Woody Allen est de retour pour son film annuel et met la comédie de côté pour offrir un drame pas tout à fait à la hauteur du talent de l’impériale Cate Blanchett.
On a souvent l’habitude de parler des films de Woody Allen comme d’une cuvée annuelle de Beaujolais et je n’y ai pas manqué par le passé. Il faut dire qu’avec sa livraison à la fois régulière (pour le timing) et irrégulière (pour sa qualité), la comparaison n’est pas volée. Après la déception engendrée par son précédent To Rome with Love, il était donc attendu au tournant avec Blue Jasmine, d’autant plus qu’il change cette fois de registre pour le drame et c’est parfois dans ce genre que l’auteur new-yorkais se montre le plus inspiré (Match Point était tout de même l’un de ses sommets), ce qu’il tend à montrer ici.
Dans Blue Jasmine, Woody Allen raconte donc l’histoire d’une femme qui vient se réfugier chez sa soeur à San Fransisco après avoir tout perdu (son riche mari et donc son argent mais aussi ses rêves et ses envies). Semant le trouble dans la vie de sa sœur, elle va essayer de se remettre à vivre, mais y arrivera-t-elle vraiment ? Le réalisateur se montre ici assez pessimiste et même noir dans sa description du milieu de la bourgeoisie new-yorkaise mais c’est surtout le portrait d’une femme au bout du rouleau qui est passionnant.
En effet, profitant de la classe et du charisme naturel de son actrice, il offre à Cate Blanchett un rôle où elle se montre absolument impériale. Désespérée et tombant petit à petit dans la folie, le personnage de cette bourgeoise qui a été forcée de tout quitter est passionnant, d’autant plus quand elle s’enfonce véritablement dans le mensonge et l’illusion d’avoir une vraie vie. A la fois touchante et énervante, elle fait tout pour que l’on ait pitié d’elle et ça fonctionne à merveille.
Mais derrière cette grande performance d’actrice, Woody Allen s’efface complètement et laisse sa caméra tourner avec sa nonchalance habituelle, n’allant jamais chercher à intensifier ce destin, cette histoire, par un quelconque moyen et heureusement que la construction en flashback est là pour apporter un minimum de rythme. Alors le grand drame qu’il aurait pu être se révèle malheureusement assez anecdotique, sans envergure, dans la lignée du train train qu’il nous propose régulièrement (scènes dans la rue ou en appartement, petite musique jazzy, …). C’est dommage tant le film méritait plus d’efforts pour nous emporter dans la folie de Cate Blanchett.
Au final, ce Blue Jasmine vaut donc le coup d’œil mais essentiellement pour la performance irréprochable d’une Cate Blanchett au sommet car pour le savoir-faire d’un Woody Allen paresseux, on repassera.