Au Fil d’Ariane [Critique]

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"C’est le jour de son anniversaire et Ariane est plus seule que jamais dans sa jolie maison.
Les bougies sont allumées sur le gâteau. Mais les invités se sont excusés… Ils ne viendront pas.
Alors elle prend sa jolie voiture et quitte sa jolie banlieue pour se perdre dans la grande ville…"

Avec 18 réalisations au compteur, Robert Guédiguian aurait pu décider de faire un break de quelques années. De faire une pause pour mieux revenir. Revenir avec de nouveaux thèmes à explorer afin d’éviter de sombrer dans l’excès et de rendre sa filmographie redondante. N’écoutant que ces envies de cinéaste passionné, Robert Guédiguian revient une nouvelle fois sur nos écrans de cinéma français avec un nouveau long-métrage. Deux ans après le très bon, Les Neiges du Kilimandjaro, qui lui-même était paru deux ans après l’Armée du Crime, qui lui-même était paru deux ans après Lady Jane et on pourrait remonter jusqu’en 1993 comme cela, même si par moment il réalisait jusqu’à un film par année, voici que débarque Au Fil d’Ariane. Distribué en toute discrétion par Diaphana Distribution, Au Fil d’Ariane se profile comme la déclaration d’amour d’un réalisateur à sa comédienne fétiche. En plus de lui offrir pour la quinzième fois le rôle féminin principal, il va jusqu’à lui offrir un film dans son intégralité. Film utopique, où l’envie de rêver se mêle à la réalité, Au Fil d’Ariane est une cour de récréation pour des acteurs triés sur le volet par un metteur en scène qui souhaite tout simplement leur faire plaisir. Contrairement à Alain Resnais, qui avait offert à ses acteurs fétiches et à quelques nouvelles têtes, une pièce de théâtre sous forme d’hommage à travers laquelle ils pouvaient nous prouver leur talent véritable, tout en incarnant leur propre rôle (cf : Vous n’avez encore rien vu), Robert Guédiguian offre à ses acteurs fétiches et plus précisément à son actrice fétiche, un film dans lequel les seconds rôles incarnent des personnages qui sortent des sentiers battus au vu de leur filmographie respective et où le premier rôle endosse sa véritable identité. A noter que le film emprunte beaucoup au thème du théâtre avec notamment l’utilisation d’un "village" central (scène d’entrainement et/ou les liens se créés) avant d’entrer sur scène, ou encore les exagérations voulues dans les interprétations.

Abandonné par ses proches le jour de son anniversaire, Ariane décide  de prendre sa voiture et de ce laissé guidé où bon il lui semblera d’aller, afin de profiter de sa journée. Sorte de déclaration d’amour à la vie et à la volonté de chacun de réaliser ses rêves sans avoir à devoir attendre quiconque pour le faire, Au Fil d’Ariane est une fable mélancolique où l’amour de la vie passe nécessairement par l’amour des autres. C’est avec facilité, que l’on ressent durant le visionnage de ce long-métrage, où règne un utopisme permanent, que Robert Guédiguian a essayé de lui inculquer une joie de vivre, un bonheur factice. Contrairement à son précédent film, qui s’appuyait sur un problème sociétal afin de démontrer que le bonheur de vivre n’était pas forcément là où on était en droit de l’attendre, Au Fil d’Ariane fait (rarement) sourire grâce à des touches de surréalisme qui viennent s’imbriquer dans des situations rappelant la réalité. Cette dualité est intéressante à partir du moment où le réalisateur en tire une leçon/morale originale et en parfaite corrélation avec les différents thèmes étudiés dans le film. Malheureusement, ce n’est pas le cas avec cet énième long-métrage signé Robert Guédiguian qui nous fait du Robert Guédiguian avec trop de simplicité et avec un contenu beaucoup trop riche. Alors que le réalisateur français/arménien avait agréablement surpris son public avec Les Neiges du Kilimandjaro, film sociétal intéressant grâce à un traitement astucieux de l’humain et plus précisément d’une classe sociale bien précise, il déçoit avec Au Fil d’Ariane.

Précédé d’une série de long-métrage qui rabâchaient toujours le même message et usant jusqu’à la corde des thématiques similaires, Au Fil d’Ariane bénéficie néanmoins d’une idée intelligente qui aurait pu donner un réel un coup de sang dans la façon d’aborder encore une fois les mêmes thèmes (le bonheur de l’homme, la société, l’homme au travers sa société…). Traiter d’un sujet délicat comme la société ou d’un sujet brutal comme l’homme au travers d’un utopisme et d’une joie de vivre constante c’est une excellente idée, mais il faut en faire quelque chose. Sorte de Melting Pot de toutes les idées qui passent au travers de la tête du cinéaste depuis vingt années, le scénario du film Au Fil d’Ariane est brouillon et les idées ne s’enchaînent pas, elle se superposes les unes aux autres. Contrairement à la volonté du réalisateur, qui était de mettre en place plusieurs tableaux aux messages différents, mais tout en conservant un fil conducteur qui n’est autre qu’Ariane, le spectateur fait bel et bien face à des tableaux plus ou moins intéressants, mais  des tableaux qui s’enchaînent avec disgrâce (transitions difficilement compréhensibles et montage à la hache) et de façon incohérente. Les messages ne s’enchainent pas, au contraire, le nouveau tableau prend le pas sur le précédent…

Au Fil d’Ariane représente un escalier assez rude à monter pour les spectateurs, escalier où chaque marche représente un exploit que l’on est ravis d’avoir surpassé, mais qui ne sert à rien, mis à part un plaisir de quelques secondes, puisqu’une nouvelle marche nous fait face.Du haut de ses 1h40, Au Fil d’Ariane est interminable et on en sort lessivé. Il y a une bonne idée de départ, notamment pour les acteurs qui sont dans une cour de récréation et qui se vont plaisir tout en nous faisant plaisir, mais le film dans sa globalité ne dépasse pas ce stade de cours de récréation. De plus, on ajoutera une réalisation digne d’un épisode d’un téléfilm provenant de TF1 et une photographie inexistante. Robert Guédiguian a fait plaisir à ses acteurs fétiches, tant mieux pour eux, mais en tout cas, le spectateur ne passe pas un agréable moment, le film est tout simplement raté.

1.5/5

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