Beaucoup d’auteurs en puissance hésitent à se lancer dans une carrière de scénariste tant ils savent qu’il est difficile de percer dans ce métier… et d’en vivre! Aussi essaient-ils d’évaluer combien ils peuvent espérer gagner la première, puis la seconde année, et puis ensuite…
Autant vous prévenir tout de suite, il est impossible de répondre précisément à cette question dans la mesure où nous sommes, en France, environ quatre à cinq cent professionnels en activité parmi lesquels il n’y a pas deux individus qui gagnent la même chose.
Ce qu’il vous faut bien comprendre, avant toute chose, c’est qu’un scénariste n’est pas salarié, ni intermittent du spectacle. Il a un statut d’auteur et il est payé quand il vend un texte. Point. S’il se déroule plusieurs mois entre deux engagements, il bien il ne touchera rien. C’est pour cette raison que nous travaillons toujours sur plusieurs projets de front.
Au cinéma par exemple, un scénario de long-métrage est payé 30 000 euros pour un jeune auteur, environ 50-60 000 euros pour un auteur confirmé et… il n’existe pas vraiment de limite supérieure. Tout dépend donc:
1. de la notoriété du scénariste
2. du budget du film
3. de savoir si le réalisateur a co-écrit le scénario auquel cas il empoche la moitié de la somme (c’est le cas neuf fois sur dix)
4. s’il y a d’autres co-auteurs auquel cas la somme est encore divisée
5. s’il s’agit d’une adaptation littéraire auquel cas l’auteur de l’oeuvre originale touchera éventuellement un pourcentage
Mais tout n’est pas encore aussi simple: le scénario est payé en plusieurs étapes (c’est ce qu’on appelle le step-deal): 10% à la signature (signature du contrat d’option), environ 30% à la remise de la première version du scénario, encore 30% à la remise d’une V2 ou 3 et le reste de la somme au premier jour de tournage. Si le développement du film est brutalement interrompu (ce qui arrive fréquemment), le scénariste ne touchera jamais les sommes restantes.
En télévision, les « tarifs » dépendent:
1. de la notoriété du scénariste
2. du format (la durée) de la fiction commandée (pour faire simple, plus c’est long plus c’est cher), voire du nombre d’épisodes
3. de la chaîne qui commande cette fiction
4. de l’horaire de diffusion
5. du nombre de co-auteurs éventuels
S’ajoutent à cela: les 10% prélevés par l’auteur de la Bible, le pourcentage éventuel du directeur de collection ou de l’auteur de l’oeuvre originale en cas d’adaptation.
Là encore, tout est payé en step-deal et peut s’interrompre en cours de développement. Nous avons tous des CV remplis de projets qui n’ont jamais vu le jour. Ca fait partie du jeu et permet, malgré tout, de gagner sa vie.
Autre source de revenu considérable: les droits de diffusion qui sont gérés soit par la SCAM soit par la SACD selon le type d’oeuvre. Mais là encore, tout dépend de la chaîne, de l’horaire et du nombre de diffusions et il faut ôter la part qui revient au réalisateur. Donc pour résumer, il est plus rentable d’écrire une série en prime time sur TF1 qu’une série de day-time sur une chaîne câblée.
Si on ajoute à cela, les 10% prélevés par les Agessa (la sécu des auteurs), les 10% prélevés par l’agent et la cotisation reversée à la Guilde Française des Scénaristes (qui est proportionnelle aux revenus) pour ceux d’entre nous qui en faisons partie, plus la somme reversée au Trésor Public, les retards de paiements, le scénariste gagne… et bien ça dépend complètement!
Je me contenterai d’ajouter que le scénariste à parfois du mal à joindre les deux bouts, qu’il jongle entre des projets à divers stades de développement, vit aussi d’options diverses et droits de rediffusions, que ses revenus, même quand il est « bankable », varient d’un mois à l’autre et sont très loin d’égaler ceux de son homologue américain, mais qu’on ne choisit pas ce type de carrières pour le pognon ou la sécurité de l’emploi.
Jeunes Padawans, ne perdez pas de vue que même si vous mettez un pied dans le métier, il vous faudra une dizaine d’années pour vraiment en vivre, prenez ce facteur en compte dès aujourd’hui et ne lâchez pas votre boulot alimentaire dès votre premier contrat signé…
J’ai répondu à d’autres questions pratiques dans la rubrique S.A.V. des lecteurs…
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