Les Brasiers de la Colère [Critique]

Par Kevin Halgand @CineCinephile

"À Braddock, une banlieue ouvrière américaine, la seule chose dont on hérite de ses parents, c’est la misère. Comme son père, Russell Baze travaille à l’usine, mais son jeune frère Rodney a préféré s’engager dans l’armée, en espérant s’en sortir mieux. Pourtant, après quatre missions difficiles en Irak, Rodney revient brisé émotionnellement et physiquement. Lorsqu’un sale coup envoie Russell en prison, son frère cadet tente de survivre en pariant aux courses et en se vendant dans des combats de boxe. Endetté jusqu’au cou, Rodney se retrouve mêlé aux activités douteuses d’Harlan DeGroat, un caïd local sociopathe et vicieux. Peu après la libération de Russell, Rodney disparaît. Pour tenter de le sauver, Russell va devoir affronter DeGroat et sa bande. Il n’a pas peur. Il sait quoi faire. Et il va le faire, par amour pour son frère, pour sa famille, parce que c’est juste. Et tant pis si cela peut lui coûter la vie."

Du haut de ses 43 ans, Scott Cooper c’est imposé être un brillant réalisateur, metteur en scène et scénaristes avec seulement un film à sa filmographie. Portant le nom Crazy Heart, ce premier film fut une véritable claque. Un drame saisissant et poignant mettant en scène Jeff Bridges et Maggie Gyllenhaal et Colin Farrell. Un peu plus de trois ans après la sortie de Crazy Heart, Scott Cooper revient en force avec Out Of The Furnace, thriller au casting cinq étoiles dans lequel nous retrouvons Christian Bale, Woody Harrelson, Casey Affleck, Zoe Saldana, Willem Dafoe, Forest Whitacker et Sam Shepard. Thriller familial sur fond de vérité sociétale, Les Brasiers de la Colère est très clairement le thriller dramatique le plus ambitieux que l’on ai pu voir depuis Killer Joe signé William Friedkin. Porté par la volonté d’offrir aux spectateurs l’histoire d’un frère qui est prêt à tout pour retrouver son frère disparu, Scott Cooper ne s’arrête pas seulement au fait d’offrir une simple histoire. Pour développer cette histoire correctement, il fait le choix de créer une société à part entière et de mettre en place un véritable univers autour de ses personnages.

Se déroulant dans une société rurale n’ayant que peu de choses à voir avec l’image que l’on est en droit de se faire d’une société moderne portée par l’envie de consommer à outrance, le film développe son intrigue autour de cette société où les personnes travaillent à l’usine pour survivre. L’usine est l’endroit par lequel doit passer toute personne qui a besoin de gagner de l’argent afin de subvenir aux besoins de la vie. Centre financier de cette banlieue ouvrière, chaque ouvrier ne semble par heureux de vivre à Braddock, sauf qu’à travers son récit, Scott Cooper nous fait comprendre qu’un ouvrier est heureux du moment que ceux qui l’entoure le sont également. Pour nous démontrer cela, le scénario met le spectateur face à une vérité vraie qui est le retour psychologique des militaires rentrant de missions délicates. Ayant dû faire face à des atrocités durant ses missions, le militaire est psychologiquement blessé et ne se rend plus compte de ce qu’il l’importe. Véritable combattant, ce militaire n’est plus le même homme et ces actions/réflexions auront de véritables impacts sur ces proches.

Brillamment écrits, les personnages ont des psychologies complexes, mais très intéressantes, car celle-ci sont en corrélation parfaite avec leur banlieue qui leur instigue une façon de vivre. Intelligemment écrit dans son intégralité, Les Brasiers de la Colère est un film passionnant et bouleversant grâce à l’attachement qui se met en place petit à petit entre le spectateur et les personnages, mais c’est surtout un film brutal. Vivants dans une banlieue rurale dans laquelle le centre financier est une usine où le travail est aussi dur psychologiquement que physiquement, cette usine est la représentation parfaite du ton du film. Servi par une colorimétrie très sombre qui compte sur des tonalités ocre qui nous rappellent cette usine faite d’acier rouillé, le film dispose de scènes violentes imprévisibles. Sachant que les personnages sont capables de tout à cause de leur psychologie animale qui les forces à devenir le chef de la meute tout en protégeant leurs proches, le spectateur n’est en aucun cas capable de prévoir à quoi ressemblera le plan final du film.

Grâce à une connaissance parfaite de son scénario, Scoot Cooper est capable de nous offrir une ambiance sombre et dérangeante grâce à une belle maîtrise de sa caméra et de ses acteurs. Bien mis en scène et impressionnant de justesse, le casting de ce film est tout simplement incroyable. Juste et touchant comme à son habitude, Christian Bale nous sert une superbe performance, mais c’est un certain Casey Affleck qui signe ici sa plus belle interprétation. Bouleversant et impitoyable, il tient tête à un terrifiant Woody Harrelson qui retrouve ici son charisme de caïd. En lorgnant vers une tonalité plus sombre tel William Friedkin avec son très récent Killer Joe, Scott Cooper nous sert un drame poignant lorgnant dans sa finalité vers le thriller brutal et saisissant. Un véritable travail de maître que ce soit dans la réalisation ou dans l’écriture qui est tout simplement parfaite d’un bout à l’autre.