En Solitaire [Critique]

Par Kevin Halgand @CineCinephile

"Yann Kermadec voit son rêve se réaliser quand il remplace au pied levé, son ami Franck Drevil, au départ du Vendée Globe, le tour du monde à la voile en solitaire. Habité par une farouche volonté de gagner, alors qu’il est en pleine course, la découverte à son bord d’un jeune passager va tout remettre en cause."

Les films se déroulant en mer sont peu nombreux, mais ils s’avèrent être très intéressants, car le monde marin est fascinant. Très mystérieux, le monde marin peu permettre à de bons scénaristes de créer des histoires folles et passionnantes (La Vie Aquatique, Le Monde du Silence), mais également des films réalistes qui réussissent à nous effrayer et/ou à nous émouvoir (Les Dents de la Mer, L’Odyssée de Pi, La Pirogue). D’autres metteurs en scène décident de s’attaquer au monde de la mer pour permettre aux spectateurs de trouver de l’empathie et de l’émotion auprès de personnages censés être la représentation de l’être humain. Ce sera le cas dans le prochain film de J.C Chandor qui se nomme All is Lost, mais c’est également le thème abordé dans le premier film de Christopher Offenstein : En Solitaire. Si on passe sur le fait que le personnage principal se nomme Yann Kermadec, comme si seulement les Bretons étaient navigateurs, En Solitaire repose sur une bonne idée qui est de retranscrire la course du Vendée Globe sur grand écran afin de faire découvrir la navigation au grand public. Navigateur est très certainement le métier le plus difficile et le plus gratifiant qui existe. Sportifs admirables, les navigateurs n’ont jamais eu de films relatant les émotions qu’ils ressentent lors d’une course si importante que le Vendée Globe. En Solitaire est un film qui sur le papier nous promet de la course, mais aussi de l’humain à travers deux personnages principaux.

Malheureusement, à vouloir aborder deux thèmes à la fois, Christopher Offenstein et Jean Cottin se prennent les pieds dans le pied et font de ce long métrage un film creux, sans émotion et sans intérêt. Débutant le premier jour de la course avant de finir lors de l’arrivée du vainqueur aux Sables d’Olonne, le spectateur embarque très rapidement à bord du monocoque de Yann Kermadec et entre en empathie avec son skipper. Le spectateur ressent les mêmes sensations que le skipper et il souhaite que ce dernier face tout pour gagner la course afin de faire plaisir à sa femme (incarner par Virginie Efira) et son beau-frère lui aussi skipper. On sourit et on peu être ému à certains moments, mais le film s’engouffre dans un pathos moralisateur typiquement français à partir du moment où Yann Kermadec découvre Mano Ixa sur son monocoque. Le thème moralisateur de l’humain bon et parfait devient élément primaire du scénario, au détriment de la retranscription de la course et de sa dureté physique comme mentale pour les skippers. C’est un choix douteux et au combien dégressif pour l’immersion du spectateur dans le film et pour la qualité finale du film. Au lieu d’être compétitif, le film est moralisateur et pathos à cause de son scénario, mais il n’y a pas que le scénario dans un film !

En effet, en plus du scénario, on retrouve la réalisation (avec la technique) et le casting qui sont très importants. Filmé intégralement sur un monocoque dans des conditions très difficiles, on ne peut que tiré notre chapeau à Christopher Offenstein et son équipe technique. Visuellement très beau et filmé en permanence avec une caméra stable (sur un bateau qui bouge en fonction des conditions climatiques tout de même), le spectateur prend un malin plaisir à voir évolué le monocoque en fonction des tempêtes et autres perturbations météorologiques. Sublimé par une très belle photographie signée Guillaume Schiffman, le film est un très bel hommage à la mer. A noter que les effets sonores sont vraiment superbes et aides dans l’immersion du spectateur. Une belle réalisation, une belle photographie et un casting convaincant porté par un François Cluzet excellent, mais En Solitaire c’est surtout un film aux pistes sonores répétitives et agaçantes, porté par un scénario mal écrit qui emporte le spectateur vers une morale humaine navrante, fausse et sans arguments. Un beau raté.