La Vie d’Adèle, critique

La Vie d’Adèle, critique

Récompensé par la Palme d’or à Cannes, il était bien normal de s’intéresser au film fleuve du décrié Abdellatif Kechiche qui a peut-être été un peu sur-évalué : La Vie d’Adèle.

La Vie d’Adèle, critiqueUne Palme d’Or à Cannes, des critiques presque unanimes qualifiant le film de chef d’œuvre et une grosse polémique entretenue pendant des mois jusqu’à sa sortie sur les conditions de tournage, il n’en faut pas lus pour que la Vie d’Adèle soit assurément l’un des événements cinéma d’octobre. Mais derrière tout le battage médiatique, il y a avant tout un film, celui d’Abdellatif Kechiche (déjà multiprimé au sein de notre grande famille du cinéma français pour l’Esquive et la Graine et le Mulet que nous avons soigneusement évité) qui, inspiré par le roman graphique Le Bleu est une Couleur Chaude de Julie Maroh, raconte l’histoire de la jeune Adèle, lycéenne, tombant amoureuse d’Emma. Un coup de foudre inattendu qui va évidemment changer sa vie, mais surtout la faire vivre, malgré les épreuves qui s’imposent.

Caméra à l’épaule, cherchant chaque regard, chaque émotion sur les visages de ses actrices, le réalisateur va, pendant trois heures, capturer tout ce qu’il peut de cette histoire intime. Débutant par dépeindre le quotidien d’Adèle au lycée, ne trouvant pas la joie dans sa relation avec Thomas au coup de foudre, il s’en suit une histoire d’amour passionnée avec Emma qui durera un temps, jusqu’à ce que notre héroïne peine à s’épanouir. La passion laissant la place à la routine et à d’autres envies mais tout de même toujours présente.

La Vie d’Adèle, critique

Sur trois heures, Kechiche nous propose ici un récit assez ambitieux autour de cette histoire d’amour qui s’impose d’elle-même de manière naturelle, comme une attirance à laquelle il n’est pas possible d’échapper. il n’est point question ici d’aborder l’homosexualité de ces femmes comme un sujet à part mais juste de montrer deux personnes qui s’aiment, se déchirent, se désirent, … sur une période de vie allant du lycée aux premières années de vie professionnelle d’Adèle.

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Pour autant, si l’on sera forcément touché par cette histoire d’amour remplie de spontanéité grâce à la manière très proche de film du réalisateur qui s’inscrit complètement dans le cercle de l’intime pour déceler chaque bribe de sentiments, il nous en éloignera régulièrement en faisant durer ses séquences plus que de mesure. Ainsi, de nombreuses fois, pendant certaines scènes, on  aimerait bien passer un peu en accéléré pour en arriver à l’essentiel. Car à force de regarder des détails, le réalisateur met ceux-ci au même niveau que le récit essentiel qu’il veut nous raconter. Et c’est dommage car il passe alors à coté d’autres aspects plus intéressants comme la revendication de l’amour d’Adèle pour Emma dans le cercle familial ou des amis,… (à ce titre, les représentation des parents des deux jeunes filles et du milieu artistique dans lequel Emma évolue sont assez cliché et pas très subtiles), jusqu’à la conclusion que l’on attendait plus marquée après trois heures de récit, comme si finalement, on attendait toujours de savoir quoi raconter.

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A ce jeu là, les scènes de sexe très crues peinent aussi à trouver leur utilité ou tout du moins, leur légitimité dans le traitement qui en est proposé. Évidemment, la première relation passionnée devait être montrée avec toute cette fougue mais était-il besoin de le montrer aussi longtemps et sous toutes les coutures et de répéter ensuite ce type de scène de manière inutile quand des visions bien plus subtiles et poétiques de cet acte charnel pouvaient largement suffire et auraient même pu apporter une touche de rêve au milieu de la réalité qui n’aurait pas dérangé dans le contexte spontané du film. Et ce, d’autant plus que l’art, la littérature, la philosophie sont cités tout au long du film et pouvaient donc permettre de beaux parallèles oniriques rappelant l’origine dessinée de l’histoire et apportant ainsi plus d’émotion et d’émerveillement ou de désespoir quand les sentiments s’en mêlent.

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Évidemment, c’est dans ces scènes là, mais aussi dans ‘autres scènes moins « sensationnelles»  mais toutes aussi riches que l’on peut constater tout l’investissement énorme des deux actrices. Et si Léa Seydoux fait plutôt mine de s’encanailler sans pour autant délivrer beaucoup de sentiments avec son regard vide et sa moue inexpressive (si elle peut faire illusion quand elle n’a rien à dire, c’est flagrant dès qu’elle doit parler), la jeune Adèle Exarchopoulos est une véritable révélation, un petit bout de femme rempli d’émotions que le réalisateur arrive aussi bien à provoquer qu’à capturer, on espère alors qu’elle ne sera pas la prisonnière de ce rôle comme d’autres ont pu l’être après des expériences aussi intenses.

A trop vouloir s’accrocher à ses personnages et capter leurs moindres gestes et regards, Abellatif Kechiche nous emporte donc à leurs côtés, dans leur intimité et on ne peut donc qu’être touché par l’histoire d’Adèle. Mais il est dommage de ne pas avoir réussi à apporter un peu plus de subtilité et d’émotion imagée pour en ressortir vraiment bouleversé.