture et Found, petit film réalisé avec très peu de moyens (ça se sent parfois sur la qualité d’image ou de son et souvent dans le jeu des acteurs), il n’est néanmoins pas dépourvu d’idées. Cette histoire de môme découvrant que son frangin est un serial killer se révèle très intéressant dans sa mise en scène, son thème, son discours ambigu sur l’enfance martyrisée. Assez froid et dérangeant tout en trouvant un certain recul, le réalisateur n’évite pas toutefois certaines longueurs et a un peu de mal à finir son film mais l’expérience mérite le coup d’œil.

Samedi, c’est sous l’aura d’Albert Dupontel que nous passerons l’Étrange Festival. Tout d’abord avec l’un des films qu’il a choisi pour sa carte blanche, le culte et récompensé à Cannes Que le Spectacle commence (All that Jazz) de Bob Fosse, le célèbre chorégraphe qui a remis la comédie musicale au gout du jour à Broadway (Chicago, c’est lui). Sur une variation de Huit et demi, le réalisateur se met en scène d’une certaine manière à travers le chorégraphe interprété par Roy Scheider qui voit sa vie et ses conquêtes défiler après avoir fait un infarctus pendant lequel il côtoie la Mort (sublime Jessica Lange). Les tableaux sont saisissants, le film est fou et se regarde comme un rêve, les chorégraphies superbes jusqu’à la chanson finale. Un show halluciné et enivrant à découvrir.
Puis monsieur Dupontel est venu nous présenté son nouveau film, 9 Mois Ferme. Si le réalisateur avait légèrement déçu avec le néanmoins sympathique Le Vilain, il retrouve ici complètement sa verve avec l’histoire d’une juge tombant enceinte d’un taulard après une soirée arrosée. Un humour très méchant qui navigue entre les gags burlesques ou sanglants avec une imagination débridée, les personnages incompétents, bêtes et méchant, les caméos plus que sympathiques et surtout une Sandrine Kiberlain qui se découvre toujours un peu plus excellente dans le registre de la comédie vacharde. Sur 1h25 parfaitement rythmée, sans temps mort, on passe son temps à rire et en même temps on reste attendri devant ce duo plutôt improbable qui fonctionne très bien. Bref, le créateur de Bernie est de retour à son meilleur niveau et ses fans ne devraient pas être déçus de ce qui est certainement l’une des meilleures comédies françaises de l’année.

Dimanche, montée en pression pour l’équipe de l’Étrange Festival. On commence avec la présentation de We Are What We Are qui venait de s’attirer les foudres des spectateurs du Festival de Deauville (il faut dire que le public de Deauville n’est peut-être pas le mieux ciblé pour présenter un film parlant de cannibalisme). En faisant un remake du mexicain Ne nous jugez pas qui avait déjà été présenté au festival, le réalisateur John Mickle (qu’on avait repéré avec le réussi Stake Land) nous raconte donc vit une famille recluse sur elle-même et dont les repas sont assez spéciaux. Avec une magnifique photo le réalisateur prend malheureusement trop son temps pour arriver au cœur de son film et c’est dommage car dès que l’on s’intéresse au côté secte familiale anthropophage, cela devient vraiment prenant, jusqu’au décrochage gore inutile en 30 secondes à la fin. Finalement, c’est un peu comme si Sofia Coppola réalisait un film sur le cannibalisme.
Puis arrive le grand moment de tension pour l’équipe du festival avec la présentation en avant-première du très très attendu Snowpiercer de Bong Joon-Ho. Le réalisateur coréen de the Host adapte la BD française le Transperceneige avec un casting international et accouche tout simplement de l’un des films de SF les plus aboutis mais aussi les plus noirs et violents de ces dernières années. Au programme de ce train qui parcoure les glaces de notre futur : lutte des classes, les choix de la dictature et de la solitude, de l’ordre pour maintenir ce qu’il reste d’humanité…. Bref, une œuvre riche, pessimiste et prêtant largement à la réflexion sans sacrifier l’action grâce à une équipe impliquée et une mise en scène redoutable. Assurément l’un des grands moments de cinéma de l’année et on y reviendra dans une critique plus complète.