Résumé : Kai, un guerrier de sang mêlé, va aider les samouraïs de son ancien maitre à se venger.
47 Ronin fait partie de ces films maudits que l’on croise désormais régulièrement dans nos obscures salles de cinéma. Friction artistique entre le réalisateur et les producteurs, script sans cesse réécrit, un calendrier de tournage sans cesse modifié et deux scores rejetées pour voir finalement sa sortie repoussée d’une année et essuyer un cuisant échec au box-office américain. Un cas d’école qui ne semble pour le moment pas engager les pontes des studios à remettre en question leurs méthodes de productions. Ils ont ainsi saboté un film qui, sur le papier, semblait avoir tous les atouts en mains pour devenir un bon divertissement.
Il y a ainsi de bonnes idées dans cette appropriation occidentale d’une légende japonaise, celle de ces ronin qui ont sacrifié leur vie en connaissance de cause afin de venger l’assassinat de leur daimyo, Naganori Asano. Un acte de bravoure qui est entré dans les manuels d’histoire comme le symbole des valeurs que tous citoyens japonais se doit d’honorer au quotidien, au point d’ailleurs d’avoir institué une journée de commémoration en l’honneur de ces samouraïs. Il s’agissait donc de traiter ce mythe avec toute la déférence qu’elle méritait d’obtenir du cinéma à grand spectacle, et à ce titre, le réalisateur, Carl Insch, ainsi que ses deux co-scénaristes, Chris Morgan et Hossein Amini, semblent avoir eu beaucoup de plaisir à piocher dans l’héritage culturel immensément riche de cette nation. Sans trop trahir sa mémoire, ils lui donne une présence étincelante à l’image par les magnifiques costumes conçues par Penny Rose ainsi que par le soin apporté à la reconstitution architecturale de cette période.
L’enthousiasme de la mise en scène lorsque celle-ci se doit d’incarner les uses et coutumes du Japon féodal (le profane en tirera sans doute de précieux enseignements) n’a alors d’égale que la maladresse avec laquelle elle s’emploie à mettre en boite son esthétique héroic-fantasy, une identité qui n’est aucunement de leur fait mais bien celui des producteurs. De belles images accompagnées, pour l’occasion, par la charmante bande-son signée Ilan Eshkeri, qui fait preuve d’une belle énergie dans l’action comme dans l’émotion. Bien que le dépaysement s’opère assez tôt dans l’aventure, on reste finalement en dehors du récit, jamais véritablement impliqué dans les ambitieux enjeux dramatiques dépliés sous nos yeux. Cet héros apatride, interprété par un acteur lui-même issue de plusieurs racines (Keanu Reeves, particulièrement inexpressif), créé de toute pièce par les scénaristes afin de rapprocher le spectateur de ce monde exotique, peine à accrocher l’attention du spectateur, à l’image de son partenaire, campé par le monolithique Hiroyuki Sanada. Mais, outre la vaste blague que constitue sa conversion au format 3D (qui, rappelons-le, était l’un des prétextes invoqués par les producteurs concernant les nombreux reports de sortie), le défaut majeur de cette production reste sa longueur. Le film met jamais à profit le temps dont il dispose afin de développer les personnages, et il aurait sans doute été plus judicieux de resserrer le montage afin d’obtenir un rendu plus efficace. Ainsi, 47 Ronin, sans être terriblement mauvais, reste un sympathique divertissement loin d’être à la hauteur de l’histoire qu’elle prétend raconter. (2.5/5)
47 Ronin (États-Unis, 2013). Durée : 1h59. Réalisation : Carl Erik Rinsch. Scénario : Chris Morgan, Hossein Amini. Image : John Mathieson. Montage : Stuart Baird. Musique : Ilan Eshkeri. Distribution : Keanu Reeves (Kai), Hiroyuki Sanada (Ôishi), Tadanobu Asano (le daimyo Yoshinaka Kira), Ko Shibasaki (Mika Asano), Rinko Kikuchi (la sorcière), Min Tanaka (le daimyo Naganori Asano).