Capitaine Phillips, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Hasard du calendrier, après l’excellent Hijacking danois, un nouveau film de piraterie contemporaine accoste dans les salles, mais c’est fois c’est Paul Greengrass qui met Tom Hanks dans la tourmente dans le rôle de Capitaine Phillips.

Mine de rien, cela faisait 3 ans que l’on n’avait pas revu Paul Greengrass nous remettre sous tension au cinéma (depuis Green Zone en fait). Mais ce n’est pas pour autant qu’il a perdu de son savoir-faire car le réalisateur des deux meilleurs volets de la trilogie Jason Bourne s’accapare un nouveau fait réel (après Vol 93) pour adapter le livre de Richard Phillips A Captain’s Duty: Somali Pirates, Navy SEALS, and Dangerous Days at Sea. Un titre à rallonge pour un sujet délicat, celui de la piraterie au large des côtes somaliennes. Et cette fois, le réalisateur n’a pas choisi Matt Damon mais un autre acteur campant parfaitement l’américain moyen : Tom Hanks.

Si l’on pouvait redouter que le film aille dans les même eaux que l’excellent Hijacking, autant le dire tout de suite, le traitement est différent, que ce soit sur la durée de l’histoire couverte (des semaines dans le film danois, quelques jours pour celui de Greengrass) ou ses ramifications (la négociation de l’employeur chez les danois, l’intervention militaire pour les américains évidemment). D’ailleurs, sans révéler toute l’intrigue, ici, tout le film ne se déroule pas sur le bateau avec l’équipage aux prises avec les pirates mais réserve quelques autres surprises.

Ainsi, avec Capitaine Phillips, nous ne sommes pas forcément en terrain connu tant mieux, cela laisse à Paul Greengrass tout le loisir de nous bousculer comme lui seul sait le faire. En effet, le réalisateur est reparti dans son style quasi-documentaire, millimétré, caméra à l’épaule avec des plans n’excédant pas les 5 secondes. Mais il a beau avoir cette manie, il la maitrise à la perfection et nous ne sommes jamais perdus dans l’action. Au contraire, il arrive à nous plonger dans une certaine tension à l’abordage des pirates.

Si le film accuse un certain coup de mou au milieu (sur 2h15, difficile de tenir toute la distance), il repart tout de même de plus belle ensuite pour ne plus nous lâcher jusqu’à l’issue que connaitra le Capitaine Phillips. Et si l’on peut reprocher au réalisateur une approche parfois neutre en montrant des pirates en perte de leurs moyens et contraints eux-mêmes à vivre ainsi, cet aspect apporte alors aux « méchants»  une certaine humanité et, en même temps, une certaine imprévisibilité, un mauvais coup pouvant partir sans prévenir. Sans les rendre diaboliques mais en les comprenant, sans pour autant cautionner leurs actes, il se sert de ces personnages pour créer un véritable suspense tout comme il se sert des militaires américains pour montrer les dérives de l’emploi de la force des américains.

Mais à côté du récit de Paul Greengrass et de son indiscutable maîtrise de la tension, impossible de faire l’impasse sur la performance au cordeau de Tom Hanks qui ne s’était pas montré aussi juste et charismatique depuis longtemps. A croire que l’âge fait du bien à l’acteur car il fait ici véritablement preuve de caractère face aux pirates. Loin de subir les événements comme dans ses nombreux films précédents, il va ici se battre comme il peut pour sortir son équipage de cette galère et surtout sauver sa peau. Et son personnage est également le véhicule d’une donnée que l’on avait peu dans le cinéma de Paul Greengrass jusqu’ici : l’émotion. En effet, l’acteur se montre tellement convaincant dans les dernières scènes du film qu’il se dégage de sa prestation une véritable intensité émotionnelle et il ne serait donc pas étonnant (et il serait même mérité) de retrouver Hanks nommé aux oscars.

Thriller maritime sous une tension permanente, loin d’être bête, Capitaine Phillips, avec son formidable Tom Hanks est certainement l’un des derniers films à pouvoir bien nous secouer avant la fin de l’année alors autant en profiter.