Pied au plancher, Ron Howard donne le meilleur de lui-même et livre avec Rush l’un des meilleurs films sur le sport automobile ! Accrochez-vous !
C’est avec le scénariste Peter Morgan (qui a largement fait ses preuves avec le Dernier Roi d’Écosse, the Queen, Skyfall ou justement Frost/Nixon) qu’il va creuser ce milieu sportif extrême mais surtout la personnalité de ces deux pilotes hors normes. Car avant de s’attaquer au sport (non, Rush n’est pas une accumulation de courses spectaculaires), le film va surtout parler de ces deux hommes, de leur rivalité et leur respect mutuel, donnant alors une véritable consistance et une humanité au film. Alors que l’on aime détester Niki Lauda à cause de sa droiture exagérée et de ses manigances, on déteste aimer James Hunt pour sa décontraction même dans les moments les plus difficiles. Il n’y a pas de parti pris pour l’un ou l’autre et si tous les deux n’ont pas énormément de scènes ensemble mais on sent bien la complexité de ce qui les lie : une adversité qui les pousse à se dépasser l’un l’autre.
Avec un scénario bien écrit, qui ne joue pas de trop sur les ressorts habituels du film sportif menant tout droit à la victoire, le réalisateur s’intéresse à travers ces deux personnes au sport automobile et le comprend parfaitement. Ici ce n’est pas un jeu et il peut y avoir des morts. A ce titre, l’accident de Lauda et ce qu’il va endurer par la suite, ainsi que le courage dont il fait preuve en reprenant le volant, sont particulièrement bien traités. Mais si Ron Howard a bien compris une chose, c’est que la F1 est aussi une histoire de regards, sur la piste, sur les adversaires, sur la vie qui peut défiler… Tout passe donc souvent par les yeux dans Rush et l’une des scènes les plus fortes du film est sans conteste cet échange de regard entre Hunt et Lauda, rempli de défiance et de respect mutuel et lourd de sens.
Transcendé par son sujet, Ron Howard a donc réussi à livrer un film qui comprend parfaitement l’essence du sport et des pilotes mais nous offre également un récit parfaitement rythmé qui ne fait que monter en pression jusqu’à la fin sans jamais tomber dans le pathos auquel il a pu nous habituer par le passé. C’est bien simple, on ne voit pas les deux heures de film passer, et encore mieux, on en redemande pour en savoir plus sur la relation entre Hunt et Lauda. Parfaitement équilibré entre scènes intimistes et séquences de courses pendant lesquelles on s’accroche à notre fauteuil, on se prend facilement au jeu, même si la F1 n’est pas notre intérêt premier. Avec une image parfois usée, il retranscrit bien l’ambiance des stands dans années 70 pendant lesquelles ce sport bénéficiait encore d’une certaine passion pour la vitesse et le plaisir du sport sans oublier le professionnalisme qu’il requière.
Si l’on sent que le réalisateur s’implique vraiment dans son film, c’est aussi le cas des comédiens qu’il entraine dans son sillage et qui se révèlent plus intenses qu’à l’accoutumée. Ainsi, alors que James Hunt pouvait être le cliché du playboy désinvolte, Chris Hemsworth lui apporte une belle profondeur tandis que Daniel Brühl a enfin fini de jouer les jeunes premiers pour un personnage de Niki Lauda tout en subtiles contradictions. Le réalisateur pousse même Hans Zimmer à dépasser ses « boom boom» habituels pour la musique du film.
Plus qu’une bonne surprise, Rush prend donc directement une très bonne place sur la grille de départ des meilleurs films sur le sport automobile et même sur l’esprit sportif en général, s’affranchissant des clichés pour nous offrir un récit aussi poignant que haletant. De quoi faire une rentrée à 100 à l’heure !