Le Crocodile du Botswanga [Critique]

Par Kevin Halgand @CineCinephile

"Leslie Konda, jeune footballeur français talentueux, repéré à son adolescence par Didier, un agent de faible envergure qui a su le prendre sous sa coupe, vient de signer son premier contrat d’attaquant dans un grand club espagnol. Dans le même temps, sa notoriété grandissante et ses origines du Botswanga, petit état pauvre d’Afrique centrale, lui valent une invitation par le Président de la République en personne : Bobo Babimbi, un passionné de football, fraîchement installé au pouvoir après un coup d’état militaire. Leslie se rend donc pour la première fois dans le pays de ses ancêtres accompagné par Didier pour être décoré par le Président Bobo qui s’avère rapidement, malgré ses grands discours humanistes, être un dictateur mégalomane et paranoïaque sous l’influence néfaste de son épouse. À peine ont-ils débarqué que Bobo conclut un deal crapuleux avec Didier : faire pression sur son joueur afin que celui-ci joue pour l’équipe nationale : les Crocodiles du Botswanga…"

Après en avoir surpris plus d’un en juillet 2011 avec la sortie du film Case Départ, le duo Fabrice Éboué/Thomas Ngijol récidive  avec une seconde collaboration nommée : Le Crocodile du Botswanga. Toujours dans la volonté de mettre en avant un problème social tout en s’en servant pour faire rire les spectateurs, les deux confrères s’offrent cette fois le luxe de se payer une politicomédie. À savoir une comédie sur fond de dénonciation politique. En effet, alors que Case Départ s’attardait sur les violences subites par les noirs durant la traite des esclaves et utilisait le thème de belle manière à des fins humoristiques malgré quelques longueurs et un ton trop dramatique par moment, Le Crocodile du Botswanga va plus loin en mettant en avant un système politique dictatorial. Le Crocodile du Botswanga est un film intéressant sur le papier, car une comédie qui ose utiliser un dictateur comme personnage principal afin de réussir à en dégager un potentiel comique n’est pas chose facile. Le système politique dictatorial n’est pas un système politique intéressant à dénoncer puisqu’il recense tout ce qui est néfaste à la démocratie. Ça n’a rien de drôle, mais celui qui ose mettre en place cette politique est au fond de lui un véritable comique, si on réussit à amplifier chaque caractéristique première d’un dictateur. C’est ce qu’ont décidé de faire Fabrice Éboué et Thomas Ngijol avec Bobo Babimbi, devenu Président de la République du Botswanga à la suite d’un coup d’état.

C’est un personnage caricatural qui dispose de tous les traits de caractère d’un dictateur tel qu’on serait en droit de l’imaginer. Il est ordurier, égocentrique et imbu de sa personne, mais surtout derrière lui se cache une femme, car comme on dit derrière chaque grand homme se cache une femme. En amplifiant les caractéristiques de ce personnage et en jouant avec, les scénaristes arrivent à la rendre drôle, car ignorant et stupide. Le spectateur se moque gentiment de ce personnage, de ses mimiques et des réflexions qu’il peut avoir qui n’ont aucun sens. Bobo Babimbi va droit dans le mur en se mettant tout le monde à dos, mais il ne s’en rend pas compte. Il est ignorant et de ce fait drôle sans s’en rendre compte. C’est un personnage qui porte littéralement le film et la face humoristique du Crocodile du Botswanga. Écrit comme un spectacle comique, le film réussira à faire rire les amateurs des deux comiques présents en tête d’affiche, Fabrice Éboué et Thomas Ngijol. Ils possèdent un humour moqueur qui passe surtout par un accent très prononcé, mais ils n’ont pas un fond raciste. Loin d’être universel, ce type d’humour plaît ou ne plaît pas et le film va dans ce sens. Les différentes  blagues, jeux de mots, mimiques et situations humoristiques s’enchaînent avec intensité et nervosité grâce aux prestations de Thomas Ngijol et Fabrice Éboué qui interprètent leurs personnages comme ils jouent sur scène et emportent le public avec eux. Pour les spectateurs qui adhèrent à cet humour, le film s’écoulera instantanément et on prend du plaisir, mais à cause de défauts majeurs, le film peut paraître insupportable et inintéressant pour d’autres.

Malgré des dialogues bien écrits et surtout bien interprétés grâce aux belles prestations des deux principaux comédiens, le scénario de ce film est totalement bâclé et ne mène nulle part. C’est à coup de séquences téléphonées et de rebondissements prévisibles que s’enchaînent les scènes sans avoir véritablement de but. Le seul enjeu scénaristique réside dans le fait de mettre en avant les éléments qui peuvent permettre aux spectateurs de sourire ou de s’esclaffer. Il en est de même pour la réalisation et mise en scène signé Fabrice Éboué et Lionel Steketee qui ne souhaitent qu’une chose, amplifier le rire et bien mettre en avant les personnages et éléments comiques qui les entourent. On pensera notamment au chat présent dans la chambre où réside Didier ou encore aux crocodiles. C’est simple, mais les réalisateurs ne cherchent pas à nous épater, seulement à faire rire. Pour une comédie, c’est déjà une bonne chose. Le Crocodile du Botswanga est un film qui ne vole pas bien haut. Son scénario est réduit au plus simple appareil puisqu’il ne dispose d’aucun enjeu émotionnel dramatique au vu du contexte qui peut paraître sérieux, mais il dispose d’une force et pas la moindre : le talent comique de ses scénaristes. Le rire est présent tout au long du film grâce au duo comique Fabrice Éboué/Thomas Ngijol qui est excellent et nous font véritablement plaisir. Ils s’en donnent à cœur joie avec une bonne répartie, des intonations de voix qui portent le rire et un rythme qui ne faiblit à aucun moment. Les répliques sont drôles, le comique de situation se mélange parfaitement avec le comique de mot également utilisé dans le film et le tout est dynamique et nerveux. Le film est court, mais 1h20 à rire sans interruption vaut mieux que deux heures d’ennui.