On ne peut pas être et avoir été…
Si, dans les années 1970/1980, Dario Argento a été adulé, à juste titre, par les fans de cinéma de genre, cela fait bien longtemps qu’il n’a rien tourné de valable. Son dernier succès, Phenomena, date quand même de 1985. Et son dernier “bon” film, Le Syndrome de Stendhal, de 1996…
Il faut se rendre à l’évidence, sa carrière est bel et bien morte et enterrée.
Seulement voilà, l’inconvénient, avec les réalisateurs de films fantastiques, c’est qu’il leur arrive de revenir parfois d’outre-tombe pour tourmenter les vivants. Comme des vampires…
D’ailleurs, c’est avec une nouvelle adaptation du “Dracula” de Bram Stocker, le chef d’oeuvre de la littérature vampirique, que Dario Argento fait son grand retour sur les écrans. Enfin, “grand”, c’est une façon de parler, hein…
Car au bout d’à peine dix minutes, on comprend que ce qui devait être “le nouveau chef d’oeuvre du maître de l’horreur” est surtout une grosse série Z fauchée qui ne provoquera aucune autre sensation qu’une contraction involontaire de nos zygomatiques.
Les décors sont minimalistes – quatre gousses d’ail accrochées aux murs, trois bougies, et hop, le tour est joué!
Les acteurs rivalisent de nullité. S’ils avaient postulé, à l’époque, pour un nanar de Jess Franco ou de Paul Naschy, ils n’auraient sans doute jamais été engagés, vu leur niveau. Les second rôles italiens baragouinent dans un anglais approximatif pour déclamer des répliques risibles, mal pompées sur les classiques des films de vampire. Les premier rôles “internationaux” ont une diction à peine meilleure, et des dialogues tout aussi lamentables.
Unaxe Ugalde, l’acteur espagnol qui “incarne” Jonathan Harker, a autant de charisme qu’une endive moisie, mais ce n’est rien à côté de Thomas Kretschmann, sans doute le pire Dracula ayant jamais mis les pieds sur un plateau de tournage. Et pourtant, il y en a eu, des Dracula ringards… Celui-là n’est jamais crédible, n’inspire ni la peur, ni le désir, juste de la pitié.
Même Asia Argento, qui n’est quand même plus une débutante, jette l’éponge devant la vacuité du script, très librement adapté du roman de Bram Stocker. Au bout de cinq minutes, comprenant qu’elle n’a rien à jouer de très intéressant, hop, elle se met à poil. Bon, pourquoi pas, elle a quand même quelques arguments à faire valoir. Mais comme c’est son papa qui tient la caméra, cela créée un petit malaise quand même…
Le seul qui s’en tire à peu près honorablement, même s’il semble constamment se demander ce qu’il fout là, c’est Rutger Hauer, dans le rôle de Van Helsing. Autant le dire tout de suite, ce n’est pas le rôle le plus marquant de sa carrière…
Restent les effets spéciaux. Calamiteux.
Du ketchup pour les effets gore. Et, pour le plaisir des yeux, les transformations multiples de Dracula, à faire pâlir de jalousie Arturo Brachetti. Outre les classiques loup et chauve-souris, Argento innove en métamorphosant notre vampire préféré en… mante religieuse géante. Du grand n’importe nawak, on vous dit!
Quant aux effets 3D, censés être l’argument de vente ultime du film, quelle audace! Faire voler une mouche devant les yeux des spectateurs, ça c’est du grand spectacle, les gars!
Si le film était une parodie, on pourrait apprécier son second degré, sons sens de l’autodérision et se payer une bonne tranche de rigolade. Mais voilà, ce n’est pas le cas… Pire, on soupçonne Argento d’avoir essayé de faire un film très sérieux, apte à concurrencer la version de Francis Ford Coppola, comme le laisse supposer son titre original complet “Dario Argento’s Dracula”. Le cinéaste italien a peut-être vu ce film comme son chant du cygne. Hélas, le volatile a trépassé depuis longtemps, et sa charogne commence sérieusement à refouler…
On ne saurait que trop conseiller à Dario Argento de ranger définitivement sa caméra avant de ruiner complètement une réputation gagnée de dure lutte avec des oeuvres telles que Les Frissons de l’angoisse ou Suspiria. Restons-en là, sur les images de ses chefs d’oeuvres, qui ont marqué le genre, et oublions tous les infâmes nanars qu’il a accumulés au cours de trente dernières années.
On ne peut pas être et avoir été…
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Dario Argento’s Dracula
Réalisateur : Dario Argento
Avec : Thomas Kretschmann, Unaxe Ugalde, Rutger Hauer, Asia Argento, Marta Gastini
Origine : Italie, Espagne, France
Genre : tu t’fous d’ma goule, Dario?
Durée : 1h46
Date de sortie France : 27/11/2013
Note pour ce film : :○○○○○○
Contrepoint critique : Critikat
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