Critique B.O. : The Monuments Men

The Monuments Men

Monument de démagogie, la dernière pellicule de George Clooney ne fera pas partie de ce patrimoine pour lequel on donnerait volontier sa vie. Par contre, sa musique…

Parrain spirituel d’un savoir faire semblable à celui du cinéma de l’âge d’or américain, George Clooney désirait obtenir une partition "à l’ancienne" pour The Monuments Men. Justement, il possède, dans son carnet d’adresse, un compositeur dont les spécificités stylistiques correspondent en tout point avec cette vision que certains considèrent comme hyper-classique et passéiste. Alexandre Desplat avait déjà collaboré, de près (The Ides Of March) et de loin (Argo et Syriana, deux films financés par sa société de production) avec Mister Nespresso. Un artiste loin d’être de la revue. À ce titre, précisons qu’il prêta son talent à pas moins de sept long métrage l’an dernier. Ainsi, deux coups de fils et une proposition de caméo plus tard, le compositeur français débarque au studio Abbey Road de Londres afin d’enregistrer ce nouveau score. Rarement aura t-on reproché à une production cinématographique d’avoir écrit la musique derrière les images. Mais, face au petit précis d’histoire rédigé par George Clooney, on a le sentiment que cette bande-son n’a pas les images qu’elle méritait d’illustrer. Voluptueuse, élégante et racée. Desplat a mis les petits plats dans les grands afin de donner l’ampleur nécessaire à son ouvrage. Dès la piste d’ouverture, The Roosvelt Mission, il souffle sur cette composition un vent de bravoure propre aux grandes peintures historiques produites par l’ancien Hollywood. Cet effet "madeleine de Proust" tient essentiellement à l’écriture de la trompette. À travers ses émouvantes vibrations, le compositeur cite The Great Escape d’Elmer Bernstein, Spartacus d’Alex North, ainsi que feu Maurice Murphy, maître trompettiste de génie à qui Indiana Jones, Star Wars et Superman doivent sa présence au générique. Il convoque ainsi, pour notre plus grand plaisir, les fantômes d’un passé musical pas si lointain (Medal Of Honor de Michael Giacchino et Saving Private Ryan de John Williams datent de la fin des 90′) par une succession de perles (Normandy, I See You Stahl, The Letter, Finale) aux côtés desquels s’enchâssent d’autres beaucoup plus frivoles (le sautillant Opening Titles, les textures de boites à musique du tendre Champagne), évoquant, en sus, ce comique troupier que n’aurait sans doute pas renier le Jerry Fielding de Stalag 13 (Papa Schultz pour les francophones). Ceci dit, l’efficacité de ce score est loin de se réduire à la seule illustration du contexte de seconde guerre mondiale. En effet, à l’image du film, sa bande-son multiplie couleurs et formes : de l’aventure avec Ghent Altarpiece, de la valse avec Stahl’s Chalet, de la romance viennoise avec le magnifique Claire & Granger, et un émouvant a cappella signé Nora Sagal afin de clôturer sereinement l’écoute. The Monuments Men signe ainsi le grand retour de la musique symphonique au cinéma et démontre tout le savoir faire de cet impressionnant mélodiste qu’est Alexandre Desplat. Merci ! (5/5)

Sortie (Album) : 04/02/2014. Sortie Film (France) : 12/03/2014. Édition : Sony Music. Format : CD. Compositeur : Alexandre Desplat. Durée : 60:32.

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