[#7 Retour sur] Young People Fucking

"Ils sont cinq. Cinq petits binômes prêts à passer une nuit de sexe endiablée. Mais tour à tour, et au fur et à mesure de l’avancée de l’acte, ces groupes deviennent plus proches ou plus détestables. Des préparatifs à l’afterglow en passant par le sexe, vous saurez tout de ces jeunes adultes qui passent à l’acte… car vous en devenez un spectateur."

Young People Fucking est l’un des objets filmiques au potentiel humoristique incroyable de par son pitch en or et son exposition remarquable de justesse et d’humour, mais qui creuse malheureusement dans les bas-fonds de la rom-com au fil des minutes, sombrant dans une avalanche de bons sentiments mal venus et d’une disparition malheureuse du côté comique dans de nombreux cas de figure.  Trop sage donc trop décevant, en somme.

Young People Fucking (vous avez compris, je l’appellerai YPF désormais) est le Direct-to-DVD labellisé "de luxe": malgré son casting assez inconnu aux yeux du peuple français – avouons-le -, Young People Fucking est sorti directement en DVD en 2008 après avoir été positivement remarqué au festival de Toronto l’année précédente. le film est-il tout le temps réussi lorsque son pitch est original et étonnant de simplicité? Parfois oui, mais hélas,  parfois non. Et YPF confirme la seconde catégorie.

Dans son petit jeu de la recherche du plaisir sexuel selon les différentes possibilités de sexe possible (le couple, l’ex-couple, l’amitié, le premier rencard, la colocation), le réalisateur-producteur-scénariste Martin Gero (aidé d’Aaron Abrams au scénario, à la production et devant la caméra) essaie de mettre au point dès l’introduction une sorte de système de discussions toutes aussi cocasses les unes que les autres (recherches du plaisir vaines, tentatives de séduction/repoussement, critique d’autrui ou de soi…). Il est vrai que cela peut finalement porter à la réussite, surtout lorsque Gero scinde son film en plusieurs parties représentant les chapitres durant l’acte sexuel – je ne vous fais pas un dessin là-dessus, vous verrez que le chapitrage des ébats prête au sourire tant il peut sembler véridique. Le film donc, il est vrai, commence très bien lorsqu’il parle d’une certaine frustration et d’un jeu de regards entre les personnages qui encouragent à… passer à l’acte. Dans sa scène d’exposition, Gero et Abrams captent une certaine détresse et une recherche de l’autre par le biais d’un échange de regards et d’un flot de paroles afin de parvenir à le comprendre, le tout avec une amertume qui encourage et lance le film d’une manière tout à fait remarquable. Mais chassez le naturel, il revient au galop…

En effet, les deux compères scénaristes essuient les échecs au niveau de l’histoire, car elle ne s’engage rarement dans les sentiers plus "hard", se limitant à un objet synthétique qui refuse d’aller dans l’obscénité visuelle. Cela annihile une quelconque envie d’être potache et de s’atteler à quelque chose de beaucoup plus absurde. L’humour disparait donc petit à petit au profit de la rom-com souvent niais et basique… De plus, les dialogues rejoignent, hormis quelques exceptions restant très drôles, un chemin empli de clichés et de conventions qui font plutôt tache dans un film qui voulait pousser le bouchon très loin, rien qu’à la vue de son titre. Gero et Abrams prennent également le soin d’extérioriser son récit et de faire entrer en piste par le biais des dialogues, de nouveaux personnages qui n’apparaissent pas à l’écran, afin de continuer vers le chemin de la bonne conscience et de ne plus beaucoup parler du sexe purement, durement, mais simplement. Pourquoi toujours prôner les bons sentiments et la saine attitude sexuelle alors que l’on pouvait tenter le contraire dans de nombreux cas?

Si le film tente de se reposer sur sa multiplication des discussions, le côté visuel, quant à lui, souffre d’un cruel aspect "cheap" qui ne cherche pas à être une référence. Pour faire simple: Gero cherche les couples – ou la personne qui prend du plaisir, et suit leurs corps vis-à-vis de ce qui gravite autour d’eux, que ce soit dans la pièce ou par rapport aux thèmes dont ils ont parlé précédemment. Toute cette histoire de "fantômes" ou de t"traumatismes" du passé sont bien chouette, mais le réalisateur utilise le même procédé filmique pour tout le monde. Ainsi, la pudeur et la peur restent des thèmes communs, mais ne sont pas sensées être ressenties de la même manière. Gero se cache derrière son film et ne cherche pas à lever le voile cachant l’extrême de la chose qui aurait été bienvenu. Le cadrage du film quant à lui est digne… d’un DTV. Il n’y a aucune recherche de profondeur montrant les corps qui s’éreintent mécaniquement. L’amour, les sentiments mielleux et le sentiment d’avoir fait un truc bien sage prennent de l’ampleur devant la caméra sans que l’on ne comprenne vraiment pourquoi, et Gero n’y va malheureusement pas avec le dos de la cuillère…

Les slow-motions sur la dulcinée, les coups d’un soir qui se métamorphosent en amour sans fin; tant de choses qui auraient mérité une autre directive… C’est très décevant. Côté décors, on peut dire qu’ils sont absolument tous identiques, ne permettant pas de forger une distinction entre les différents groupes d’une nuit… Cependant, on ne peut renier le montage propre du film, qui malgré une non-esthétisation de l’image (qui garde l’impression de naturel) propose une véritable cohérence, une fluidité et un parfait enchainement entre les différentes scènes, se terminant toutes sans un sentiment de manque dans les dialogues. Par chance, Martin Gero peut se reposer sur ses acteurs, puisqu’on ne peut pas dire qu’ils ne maîtrisent pas leurs personnages: ils parviennent à maintenir un certain équilibre entre leurs sentiments et leurs envies, sans que l’on ne s’aperçoive que nous sommes vraiment devant un jeu d’acteurs. Seul bémol pour les deux jouant les ex, qui ne parviennent pas à donner un quelconque relief à leurs états d’âme personnels. Mais malgré cette (légère) ébauche de points positifs, cela reste pauvre tant le degré d’absurdité ou de déjanté reste totalement en dedans de ce qu’on attendait… Un enchainement de coups d’épée dans l’eau.

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