Critique : Les Vacances Du Petit Nicolas (2014)

Par Nicolas Szafranski @PoingCritique

Plage arrière toute !

Parce qu’elles nous tombent entre nos mains lors de notre passage en primaire, mais aussi parce qu’elles font l’objet d’une transmission générationnelle entre parents et enfants, les aventures du petit Nicolas immortalisent l’ivresse des jeunes années de milliers de français. "Je suis l’enfant de vos enfance, ou bien l’enfance de vos mémoire" clame d’ailleurs à juste titre le générique de la récente adaptation en série animée de ces courtes histoires qui mettent en scène autant de souvenirs que de fantasmes de gosse. Il y a cinq ans déjà, Laurent Tirard s’était atteler à extraire, non sans une certaine tendresse, la substantifique moelle des classes de l’écolier au tricot rouge. Après un séjour linguistique en Grande-Bretagne au cours duquel il a mis les talents d’Astérix et d’Obélix du même René Goscinny au service de sa Majesté, le réalisateur retourne du côté de la Douce France entonnée jadis par Charles Trenet afin d’illustrer les villégiatures de notre cher notre petite tête blonde crayonnée par Sempé. Coquillages et crustacés sont ainsi au rendez-vous de cette escale à l’hôtel Beau-Rivage, au sein duquel Nicolas sera ballottée par les moments d’égarement d’un papa qui rêve de voir sous les jupes des filles et d’une maman qui devient l’étoile filante d’un cinéaste italien érotomane, le tout mouillé par quelques péripéties épistolaires et une amourette incarnée par une inquiétante fillette échappée d’une toile de Keane. Plongeant les fantasmagories rétro de Wes Anderson dans le bain bouillonnant de références inattendues (Psychose et Shining pour ne citer que les plus évidents), Laurent Tirard imprime une carte postale versicolore et chaleureuse. Les bonnets de bain à fleurs et les trunks se dévoilent ainsi le long des plages sablonneuses de ce long métrage, participant, à l’image de centaines d’autres accessoires, à la parfaite reconstruction du rococo du "summer of the sixties". Esthétiquement accompli, ce second épisode ne cesse pourtant d’être cahoter par le courant d’une narration décousue. Souhaitant visiblement illustrer l’ensemble des péripéties estivales vécues par le jeune héros et ses parents, le scénario, reprenant la forme du recueil dont il adapte très librement le contenu, s’éparpille dans de trop nombreuses sous intrigues, nous offrant alors cette sensation de ne jamais parvenir à atteindre l’horizon de la grande histoire dont on désirait qu’il s’approche. À titre de comparaison, l’adaptation des vacances du célèbre bagnard des salles de cours (le fameux élève Ducobu) était parvenu à concilier grands axes et petits segments narratifs. Peu d’éclat de rire viendront également se briser sur les côtes de cette sage suite, mais au moins peut-on se réjouir de ce nouveau Nicolas, interprété par Mathéo Boisselier, dont les traits aimables s’avèrent plus conforme à ceux de son modèle littéraire qui attend, quant à lui, sagement, sur les bancs de l’école, la transposition cinématographique qu’il mérite. (2.5/5)

Les Vacances Du Petit Nicolas (France, 2014). Durée : 1h37. Réalisation : Laurent Tirard. Scénario : Laurent Tirard, Grégoire Vigneron. Image : Denis Rouden. Montage : Valérie Desseine. Musique : Eric Neveux. Distribution : Mathéo Boisselier (Nicolas), Valérie Lemercier (la maman de Nicolas), Kad Merad (le papa de Nicolas), Dominique Lavanant (Mémé), Bouli Lanners (M. Bernique), Judith Henry (Mme Bernique).