John Ottman en pleine mutation.
Autodidacte, John Ottman, monteur de formation, est un compositeur assez inégal, capable du meilleur (Usual Suspects, Jack The Giant Slayer, Kiss Kiss Bang Bang, Superman Returns) comme du pire (Invasion). Cependant, son travail sur X-Men 2, sans être particulièrement éblouissant, témoignait d’une certaine énergie, relayé par une orchestration de qualité. Nous partions ainsi sur de bonnes bases pour ce cinquième volet, qui devait signer le retour en fanfare du compositeur dans le registre du super-héroïsme. Malheureusement, le résultat n’est pas forcement à la hauteur de nos espérances. En effet, John Ottman, endossant pour l’occasion la casquette de monteur, semble avoir été absorbé tout entier par son travail de montage, excessivement lourd compte tenu des nombreux re-cut dont le film a fait l’objet durant la phase de post production. Une charge de travail relativement conséquente qui l’a conduit à confier les rennes de la composition à une poignée de collaborateurs, semblent-ils dévoués à l’école de pensée Remote Control – c’est du moins de cette manière qu’on peut s’expliquer l’abandon de l’écriture symphonique qui faisait tout le sel de ses partitions les plus mémorables pour le genre. Pourtant, à première vue, rien de déshonorant. Certains thèmes développés au sein de cet album font montre d’une belle efficacité, notamment grâce au geste avec lequel le compositeur parvient à incarner la mélancolie contenu dans ce nouveau récit. Pas de grosses fautes de goût, ni de lourdeurs à l’horizon. En fin de compte, une partition tout ce qu’il y a de plus conventionnel. Trop même. Car la familiarité de cette démonstration n’est aucunement le produit d’un arrangement propre et généreux, mais de motifs ordinaires dont le blockbuster américain se gargarise depuis dix ans (Les rifs de guitare de State Of Play sur Springing Erik, la nappe de claves de Contacting Raven tout droit sorti de la partition pour The Thin Red Line, maître étalon du cette nouvelle vague). Le score de ce X-Men – Days Of Future Past ne parvient pas ainsi à exister par lui-même, contraint de se plier à la charte sonore de la Marvel et du cinéma d’action américain afin d’acquérir une existence légitime aux oreilles des profanes. Ainsi, même l’élégant thème qu’Ottman composa jadis pour le second volet se retrouve noyé dans un ronron d’infrabasses et de nappes synthétiques (hormis lors du traditionnel End Titles). En découle une direction sonore globalement anti-héroïque résultant également d’une démarche cinématographique qui contraint le musicien de jouer la carte du thriller atmosphérique, une option qu’il avait déjà exploré quelques années plus tôt chez Bryan Singer, sur la tentative de modernisation du drame historique effectué sur Valkyrie (le réarrangement de March 13 Attempt pour le morceaux Hat Rescue). La cerise sur ce triste millefeuille : John Ottman bâcle ses pièces d’action (le difforme Saigon – Logan Arrives). Le score au sein du film a beau se révéler être un bon compagnon, en écoute seule, il ne faut que peu de temps pour se rendre compte du caractère dispensable de cette partition, constituant sans nul doute la branche la moins saine de la longue généalogie des X-Men. (2.5/5)
Sortie Album : 03/06/2014. Sortie Film (France) : 21/05/2014. Édition : Sony Classical. Format : CD. Compositeur : John Ottman. Durée : 76:18.