Atom Egoyan a de la suite dans les idées. Dans The Devil’s knot, il s’intéressait à une sordide affaire de viols et de meurtres d’enfants. Captives, son nouveau long-métrage, nous entraîne dans une histoire d’enlèvement d’enfants et de réseau pédophile.
La narration, volontairement parcellaire et désordonnée, comme les pièces d’un puzzle, tourne autour de l’enlèvement d’une fillette de dix ans. Son père l’a quittée des yeux à peine cinq minutes, le temps d’acheter des pâtisseries pour le dîner, et cela a suffi à son ravisseur (Kevin Durant) pour agir. Huit ans après, les policiers ne l’ont pas retrouvée. Mais de nouvelles pistes émergent, impliquant un important réseau pédophile, qui utilise désormais la disparue pour piéger d’autres enfants sur internet. En parallèle, on comprend que l’inspectrice chargée de l’enquête a elle-même disparu mystérieusement et que son collègue essaie de retrouver sa trace.
Hormis cette structure à la temporalité mouvante, Captives ressemble à un thriller assez conventionnel, dans l’esprit d’autres productions sorties au cours des derniers mois, comme le Prisonniers de Denis Villeneuve. Trop classique, sans doute, pour certains… Mais, comme souvent chez Egoyan, il faut savoir lire entre les lignes.
A travers cette intrigue, le cinéaste canadien continue d’explorer les zones les plus sombres de l’âme humaine, ajoutant à la perversité des ravisseurs une cruauté mentale édifiante, tout en questionnant notre propre rapport à la violence, notre voyeurisme face à ces actes sordides.
Il continue également de développer sa thématique sur le côté trompeur des apparences, faisant du kidnappeur un type tout à fait insoupçonnable, bien sous tous rapports, et du père de la jeune victime un coupable tout trouvé. Pas parce que ses déclarations sont incohérentes ou que son comportement est étrange, non. Juste parce que les policiers ont vécu trop de situations choquantes, éprouvé trop de perversité et de cruauté envers les enfants pour avoir les idées claires.
L’ensemble est très correctement exécuté, avec une interprétation solide de Ryan Reynolds, Mireille Enos, Rosario Dawson et Kevin Durant, une mise en scène élégante et un montage intelligent.
Hélas, le cinéaste se tire une balle dans le pied en ratant complètement son dénouement, trop lourdement démonstratif. Il aurait gagné à laisser sa fin plus ouverte, ou plus pessimiste, plutôt que de se vautrer in fine dans les effets de style hollywoodiens qu’il a cherché à éviter tout au long de son récit – emphase mélodramatique, musique pompière, et narration ultra-classique et prévisible…
Dommage…