Premier weekend à Deauville 2014

Par Fredp @FredMyscreens

Le weekend dernier, le Festival du Film Américain de Deauville a inauguré sa 40e année et on y a fait un petit tour avec un bon début de compétition et déjà des premiers invités de marque.

Si Jessica Chastain et le nouveau film de Woody Allen ont ouvert les 40 ans du Festival, ce sont 4 films en compétition, 2 avant-première, 1 rétro et 1 rencontre qui ont occupé notre weekend. Ainsi, dès le samedi matin nous avons découvert l’étrange A Girl Walks Home Alone at Night, premier long métrage d’une jeune réalisatrice americano-iranienne. Dans un étrange mélange de modernité et de classicisme, elle importe le mythe du vampire dans un quotidien iranien lugubre et noir et blanc avec une grande économie de mots. La photo, la recherche de plan sont magnifiques mais on a tout de même du mal à entrer dans le film à cause de certaines longueurs et d’un propos assez obscur.

Le second film en compétition sera bien plus intéressant puisqu’il s’agit du 3e long-métrage du photographe Anton Corbijn qui, après Control et the American, plonge dans l’univers de John LeCarré (à qui l’on devait déjà La Taupe de Tomas Alfredson). Il s’agit donc avec Un Homme très Recherché (A most wanted man) d’un nouveau film d’espionnage dans le fond comme dans la forme plutôt classique qui prend le temps d’installer ses pièces sur l’échiquier pour que le spectateur se rende compte petit à petit des enjeux et des rôles de chaque personnage.Mené par une performance excellente de Philip Seymour Hoffman dans l’un de ses derniers rôles appuyé par une belle pléiade de stars (Rachel McAdams, Robin Wright, Willem Dafoe), le film nous entraîne petit à petit avec un suspense particulièrement efficace jusqu’à son dénouement parfaitement maîtrisé. Si le réalisateur ne fait pas preuve cette fois d’un sens aigu du cadre (contrairement à ses deux précédents), il se met au service de son histoire et cela fonctionne pleinement.

Le 3e film de la journée sera l’avant-première de the Disappearance of Eleanor Rigby : Them (car regroupant – et résumant – les 2 films sous-titrés Her et Him). Il s’agit d’un pur mélo avec Jessica Chastain et James McAvoy dans lequel les 2 personnages se sont séparés et qui présente alors alternativement le point de vue de l’un et l’autre sur cette histoire pour montrer des être perdus à cause de leur malheur commun, qui n’y réagissent pas de la même manière ni avec le même timing et qui peinent alors à se retrouver. Bien joué, avec souvent de belles scènes et d’autres plus convenues, il manque cependant une véritable étincelle qui aurait pu nous transporter et nous émouvoir complètement. Il ne reste alors malheureusement qu’un mélo touchant mais sans grande inventivité et pour lequel on se dit que les segments séparés et approfondis doivent être bien plus intéressants.

Si samedi soir Les Recettes du Bonheur était présenté en grande avant-première, on a préféré replonger dans un film moins mignon avec la rétrospective en hommage à John McTiernan. L’occasion de revoir le premier Die Hard, Piège de Cristal sur grand écran, ça ne se refuse pas et le plaisir est toujours intact, autant que le sens de l’action et de l’humour du film qui reste bien l’un des meilleurs films d’action réalisés !

Dimanche matin, le 3e film de la compétition s’annonce intéressant puis qu’après avoir fait une petite polémique en présentant We Are What We Are l’année dernière à un public scandalisé, le réalisateur Jim Mikle à qui l’on doit aussi Stake Land vient présenter son 4e long-métrage. Il change cette fois de registre en adaptant avec Juillet de Sang (Cold in July) un polar texan avec une ambiance profondément 80′s. L’intrigue débute par un cambriolage, passe par le film de vengeance en dérivant sur le snuff movie autant qu’il peut virer d’un instant à l’autre du premier au second degré. Un étrange numéro d’équilibriste pour le réalisateur et ses acteurs (Michael C Hall de Dexter en tête et Don Johnson) qui, malgré quelques défaut (passant totalement à côté de certaines intrigues pour partir sur d’autres à tout moment), arrive bien à créer une atmosphère prenante et violente avec un bon rythme.

Ce ne sera pas vraiment le cas du 4e film en compétition, Things People Do qui nous entraîne dans la déchéance d’un agent d’assurance qui va péter un plomb et s’éloigner de sa famille en commettant de mauvais actes après avoir été viré de son job. L’atmosphère est aussi aride que Breaking Bad mais jamais nous ne nous attachons au personnage antipathique joué par Wes Bentley qui reste en permanence à distance. Le film ne va nulle par avec un rythme lancinant qui traîne surtout en longueur ses multiples occasions de prendre fin. L’ennui est total malgré une belle photo et quelques séquences joliment filmées et montées. Dommage que ça raconte quelque chose d’inintéressant et que ça n’aille pas au bout de son propos.

Pour ce remettre de cet échec alors qu’on était partis sur une bonne lancée de bon film, on va alors se réfugier dans l’auditorium pour l’un des moments les plus attendus du weekend, la masterclass du roi du cinéma d’action des 80/90′s, j’ai nommé John McTiernan. Le réalisateur de Predator et Die Hard qui sort enfin de prison et à qui le Festival rend hommage était donc là pour parler de sa carrière et donner une petite leçon de cinéma avec quelques anecdotes de tournage sur Predator, sur sa manière de filmer Une Journée en Enfer ou l’introduction d’A la Poursuite d’Octobre Rouge avec extraits à l’appui. Si on est resté finalement assez en surface avec peu de grandes révélations (il a beaucoup été question, à juste titre, de sa gestion de l’espace et de sa mise en musique de l’action) et encore moins de propos polémiques (aucune référence faite au 13e Guerrier par exemple), le réalisateur s’est tout de même montré intéressant et faisait surtout ressentir son envie de faire d’autres films. Par contre on en voudra au modérateur Vincent Malausa de trop intellectualiser le cinéma de McT qui est le premier à refuser cela, ou encore à mettre plusieurs minutes pour finir une questions sans aucun sens. On veut bien qu’il soit impressionné par le monument du ciné d’action qu’il a devant lui mais il y a tout de même un minimum de professionnalisme et de préparation à avoir, ce qui a rendu cette masterclass intéressante mais aussi frustrante.

Malgré ces défauts, c’était donc un weekend d’ouverture particulièrement plaisant pour ce 40e festival avec déjà 2 film qui se démarquent particulièrement et une rencontre avec un monstre sacré. Vivement le weekend prochain pour le rattrapage des films de la semaine et la clôture !