Résumé : Emmet, un banal ouvrier, touche par mégarde un mystérieux objet et découvre qu’il est le maitre constructeur qui libérera le monde du joue de l’infâme Lord Business.
Nos parents nous ont tous mis entre les pattes une boite de Lego, soit pour avoir la paix un jour de forte pluie, soit pour faire la cuisine dans leur chambre à coucher (je n’ai d’ailleurs jamais compris, le batteur électrique n’a jamais été rangé dans l’armoire à papa). À l’époque, le but était moins de reproduire que de construire tout ce qui nous passait par la tête – les fiches de construction ne faisait d’ailleurs pas long feu. Aujourd’hui, les enfants se bornent à suivre scrupuleusement les instructions dictées par le manuel, docilité commandée insidieusement en arrière-plan par une figure d’autorité traumatisée par ses récents démêlés avec les meubles Ikea. Un comportement en parti imputable à ce rachat compulsif du géant hollandais des licences (Marvel, DC Comics, Les Simpson, Bob l‘Éponge, Indiana Jones, Le Seigneur Des Anneaux), qui impose aux jeunes constructeur une reconnaissance physique et politique de l’objet. Arrive alors Lego – La Grande Aventure, un long métrage d’animation qui n’est pas un réadaptation en format "brique" d’une célèbre franchise, mais une oeuvre de création pure. Le duo de réalisateurs, Phil Lord et Chris Miller, n’ont rien sacrifié à cette univers, et livrent une vision féérique, opulente, portée par une animation et des effets numériques qui donnent envie de remonter dans son grenier et réouvrir son coffre à jouet. Une esthétique sublime s’il en est. Ces deux cinéastes, également auteurs du scénario, intègrent des personnages originaux et des icônes connues (parmi lesquels on retrouve Batman, Superman, Lincoln, Mon Petit Poney), jouant ainsi ce double jeu, celle de la créativité garante, en sous main, d’une économie de marché basé sur la fidèle représentativité des figures populaires du grand et petit écran. C’est d’ailleurs, pour ainsi dire, le coeur du récit mené par Emmett, ce jeune ouvrier falot qui se retrouve, par le plus grand des hasards, le maitre constructeur d’une prophétie énoncée par un vieux mage aveugle. Son aventure, d’une cité urbaine "automatisé" et dirigé par un président omnipotent (la très brève mais juste référence à la monosémie de l’écriture des manuels d’histoire) au royaume des nuages sans règle mais déconnecté du réel, lui permet de mesurer l’écart entre le perfectionnisme dicté et la création auto-dictée, et de trouver son juste milieu entre ces deux tendances. Le message ne sera sans doute pas admis par le jeune public, qui retiendra plus volontiers celui du dépassement de soi, mais il prouve le caractère intergénérationnel de l’entreprise. Séduisant, drôle, spectaculaire, doté d’un casting vocal au petit oignon, et surtout intelligent, notamment via ce dernier acte qui s’offre une mise en abîme inattendue avec notre monde, Lego – La Grande Aventure est finalement loin de l’objet cul-cul et mielleux vendu par la bande-annonce. Quand bien même toutes les pièces ne s’emboitent pas parfaitement – en cause, une deuxième partie plus poussive – ce long métrage est une belle surprise. (3.5/5)
Lego – The Movie (États-Unis, 2014). Durée : 1h40. Réalisation : Phil Lord, Chris Miller. Scénario : Phil Lord, Chris Miller. Image : Pablo Plaisted. Montage : David Burrows. Musique : Mark Mothersbaugh. Distribution Vocale (VO) : Chris Pratt (Emmet), Will Ferrell (Lord Business/ L’homme d’en haut), Elizabeth Banks (Cool-Tag), Morgan Freeman (Vitruvius), Liam Neeson (Le gentil flic et le méchant flic). Distribution Vocale (VF) : Arnaud Ducret (Emmet), Tal (Cool-Tag).