Culte du dimanche : Carrie au bal du Diable

Par Fredp @FredMyscreens

Alors que la nouvelle adaptation pointe le bout de son nez, il nous fallait impérativement revenir sur Carrie au bal du Diable qui a fait exploser Brian De Palma !

Au début des années 70, Stephen King publie son premier roman, Carrie. L’histoire d’une adolescente mal dans sa peau qui développe d’étranges pouvoirs télékinétique et qui est martyrisée par sa mère et ses camarades de classe. Le succès est immédiat et le jeune auteur va enchainer les succès littéraire et ne se consacrer qu’à l’écriture. Évidemment, un livre à succès entraine forcément une adaptation, d’autant plus qu’à cette époque, les films pour ados comme les films d’horreur commencent à avoir un certain succès.

Et après le succès inattendu de Phantom of the Paradise c’est Brian De Palma qui va s’en occuper, un choix qui n’est pas étonnant quand on connait l’attrait du jeune cinéaste pour le thriller et les questions religieuses et sexuelles parfois morbides (il vient de sortir Obsession). Après un casting conjoint avec George Lucas pour Star Wars, c’est Carrie Fischer qui était choisie pour incarner le rôle titre, mais cette dernière ne voulant pas apparaitre nue à l’écran, c’est Sissy Spacek l’emportera. Un choix décisif dans la carrière de la comédienne qui ne pourra plus se défaire de cette image de jeune fille effrayée et recouverte de sang.

Mais revenons-en au film qui, évidemment, ne sera pas totalement fidèle au livre mais réussi à en capter l’essence. En effet, il s’agit là d’une métaphore sur les déboires de l’adolescence difficile, sur l’acceptation de soi et des autres mais aussi sur la difficulté de devenir une femme, en particulier face à une religion et une mère castratrice. Développant de nombreux thèmes, le film, comme le livre, se montre assez riche et inspire une véritable réflexion à plusieurs niveaux, que l’on soit ado en recherche de frissons ou parent désirant mieux comprendre la génération qui suivra.

Si c’est un film de commande, De Palma trouve tout de même le moyen d’y imprimer toute sa patte et ce, dès l’ouverture avec des plans-séquences nous montrant tout de suite la jeune Carrie isolée de ses camarades. Mais aussi en faisant apparaitre l’horreur derrière la sensualité du générique ouvrant le film, lorsque Carrie découvre ses règles sanglante avant de se faire lyncher par ses odieuses camarades à cause de son ignorance et de sa bizarrerie. Et tout le cinéma de De Palma sera là, continuant d’expérimenter l’image avec une mise au même niveau du premier et de l’arrière-plan, l’utilisation du split-screen et d’images directement issues de l’imagerie religieuse (la crucifixion de la mère).

C’est aussi l’occasion pour le réalisateur de travailler pour la première fois avec Pino Donnaggio (qu’il retrouvera ensuite sur Pulsions, Blow Out ou Body Double), donnant alors au film adolescent une dimension tour à tour sensuelle ou purement horrifique rappelant le Bernard Herrmann de Psychose. Une coïncidence qui n’en est pas une quand on sait que le compositeur d’Hitchock devait à l’origine officier sur Carrie et quand on connait tout l’attrait de De Palma pour le cinéma du maître du suspense. Le nom du lycée (Bates), et sa manière diabolique d’orchestrer l’humiliation de Carrie au bal ne sont d’ailleurs pas des emprunts innocents.

Mais Carrie est aussi l’occasion pour le réalisateur de travailler pour la première fois avec sa future compagne Nancy Allen et John Travolta (avant que celui-ci n’explose) avant de les réunir plus tard dans Blow Out. Tout comme il retrouvera dans le Amy Irving dans son film suivant, Furie, traitant encore une fois de télékinésie. Mais face à la discrète mais excellente Sissy Spacek, c’est évidemment Piper Laurie qui va attirer tous les regards dans le rôle de la mère, religieuse fanatique séquestrant sa fille.

Devant la réussite publique et critique du film, la carrière de Brian De Palma prend un nouvel essor et il peut à loisir naviguer entre films personnels et commandes, arrivant à rendre imprimer sa patte à ces dernières. Mais c’est aussi le début d’une vague d’adaptation plus ou moins réussies des romans de Stephen King au cinéma au début des années 80, de Shining à Christine en passant par Dead Zone.