[Festival International du Film d'Amiens] Un jour 2 expérimental qui fini sur un choc venant du Canada

Par Kevin Halgand @CineCinephile

Voir le Rapport du Jour 0 et Jour 1

Après un jour 0 réjouissant grâce à la découverte du premier long-métrage de Thomas Salvador et un jour 1 surprenant en tout point grâce à une sélection éclectique et contenant quelques bonnes surprises et un coup de cœur, nous voici arrivés au jour 2 et ce, après une petite nuit de 5h30 de sommeil. C’est suffisant, mais est-ce que je tiendrais un tel rythme jusqu’au 22 novembre compris, pas si sûr… 9h40 et déjà de retour au ciné St Leu, cinéma partenaire du Festival International du Film d’Amiens pour la seconde matinée consécutive, avec une fois n’est pas coutume, la projection d’un nouveau film en compétition : Violent. Véritable inconnu au bataillon, Violent est un film canadien, tourné intégralement en Norvège et en norvégien. Écrit et réalisé par Andrew Huculiak, j’aurais envie de dire que Violent relève davantage de l’expérience sensorielle que du drame conventionnel. Basé sur l’histoire d’une jeune fille qui revoit consécutivement et sous la forme de flashback cinq personnes qui ont marqué les jours précédents de sa vie, ce long-métrage joue énormément sur un son sourd, brutal et une image magnifiée par les paysages urbains comme naturels.

Absolument magnifique d’un point de vue visuel et ce, malgré quelques cadres hasardeux qui ne sont qu’une minorité, Violent est un film qui déçoit tout de même, puisque reposant sur une histoire inutilement longue. Une longueur qui se fait notamment ressentir à cause d’un récit découpé en cinq étapes, dont les étapes centrales sont trop longue et peines à apporter une sensibilité ou une nouvelle émotion à un film qui n’en est pas dénuée grâce à la présence d’une actrice en devenir : Dagny Backer Johnsen. Avec une sensibilité et un jeu d’actrice proche de l’actrice Elle Fanning qui a déjà la notoriété méritée, Dagny Backer Johnsen porte littéralement et avec force, la charge émotionnelle de cette expérience cinématographique pas inintéressante, mais aux défauts contraignants. Verra-t-il ou ne verra-t-il jamais le jour, telle est la question ? Ne possédant à l’heure actuelle aucun distributeur français, Violent a pour le moment uniquement été présenté dans trois festivals de cinéma à travers le monde.

Sorti de la salle en ayant eu l’impression d’y avoir passé plus de trois heures, j’étais finalement content, mais déçu par le film que je venais de visionner, mais il faut croire que ce n’était que le début d’une journée qui ne va faire qu’empirer. En effet, après un peu moins de deux heures de pause qui nous ont permis d’aller manger un bout, je me suis rendu dans le Petit Théâtre de la Maison de la Culture d’Amiens, autre salle mise à disposition de la ville d’Amiens pour projeter des films en rétrospective, comme en compétition suivant le programme. Même si la salle en elle-même est très agréable, ce n’est pas une raison pour apprécier davantage le film projeté. Jamais diffusé sur grand écran auparavant, c’est à l’occasion d’une rétrospective consacrée au directeur de la photographie Vittorio Storaro que j’ai pu découvrir dans sa version d’origine (dans un 35mm qui a assez mal vieillis pour le coup), le film Giordano Bruno réalisé par Giuliano Montaldo et paru en 1973 dans quelques pays, mais pas en France. Si le film ne fût pas proposé dans les salles françaises, c’est tout simplement parce qu’il fût scandale à sa sortie.

Giordano Bruno, un film qui n'a jamais eu de distributeur français

Biopic consacré au frère dominicain et philosophe Giordano Bruno, ce dernier s’est attiré la foudre de l’église catholique à la fin du XVIe siècle pour avoir délibérément critiqué l’église catholique dans ses textes. Même si très long et assez vain dans sa première moitié, Giordano Bruno est un film qui choc par sa critique acerbe et violente envers l’église catholique de ces années. Brutal dans ses propos et parfois dans son esthétique visuelle, qui par ailleurs est remarquable grâce au travail sur les lumières et jeux d’ombres de Vittorio Storaro (je vous reparlerais plus en détail de ce directeur de la photo dans la semaine), Giordano Bruno est un film qui n’a pas marqué le cinéma italien comme international et ce n’est pas un film qui marquera indéfiniment le spectateur, mais c’est un des rares biopics acerbes qui permet de découvrir une face cachée de l’histoire de notre monde et de l’une des religions qui y apparaît comme une véritable secte amatrice de violence et qui n’hésite en aucun cas à exécuter ceux qui veulent la mettre à mal. Glaçant même pour un athée convaincu comme moi…

Le Fils du Désert, un film Metro Goldwyn Mayer

Une expérience sensorielle, un film glaçant sur la religion… cette journée s’annonce éprouvante, mais heureusement John Ford va me permettre de me détendre durant un peu moins de deux heures. À l’occasion d’une rétrospective consacrée à Merian C. Cooper, j’ai pu découvrir un des nombreux western que je ne connaissais que de nom : Le Fils du Désert, réalisé par John Ford en 1947 (paru en 1948) et produit par Merian C. Cooper. Western biblique ou comme j’ai aimé le nommé, le western de noël, Le Fils du Désert est loin d’être représentatif, qualitativement parlant, de ce dont était capable de faire John Ford, mais il en reste un western divertissant et qui fait passé le moment. Entre un John Wayne qui casse son image et devient l’infirmière Wayne le temps du film et un protagoniste mexicain qui en fait des tonnes afin de tenter de faire rire le spectateur qui s’ennuierait, ce long-métrage, qui n’est autre que le remake en Technicolor du film éponyme et déjà réalisé par John Ford en 1919, entre totalement dans ce qu’on appellerait aujourd’hui le film popcorn. Un film qui ne réinvente pas le genre, mais n’en a pas pour autant la prétention. C’est mignon, c’est fortement américain dans les ficelles (Dieu est parmi nous et fait ressortir le meilleur de chacun…), mais c’est drôle et interprété par John Wayne, tout simplement.

Jusqu’ici, on ne va pas dire que la journée fût d’une richesse incroyable. J’ai découvert en avant-première un film qui je pense va me hanter quelque temps, un film qui a fait scandale et que j’ai déjà presque oublié à l’heure où j’écris ces quelques mots et un western qui n’en est pas vraiment un, mais en reprend seulement les codes pour les détourner afin d’en faire une comédie, presque parodique. Comment va se finir cette journée qui entre temps a connus quelques déboires à cause de séances décalés… C’est finalement avec surprise que cette journée s’est admirablement bien achevée avec la projection du tant attendu Félix et Meira. Tant attendu puisque comme je l’ai dit hier, le film en question attire énormément de gens qui remplissent les salles de projections une à une, alors que les blogueurs présents sur place n’en avaient pas conscience (comme quoi, un blogueur mis à part les grosses productions, il faut croire qu’on peine à tout savoir…).

Félix et Meira, un film Urban Distribution

Pour être clair et direct, Félix et Meira a remporté le Prix du Film au TIFF au pied et à la barbe de Mommy, le phénomène signé Xavier Dolan il y a de ça quelques mois et c’est mérité. En effet, même si Mommy est un film phénomène qui surprend par son audace et touche par sa force scénaristique, Félix et Meira est un film à la densité émotionnelle incroyable, porté par une mise en scène aux petits soins pour ses interprètes et une esthétique visuelle incroyable. Je ne vais pas m’étaler pour en détail sur ce film incroyable et au scénario qui évite avec astuce le manichéisme du genre puisqu’il me faut retourner au festival (eh oui, cette fois j’ai écrit le matin avant de partir), mais rassurez-vous, j’en reparlerais très vite pour vous partager mon ressentis et surtout vous donner envie de l’attendre, puisque le film ne sera pas en salles avant le 4 février 2015.

Sur ce, je vous dis déjà merci pour avoir lu le premier numéro de cette chronique dédié au Festival International du Film d’Amiens (si ce n’est pas fait, vous pouvez toujours vous rattraper), mais surtout merci pour être aller au bout de celui-ci.

Qu’est-ce qui m’attend en ce jour 3… je m’attends au pire !