Critique : Monuments Men (2014)

Par Nicolas Szafranski @PoingCritique

Résumé : À la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le professeur Frank Strokes mobilise une équipe composée de spécialistes en art afin de protéger les oeuvres de la destruction et restituer celles volées par les forces allemandes.

Le cinéma de George Clooney ne carbure pas à la caféine mais à l’humanisme. Après avoir mis un terme à une possible carrière politique en démontrant son inadaptation au milieu avec le solide Les Marches Du Pouvoirs, il devient émissaire du patrimoine de l’humanité en portant à l’écran le roman biographique éponyme de Robert Edsel. Monuments Men transpire de ce militantisme et de cette foi en l’humain qui motive l’homme à organiser, hors plateau, des galas de charité à destination des oubliés, et à incarner la parole des madones et des enfants du monde. George Clooney est ainsi un passeur, un messager qui profite de son statut d’artiste populaire pour mener à bien des combats qui lui tienne à cœur, et à protéger de l’humanité ce qui peut l’être par la seul force de son dévouement. C’est ainsi qu’il est tombé sur ce nouveau récit dont l’ambition – aborder la Seconde Guerre Mondial sous l’angle de ce bataillon de diplômés en art chargé de recouvrir les oeuvres victimes du pillage des forces nazis – et les considérations philosophiques – la nécessité de la trace pour croire au passé – semblaient passionnantes et entrait en résonance avec ses positions politiques. Mais, de ces belles promesses, le cinéaste préfère en tirer un simple un hommage au cinéma de la grand époque qui avance d’abord péniblement, handicapée par une narration en mosaïque prompt à saboter l’investissement du spectateur - on y suit la progression de trois binômes sur le front en parallèle à la négociation d’un envoyé spécial auprès de l’ex-secrétaire d’un conservateur allemand. La première moitié est ainsi composée d’une succession de vignettes, nourries d’un suspens relativement terne (exception faite d’une poignée de face à face bien huilée) et de banalités sur la guerre, dont le cinéaste profite pour égratigner l’image des armées alliées et révéler l’ampleur de l’appétit (et de la folie, avec le fameux ordre Neron, qui prévoyait, notamment, la destruction totale des oeuvres d’art détenues par le IIIème Reich) d’Adolphe Hitler. Au-delà ces petites apartés, l’aventure, trop scolaire, ne nous propose pas grand chose à se mettre sous la dent, si ce n’est des hésitations de styles et de formes assez effrayantes pour une production démagogique de cette envergure médiatique. Heureusement, la seconde partie, enfin resserrée autour d’une seule unité de personnage, engage l’histoire sur une ligne narrative moins accidentée, plus pêchue, qui redonne des couleurs au spectacle. Présenté comme cela, à chaud, le constat global semble donc très amer. Mais une fois sortie de la salle de projection, on garde en tête un film attachant, porté par un charmant casting, un magnifique score signé Alexandre Desplat, et ponctué par de jolies moments d’émotion (la disparition très réussit de deux personnages secondaires, l’émouvante séquence musicale dans le camp américain). La sincérité de la démarche et l’optimisme dans lequel baigne l’ensemble du long métrage l’emporte finalement de peu devant ce qui restera tout de même qu’une oeuvre anecdotique. (2.5/5)

The Monuments Men (États-Unis, 2014). Durée : 1h58. Réalisation : George Clooney. Scénario : George Clooney, Grant Heslov. Image : Phedon Papamichael. Montage : Stephen Mirrione. Musique : Alexandre Desplat. Distribution : George Clooney (Frank Strokes), Matt Damon (James Granger), Bill Murray (Richard Campbell), John Goodman (Walter Garfield), Jean Dujardin (Jean-Claude Clermont), Bob Balaban (Preston Savitz), Hugh Bonneville (Donald Jeffries), Cate Blanchett (Claire Simone).