Résumé : Victime d’une tentative d’assassinat, l’inspecteur Alex Murphy, gravement blessé, est utilisé par la société OCP pour développer un nouveau prototype de robot.
Plus on avance dans le temps, plus on prend conscience que le cinéma américain n’a plus rien dans le citron. "Ars Gratia Artis" (L’art est la récompense de l’art) déclare, en ouverture, le célèbre logo de la Metro-Goldwyn-Mayer, dont le rugissement du Léo se voit moqué par les gloussements d’un Samuel L. Jackson à l’aube d’une retransmission d’une pacification militaire moyen-orientale. Pas sûr que le septième art ait mérité une telle récompense. En soit, cette nouvelle version réalisée par José Padilha (Troupe D’Élite 1 & 2) n’est pas mauvaise. Elle fait ce pour quoi elle est programmée. Formater. Déconstruire pour mieux recréer. Drainer les souvenirs pour en insérer de nouveau. RoboCop est ainsi une oeuvre de son temps, de par sa nature de remake, mais aussi par le regard posé sur sa diégèse, légèrement différente de celle, jadis, dessinée par Paul Verhoeven, Edward Neumeier et Michael Miner. Le corps d’Alex Murphy se transforme en une image publicitaire, une arme accueillante au sein de laquelle s’oppose la mécanique humaine et la chimie cérébrale. Mais pour accepter le corps étranger et recouvrir ses talents (l’exemple du joueur de guitare), il doit rejeter ses émotions, se purger de toute passion. Le film pose ainsi la question de l’harmonie et des compromis – sociales et biochimiques – entre la technologie et l’être humain à une époque charnière de l’automatisation et de l’humanisation (on parlera ici d’humanisation automatique par l’absorption électronique du libre arbitre). Le récit parvient à donner du crédit à cette vision lorsque celui-ci est piloté par le docteur Dennett Norton (Gary Oldman, seul acteur réellement investit dans son rôle) et qu’il s’épanche sur la phase de reprogrammation mentale du héros. Ce remake regorge ainsi d’idées passionnantes – spectacle de la médiatisation, marketing scientifique – mais tout cela est si mal articulé qu’elle restent à l’état embryonnaire. Car RoboCop est le film de la rupture. Dans cette démarche de rompre les liens avec le film original, le scénariste a choisi de démanteler l’histoire originale afin de créer des blocs d’intrigue. En plus de complexifier inutilement le script, cette narration vagabonde n’offre aucun point d’encrage dramatique. Est-ce un vigilant movie ? Un drame ? Une satire ? Le film se refuse ainsi un ton qui ne facilite pas les affaires des acteurs, en total roue libre, et l‘ensemble est ainsi fait dans le refus d’un esprit de corps. Au moins, le cinéaste brésilien aurait t-il pu se rattraper sur l’action. Mais même là, il ne fait que remplir bassement un cahier des charges sans doute trop contraignant pour lui. Un désordre finalement révélateur de l’ambiance délétère dans laquelle a été mené la production de ce qui restera comme une pale copie de l’oeuvre originale. "La violence du premier RoboCop était totalement en phase avec le ton du cinéma de Paul Verhoeven. Notre film porte en lui le ton de José Padilha, qui est un réalisateur complètement différent." a récemment déclaré le sinistre nouvel interprète du flic androïde. Il est clair que Padilah n’est pas Verhoeven, pas plus que Kinnaman n’est Weller. Mais cela ne les dispensait pas à réaliser un bon film. (2/5)
RoboCop (États-Unis, 2014). Durée : 1h57. Réalisation : José Padilha. Scénario : Joshua Zetumer. Image : Lula Carvalho. Montage : Peter McNulty, Daniel Rezende. Musique : Pedro Bromfman. Distribution : Joel Kinnaman (Alex Murphy/RoboCop), Michael Keaton (Raymond Sellars), Gary Oldman (le docteur Dennett Norton), Abbie Cornish (Ellen Murphy), Jackie Earle Haley (Mattox), Michael K. Williams (l’inspecteur Jack Lewis).