[#1 Retour sur...] Moi, Michel G, Milliardaire, Maître du Monde

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“L’odyssée cynique et complexe (et fausse) d’un géant économique du nom de Michel Ganiant, de sa tentative de rachat de la compagnie de son pire ennemi, à sa vie de famille en passant par ses activités économiques illégales…”

Dans le paysage hollywoodien, il existe beaucoup de films qui témoignent de traders, de chefs d’entreprises cotées en bourse et de crise économique – Le Loup de Wall Street, Wall Street, Margin Call, The Company Men… – mais rares sont les films français qui réussissent à témoigner de la manière la plus terre-à-terre et la plus honnête qui soit des activités de nombreux individus actionnaires, avec l’envie de montrer au spectateur le mécanisme assez pervers des entreprises. Moi, Michel G., Milliardaire, Maître du Monde est une comédie satirique qui réussit à aborder ces thèmes d’une manière assez convaincante.

Le film est réalisé sous la forme d’un “mockumentary”, c’est-à-dire un faux documentaire relatant les “exploits” d’un individu ou groupe. Ici, le long-métrage raconte la folle aventure d’un milliardaire hautain, riche, fier de l’être, qui souhaite conquérir à sa façon un monde qu’il considère quasiment comme à sa merci. Il est filmé par Joseph Klein, réalisateur assez fermé politiquement, qui voit le mal uniquement chez les chefs d’entreprise, soucieux d’être rentables et vivants dans cette crise en lieu et place d’assurer de façon prospère l’économie de la population. Ce tandem est assez convaincant, emmené par un Laurent Lafitte toujours à l’aise dans ce que l’on lui propose comme rôle. Il joue son personnage assez nonchalant et borné avec une aisance assez stupéfiante. François-Xavier Demaison est lui souvent à la limite du caricatural en grand patron, mais n’empêche pas de développer un certain humour noir sur le monde bien dérangeant, notamment grâce à son passé dans la finance américaine. La qualité technique du film est indéniable, n’étant jamais hors sujet et respecte le cadre du documentaire engagé du début à la fin, sans jamais qu’on ait la sensation d’être dans un film “banal”.

Dans ce faux documentaire, le réalisateur Stéphane Kazandjian s’attelle sur les deux sujets qui préoccupent souvent les individus: comment un grand sur le marché travaille; et comment il vit. Une des deux parties exposées, celles sur le travail, est une merveille de cynisme. La fourberie des agents économiques est bien présente, et leurs actions sur le marché sont très bien expliquées par l’intermédiaire de séquences animées efficaces et plus que compréhensibles. Dans le rachat des parts de l’entreprise qu’il tente d’acquérir, le film ne se contente pas seulement de partager seulement le point de vue de Ganiant, il évoque également un bras de fer entre les deux parties en interviewant son ennemi, Jérôme Prévost; ainsi que les spectateurs de la scène, familiers aux deux grands patrons. Klein, lui, est un “spectateur actif”, il est celui qui écoute, mais qui reste quand même réticent aux idées des deux parties, instaurant une neutralité et un aspect finalement consternant quant aux avis de Ganiant ou Prévost. Dans cette valse des pantins, le spectateur reste intrigué de dérangé: qui tire les ficelles dans ce jeu du chat et de la souris? Et surtout, qui et le personnage le plus respectable? Dans les seconds rôles, on retrouve un Guy Bedos fidèle à lui-même en tant que mentor de Ganiant, imbu de sa personne et fier de la montée de son “fils spirituel”. Alain Doutey s’en sort bien et joue comme il faut Jérôme Prévost, la copie conforme de son ennemi, aussi vaniteux et cynique que le personnage principal. À noter une petite apparition en fin de film qui a son importance sur le dénouement final, aussi inattendu qu’intéressant.

La deuxième partie, celle sur la vie de Michel Ganiant, et par contre beaucoup plus décevante, car elle se repose malheureusement sur de la caricature pure et dure. L’enfer de l’économie étant balayé dans ces moments-là, la vie de famille dépeinte par Kazandjian est d’une facilité agaçante. La femme de Michel Ganiant, jouée par Laurence Arne, est un concentré de stéréotypes qui tapent sur le système. A-t-on le droit d’aimer quelqu’un de riche sans pour autant prêter attention uniquement à son porte-feuille? Selon le film, non. Dans la vraie vie, pas sûre que François-Henri Pinault et Salma Hayek soient de cet avis-là. Et c’est bien dommage d’être aussi fermé dans cette thématique. François-Xavier Demaison se perd dans son jeu lors de ces scènes, l’humour devient plus potache et lourd que fin, seul Laurent Lafitte tire son épingle du jeu là-dedans avec quelques remarques cyniques assez déconcertantes et qui peuvent faire sourire.

En clair, Moi, Michel G., Milliardaire, Maître du Monde est une comédie économique où le rire est souvent grinçant, emmené par un patron caricatural dans un monde de vautours. Bien que ce soit très bien écrit et mis en images dans la partie professionnelle du milliardaire, la partie “vie privée” patauge dans la semoule malgré de temps en temps quelques éclairs de génie signés Laurent Lafitte. Le film s’en sort tout de même de façon honorable dans cette comédie française depuis longtemps en berne. Le long-métrage est… ganiant.

Par @KingTangTang

3.5

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