Cristeros [Critique]

Par Kevin Halgand @CineCinephile

"En 1926, un soulèvement populaire secoue le Mexique suite aux lois du président Callès, qui interdisent toutes pratiques religieuses dans l’ensemble du pays. Des hommes et des femmes de tous horizons, les Cristeros, vont alors risquer leur vie pour défendre leur liberté et lutter contre les persécutions menées par le gouvernement. Une des pages les plus sombres de l’Histoire du Mexique."

Sorti dans l’ombre des nombreuses sorties cinéma du 14 mai dont Godzilla et Grace de Monaco, sans oublier le Festival de Cannes qui bat on plein depuis quelques jours, Cristeros est un film que vous pouvez retrouver dans quelques salles de cinéma, mais il ne devrait pas y resté bien longtemps. Aucune promotion, c’est limite si on ne nous a pas caché la sortie du film alors qu’on retrouve en haut de l’affiche des noms prestigieux comme Andy Garcia, Oscar Isaac ou même Peter O’Toole dans l’un de ses derniers rôles. Pourquoi aucun des distributeurs français existants n’a souhaité mettre ce film à la disposition des spectateurs dans leurs salles de cinéma, il est si mauvais que cela ? Il faut dire que si le film n’a jamais fait parler de lui, ce n’est pas une bonne chose, puisqu’il paraît chez nous deux ans après ses sorties Mexicaine et Américaine (20 avril 2012 et 1 juin 2012). Fort heureusement, de plus petits distributeurs existent et c’est ici Saje Distribution – dont l’activité est naissante puisque Cristeros est le premier film dont ils s’occupent – qui c’est occupé de la distribution du film et grâce à eux nous pouvons enfin savoir de quoi retourne le film.

Aussi connu sous le nom For Greater Glory : The True Story of Cristiada, Cristeros est un drame qui utilise les codes du western afin d’offrir aux spectateurs une fresque de 2h30 relatant la courageuse rébellion d’un groupuscule de chrétien dont le gouvernement -présidé par un anti-catholique Callès – a retiré le droit à la liberté religieuse. Au-delà du propos initial qui est de permettre à chacun de pratiquer la religion qu’il souhaite, ce film traite avant tout d’un sujet beaucoup plus important qui est la liberté. Alors que le film se déroule au Mexique entre 1926 et 1929, le propos et la morale politico-humaine qui se dégage du scénario de ce film peuvent se voir appliqués à notre vie de personnes vivant en 2014. De nos jours, nous nous croyons libres, mais ce n’est pas le cas. La liberté existe, mais la liberté à ses contraintes et ses limites. Limites que ne voit pas l’homme puisqu’il ne vit pas en marge, mais intégrées à une société. Au Mexique en 1926, il était également question d’un problème sociétal, puisqu’on empêchait les chrétiens de pratiquer leur religion. Ce qui est frappant dans la première partie de ce film, c’est la façon dont est traité le thème de la religion afin que puissent être happés par le film à la fois ceux qui possèdent des croyances religieuses, mais pas seulement. Chacun peut se retrouver dans ce film grâce au personnage principal : le général Enrique Gorostieta interprété par Andy Garcia, qui ne possède ni croyance religieuse, ni foi, mais qui a ses propres règles et n’aime pas que la vie de certains soient régies par des personnes qui se croient supérieur, mais également à un personnage secondaire, interprété par Oscar Isaac et qui se nomme Victoriano Ramirez. Usant les codes du western, c’est au travers des personnages que nous allons retrouver les personnages stéréotypés du genre, à savoir le bon, la brute et le truand. Chacun à sa place, Enrique Gorostieta (le général) et Victoriano Ramirez (le cow-boy sans pitié) vont devoir s’allier afin de faire face aux idées folles du président Callès.

Très intéressant dans sa première partie, le film perd nettement en qualité dans sa seconde partie, à cause d’un parti pris radical, qui est celui de la mise en abime du non-croyant face à la mise en valeur des bien fais de la religion et de la croyance envers le Christ. Il est dommage de voir le propos religieux prendre de l’ampleur – dialogues naïfs, le symbole du martyr qui renvoie l’image de Jésus et sa croix… – au détriment du propos universel sur la liberté. Néanmoins, Cristeros reste un film bien écrit, dont le scénario se permet de proposer au spectateur une vue complète du conflit – vision extérieure grâce à l’ambassadeur américain et affrontement intérieur entre les cristeros et le gouvernement mexicain -, tout en offrant des scènes de bataille dynamiques et bien mises en scène. Jamais spectaculaire, visuellement beau grâce à des panoramas extérieurs fabuleux sans être flamboyant pour autant à cause d’une réalisation directive et centralisée sur les personnages qui ne sortent jamais du centre du cadre. Pour une première réalisation, Dean Wright réussi à mettre sa caméra au service du récit, mais manque de panache, de confiance et peut-être de liberté – film de commande relatant d’une histoire vraie, donc obligation de resté proche de la réalité – pour offrir à ce film la réalisation lui permettant de devenir autre chose qu’un simple bon film. Par ailleurs, certaines scènes sont superbes grâce à une belle gestion de l’espace de par une mise en scène bien étudiée, même si trop caricaturale par instant. Un film qui enchante dans un premier temps, mais qui déroute dans un second à cause d’une morale religieuse trop appuyée et d’un manque d’audace permettant de le démarquer de la concurrence.