Critique B.O. : Pompeii

Pompeii

Des cendres d’un spectacle carbonisé jusqu’à l’os, émerge la musique composé par Clinton Shorter. Sans prendre la forme d’un somptueux phénix, elle est se révèle atrocement ravissante à côté d’un long métrage que le compte parmi les oeuvres les plus idiotes de ce début d’année cinématographique.

L’an passé, le compositeur canadien Clinton Shorter avait fait beaucoup parlé de lui grâce à sa partition pour le drame sportif Jappeloup, réalisé par son compatriote Christian Duguay. Toujours circonscrit aux films d’action (District 9, Contraband, et plus récemment le funky 2 Guns), il avait trouvé, par le prisme de cette grosse production hexagonale, le moyen de dévoiler une facette moins évidente et plus inattendue de son talent. On piétinait alors d’impatience de pouvoir poser l’oreille sur Pompeii, la fresque à grand spectacle de Paul W.S. Anderson dont il s’est proposé d’arranger la bande-son. La baguette à la main, Shorter nous livre ici un score propre, sans doute l’un des plus soignés composé ces dernières années pour une grosse production rome-antique. Il ne fait certes pas l’impasse sur le conformisme mélodique, ni sur le chapelet de topos disséminées le long de la piste d’écoute (les choeurs plaintifs latins, un lieu commun depuis le succès de Gladiator), encore moins sur les occurrences sonores liées au genre (notamment le thème principal, Home, semblable à celui composé par Klaus Badelt pour le Poseidon de Wolfgang Petersen) mais, à l’inverse de certaines critiques professionnelles fort médisantes à son égard, il serait cruel de sceller le destin de cette bande originale sur ces seuls critères. En effet, rares aujourd’hui sont les blockbusters dotés d’une musique symphonique de cette envergure sans qu’elle ne soit parasitée par des drones et infrabasses numériques. Clinton Shorter aurait pourtant très bien pu se contenter de suivre le mouvement imprimé par Tyler Bates, principal instigateur de cette mode de l’anachronisme instrumental dans le cinéma historique depuis son dégoulinant 300. Paul W.S. Anderson souhaitait, par ailleurs, un score majoritairement constitué de sons électroniques. La maquette a finalement suffit pour imposer, auprès du réalisateur, cette vision, permettant au compositeur de construire son écriture autour d’une direction orchestrale. Nerveuses et soutenues par de nobles envolées lyriques, rendues grâce à une belle maitrise des cuivres, les respirations de ce Pompeii est conforme à l’idée que l’on se figurerait d’une partition pour peplum poudrée, en sus, par quelques pincées de cithare afin de détourer brièvement l’effervescence de la cité méditerranéen. Quant aux déchainements guerriers, repliés sur la seconde partie de l’album, ils sont convaincantes mais insuffisamment incarnés pour marquer de leurs empreintes notre mémoire – ce qui est moins le cas de la superbe ballade tragi-romantique I Won’t Leave You qui clôture l’écoute. Au final, sans être véritablement magique, le voyage se révèle être très agréable, même si l’on reste déçu de voir autant d’énergie être au service d’un aussi pitoyable spectacle cinématographique. (3.5/5)

Sortie (Album) : 17/02/2014. Sortie Film (France) : 19/02/2014. Édition : Milan Records. Format : CD. Composition : Clinton Shorter. Durée : 44:42

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