Gone Girl, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Nouvelle adaptation pour David Fincher qui nous offre avec Gone Girl un thriller psychologique aux retournements de situation inattendus pour se transformer en diabolique jeu subversif sur l’échec du couple, la prépondérance des apparences et l’image des médias. Immanquable.

On doit le dire, au milieu d’une filmographie sans faux pas, David Fincher nous avait un peu déçu sur son adaptation de Millenium, le thriller, un exercice trop facile pour lui. Et c’est avec une nouvelle adaptation de best seller qu’il s’attaque au livre de Gillian Flynn, les Apparences, qui va d’ailleurs également en rédiger le diabolique scénario. Pourtant, comme dans de nombreux thrillers, le pitch est simple. A l’occasion de son cinquième anniversaire de mariage, Nick Dunne signale la disparition de sa femme, Amy. Mais très vite, devant de multiples révélation, on ne se pose plus qu’une seule question : a-t-il tué sa femme ?

Ainsi, le film débute sur une simple enquête, mai il évolue rapidement pour laisser la place à tout autre chose. Car l’histoire sera remplie de rebondissement, un véritable jeu psychologique orchestré de manière à ce qu’il soit quasiment impossible d’en deviner l’horrible issue et que nous éviterons donc de dévoiler un peu plus. Ce que l’on peut dire c’est que Fincher ne s’était sans doute jamais autant amusé avec une intrigue depuis la manipulation de the Game. Il convoque ici le meilleur du thriller (à savoir Hitchcock, DePalma, Lynch) pour nous intriguer pendant près de 2h30 sans temps mort.

Se situant presque exclusivement dans une résidence typique de banlieue américaine, le film va, au travers de flashbacks, jeux de pistes et de révélations, lever le voile sur l’idéal du couple américain et en dévoiler les scandaleux dessous. Car sous ses airs innocents, Nick Dunne n’est pas un mari irréprochable, tout comme les notes laissées par Amy sont peut-être trompeuses. A l’image d’un long épisode de Desperate Housewives transcendé par un Fincher qui n’a jamais été aussi maître du suspense et de l’humour noir, Gone Girl démoli petit à petit l’image que l’on pourrait se faire du couple américain idéal. Ici, les secrets et jeux de manipulation perverse craquellent aisément ce qu’ils pouvaient sembler avoir construit au quotidien.

Et le couple n’est pas la seule valeur qui va voler en éclat. Car Fincher y invite également une critique acerbe des médias et de l’opinion publique qui peuvent eux-aussi être aisément manipulés, retourner leur veste à la moindre occasion, tandis que les forces de l’ordre sont tout simplement incapable de faire quoi que ce soit. C’est clair, Fincher n’a rien perdu de sa verve et de sa noirceur à l’encontre de notre société et ça fait plaisir de voir qu’il aborde maintenant son discours de manière encore inattendue et avec l’expérience qu’il a maintenant acquis, appuyé par la photo toujours magnifique de Jeff Cronenweth qui fait ressortir toute l’étrangeté de cette banlieue ou la BO encore une fois orchestrée par Atticus Ross et Trent Reznor qui nous plongent discrètement dans une ambiance oppressante où tout peut arriver.

A coté de cette maîtrise narrative et technique de Fincher, il faut aussi évidemment saluer le travail des comédiens. De Ben Affleck bien sûr, formidablement subtil dans le rôle de cet américain moyen don le moindre sourire forcé ou regard de travers pourrait être traître et nous induire en erreur. Mais c’est certainement Rosamund Pike, femme disparue et blessée, blonde hitchockienne poussée à l’extrême noirceur, qui restera dans les esprits. L’actrice risque en effet d’avoir fait d’Amy l’un des personnages féminins les plus marquants de ces dernières années et mériterai bien une petite nomination aux oscars !

Cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu un jeu du chat et de la souris aussi bien orchestré au cinéma, et il fallait bien tout le talent de David Fincher pour nous plonger dans le mystère manipulateur et diabolique de Gone Girl. C’est tellement bon de se faire retourner le cerveau de cette manière qu’on en redemande ! Assurément l’un des thrillers psychologiques les plus féroces de ces dernières années.