Ma Vie avec Liberace, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Après un passage remarqué à Cannes, sur HBO et à Deauville, voilà donc Ma Vie avec Liberace enfin sur nos écrans, l’occasion pour Michael Douglas et Matt Damon de briller de mille feux dans le dernier Soderbergh.

Sorti aux USA directement sur HBO, Ma Vie avec Liberace, le dernier film de Steven Soderbergh qui a annoncé prendre maintenant sa retraite cinématographique (on verra bien pour combien de temps), fait donc partie de ces téléfilms luxueux, à l’instar du Phil Spector avec Al Pacino, qui risquent de pululer sur les grandes chaînes câblées américaines (l’année dernière, HBO avait aussi produit Hemingway & Gellhorn, également passé à Cannes) puisque Hollywood préfère sortir ses blockbusters à grande échelle. C’est donc seulement en Europe que ce biopic sur Liberace verra le jour sur grand écran.

Paradoxalement, ce n’est pas dans nos contrées que le pianiste surdoué à l’égo surdimensionné et flamboyant est le plus connu mais bien aux USA où, pendant les années 60 à 80, il a connu une ascension fulgurante, produisant des spectacles  à sa gloire, entre deux morceaux de Chopin pour devenir le roi des mamies de Las Vegas. Personnage parfois controversé et plus complexe qu’il n’y parait, il était pour Soderbergh, l’écrin idéal pour faire exploser une nouvelle facette du talent de Michael Douglas avec qui le projet de film remontait déjà à plusieurs années.

Débutant à la fin des années 70, Ma Vie avec Liberace débute donc quand le jeune Scott Thorson rencontre la star et va ensuite passé plusieurs années de sa vie avec lui. Une liaison tumultueuse (entre le monde du spectacle et la villa kitsch, les histoire d’argent, de drogue et de tromperies) dans un cadre luxueux  qui donne lieu à l’un des portraits les plus déroutants d’un homme en quête d’une jeunesse éternelle et d’un amour tout aussi éternellement jeune.
Sans faire un drame de la sexualité de ses personnages, le film parle vraiment d’amour, de la sincérité de celui-ci et de certaines déviances d’un vieil artiste pensant pouvoir acheter cet amour et la jeunesse de son compagnon pour satisfaire son égo. C’est certain, Michael Douglas n’est pas à son avantage dans ce rôle dans lequel il s’investit pleinement aux limites parfois du cabotinage qu’impose son personnage.

A côté d’un Michael Douglas étincelant dans ce film bourré de strass aveuglantes rendant parfaitement l’atmosphère queer et kitsch de l’époque, Matt Damon sera quand à lui tout aussi surprenant dans le rôle de ce petit ami qui va sacrifier beaucoup de sa liberté et de son physique dans cette relation hors normes. Si l’acteur s’est toujours montré bon, rarement on a ressenti autant d’intensité dans son jeu. Il forme ainsi à l’écran avec Douglas un couple auquel on s’attache malgré les excès de chacun.

Derrière sa caméra et ses deux acteurs, Steven Soderbergh s’efface par contre complètement. Il filme son histoire sans grandes envolées, se contentant de capturer les performances exceptionnelles qu’il a devant lui. Même si il va tout de même d’appuyer certains traits parfois ridicules (la séquence de la chirurgie esthétique avec un Rob Lowe méconnaissable est à mourir de rire) ou au contraire dramatiques du récit, l’émotion a un peu de mal à prendre le pas devant l’extravagance de son héros et de ses désirs.

Pour son dernier film, Steven Soderbergh préfère donc illuminer son ami Michael Douglas et lui offrir un rôle en or pour un festival de kitsch parfois touchant, souvent vampirisé par les prestations géniales de ses acteurs.