« Machete kills » de Robert Rodriguez

Par Boustoune

Au départ, Machete était juste une idée de fausse bande-annonce pour agrémenter le double programme Grindhouse de Quentin Tarantino et Robert Rodriguez (Boulevard de la mort et Planète Terreur). Un truc dans l’esprit de la Blaxploitation, mais avec des acteurs Latinos à la place des acteurs Noirs.
Mais dès que les spectateurs ont vu ce faux trailer, ils ont tout de suite accroché au concept, et surtout à ce personnage de mercenaire mexicain aux muscles saillants et au visage buriné, qui dézingue les bad guys à coup de machette avec une frénésie qui ferait pâlir de jalousie un Jason Voorhees.
Ses fans ont alors pressé Robert Rodriguez de réaliser vraiment le film en question.

Le cinéaste a fini par craquer et  a tourné Machete, le long-métrage, avec son vieux complice Danny Trejo dans le rôle-titre, quelques bimbos affriolantes et la participation d’une liste de guest-stars impressionnante (Robert DeNiro, Cheech Marin, Jeff Fahey, Lindsay Lohan, Steven Seagal, Don Johnson…). Cela a donné une série B délirante à souhait, truffée de répliques cultes et de scènes d’actions explosives, malgré un scénario des plus linéaires. Et, pour rester fidèle à l’esprit Grindhouse, le cinéaste a glissé dans le générique de fin que Machete reviendrait très vite dans Machete kills et Machete kills again… in space. Il ne voulait pas vraiment tourner ces suites, juste faire un clin d’oeil à ces sagas d’exploitation axées autour du même personnage, façon Shaft. Mais là encore, les fans ont pris le truc au premier degré, exigeant la mise en chantier des deux films. Et Rodriguez a cédé en réalisant le  deuxième épisode.

On y retrouve notre chicano préféré en fâcheuse posture. Une opération policière, visant à mettre fin à un trafic entre un cartel mexicain et des militaires américains ripoux, tourne mal avec l’intervention d’un troisième gang, composé de tueurs surentraînés. Ils parviennent à s’emparer d’un missile nucléaire et exécutent Sardana (Jessica Alba), la partenaire et maîtresse de Machete. Celui-ci, mystérieusement épargné par les tueurs est arrêté par les autorités locales, qui l’accusent du meurtre et envisagent de le pendre illico. Il ne doit son salut qu’à l’intervention du Président (Carlos Estevez, plus connu sous le pseudonyme de Charlie Sheen) qui a besoin de lui pour une mission de la plus haute importance : le missile dérobé est tombé entre les mains de Mendez le fou, un rebelle mexicain illuminé (Demián Bichir) qui envisage de le lancer sur Washington, histoire de voir si cela génère l’apocalypse nucléaire. Le Président ne peut intervenir sans risquer de froisser les autorités mexicaines. Machete doit aller sur place et envoyer ad patres le psychopathe.
Une formalité…

Mais voilà, Mendez est un petit malin. Il a greffé la commande de lancement du missile sur son propre coeur. S’il meurt, le missile sera lancé. S’il survit et que le mécanisme n’est pas désactivé au bout de 24h, les conséquences seront les mêmes. le seul moyen de désactiver le détonateur est de le faire enlever par un expert en explosifs. Et le seul qui est encore en vie et capable de faire cela se trouve aux Etats-Unis… Le hic, c’est qu’il faut déjà regagner la frontière et que ce n’est pas chose facile, surtout avec des tueurs lancés aux trousses et la quasi-totalité de la population prête à vous faire la peau pour quelques pesos de plus.

C’est là que les choses se gâtent. Parce que si le début du film est plutôt plaisant, malgré d’évidentes faiblesses scénaristiques, le récit s’enlise alors dans une course-poursuite longuette, où on a tout le temps de constater l’invraisemblance du scénario, ses effets usés, ses rebondissements à deux balles. Le premier Machete n’était pas un modèle de finesse, mais le scénario tenait à peu près la route, jusqu’à un final qui tournait au “grand n’importe quoi”. Là, ce n’est pas le cas. Le film tourne juste au “petit n’importe quoi”. Si le côté bâclé et fauché du film Grindhouse est respecté, tout comme le côté parodique, il manque la petite différence capable de transcender le sous-genre en quelque chose de cinématographiquement excitant, comme sait si bien le faire Tarantino. Et les péripéties répétitives finissent par lasser.

On a l’impression que Robert Rodriguez n’a pas été très inspiré pour écrire ce deuxième épisode paresseux, alors qu’il semble au contraire très enthousiasmé par le concept du troisième épisode, qui enverra le héros en orbite pour offrir aux étoiles du carpaccio de vilain. On peut le comprendre car l’idée, excitante, permet de recourir à plein de références cinématographiques cultes – à Star Wars, notamment – et de se payer un superbe délire – toujours cette idée de “Grand N’importe quoi”…

On voit qu’il s’est fait plaisir en signant la fausse bande-annonce de ce Machete kills again… in space, qui précède la projection de Machete kills. Dans ce petit morceau de pellicule, notre moustachu buriné combat un vilain masqué à coups de… machette-laser et on découvre la version cyborg de Luz (Michelle Rodriguez), l’alliée de Machete. Par ailleurs, le scénario retrouve un peu d’allant dans son dernier quart, celui qui prépare justement le terrain pour cette suite spatiale, grâce à la mise à disposition de tout un tas de joujoux high-tech comme des landspeeders (comme dans Star Wars!), des désintégrateurs moléculaires et, of course, des machettes 2.0.

Attention, on ne dit pas que l’éventuel troisième volet sera un chef d’oeuvre, loin de là. Il est même probable que le script sera tout aussi indigent et tout aussi crétin. Mais au moins, il a des chances d’être plus drôle, plus inspiré, plus jubilatoire que ce Machete kills.

Après, il n’y a pas tromperie sur la marchandise non plus. Ceux qui ont vu et aimé le premier Machete s’attendaient à un film d’action de série B/Z efficace – c’est à peu près le cas – et riche en bagarres et en explosions – c’est toujours le cas. Danny Trejo incarne le héros avec beaucoup de charisme et d’autorité, balançant quand il le faut des répliques-cultes (“Machete don’t tweet!”). Il est entouré de babes ultra-sexy (exit Jessica Alba, mais hello à Amber Heard, Sofia Vergara – en sous-vêtements blindés - Alexa Vega et Vanessa Hudgens) et épaulé par un casting encore foisonnant (avec notamment cinq acteurs se partageant le même rôle du caméléon – Walton Goggins, Cuba Gooding Jr, Antonio Banderas et… Lady Gaga!).

La mise en scène est foireuse, mais c’est normal, pour un Grindhouse et le scénario, comme on l’a vu, est faiblard et aurait mérité un peu plus de soin, mais là encore, il n’y a pas d’entourloupe. C’est Machete, pas un film intello…
C’est globalement fun, ça ne fatigue pas les neurones et ça se laisse voir avec un certain plaisir. Coupable, certes, mais plaisir quand même.

On se contentera de ça en attendant le troisième épisode, avec un fiévreux mélange de craintes et d’espoirs.

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Machete kills
Machete kills

Réalisateur: Robert Rodriguez
Avec : Danny Trejo, Michelle Rodriguez, Mel Gibson, Amber Heard, Demián Bichir, Charlie Sheen, Sofia Vergara
Origine : Etats-Unis
Genre : série B façon Grindhouse
Durée : 1h48
Date de sortie France : 02/10/2013
Note pour ce film : :●●●○○○
Contrepoint critique : Filmosphère
                               20 minutes

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