Whiplash, critique

Par Fredp @FredMyscreens

L’année n’est pas encore terminée et il faut bien surveiller les quelques films qui risquent encore de faire sensation ! Whiplash est de ceux-là, ces films qui ne préviennent pas avant de nous filer une bonne claque, de nous enivrer et de nous marquer pour longtemps à tel point qu’il serait certainement l’un des meilleurs films de l’année. Et ce n’est qu’un premier film !

Au départ, il y avait un court métrage de Damien Chazelle récompensé par le jury de Sundance en 2013. Puis le réalisateur se décide à transformer Whiplash en long métrage qui est à nouveau présenté à Sundance en 2014 et est récompensé par le jury et le public. Et cela n’est que le début puisque le film part ensuite pour Cannes (présenté en Quinzaine des Réalisateurs), Toronto et Deauville où il repart également avec le prix du jury et du public. Si bien que l’on pourrait se demander si toutes ces ovations sont bien justifiées et si la déception ne va pas nous guetter en sortant de la salle.

Mais il n’en sera rien, car Whiplash est un film dans lequel ont subi la même pression que le héros. Ici nous suivons Andrew, un jeune batteur de jazz qui tente de percer en entrant au conservatoire sous la direction d’un professeur particulièrement autoritaire qui n’hésite pas à hurler sur ses élèves et à les exclure à la moindre fausse note. Andrew s’aperçoit alors qu’il va devoir tout donner et tout abandonner pour devenir le meilleur batteur, celui qui sera à la hauteur des attente de ce prof, celui qui sera reconnu pour la postérité.

Loin de la structure du film musical, du film pour ado en cours ou du biopic avec ce qu’il faut de descente aux enfers et de résurrection, Damien Chazelle choisit une approche réaliste concentrée sur l’élève et le professeur pour mettre en place un face à face au rythme de la batterie dans lequel la sueur, le sang et les regards furieux sont le seul langage. Se déroulant presque entièrement en huis-clos dans la salle de classe avec seulement quelques aérations, le réalisateur maintient sans cesse une ambiance oppressante qui nous plonge toujours un peu plus dans l’enfer que doit vivre Andrew si il veut atteindre son but.

Damien Chazelle maîtrise donc parfaitement son film, ses choix de plans, sa lumière obscure, son rythme pour nous attraper directement, provoquer chez nous une fascination pour le duel qui se joue à l’écran. Une fascination qui montrera toute l’exigence du jazz et dont on ressortira à la fois lessivé et enivré. Car jamais le rythme ne tombe, jamais une scène n’est inutile (toujours là pour mieux saisir les enjeux pour le personnage et montrer ce qu’il est prêt à sacrifier) et c’est dans une certaine souffrance et une certaine euphorie que l’on en viendra au sang.

Il faut dire que le réalisateur excelle également dans la direction de ses acteurs. Le jeune Miles Teller donne tout ce qu’il a dans ce rôle particulièrement exigeant pour faire face à JK Simmons grandiose en professeur détestable et dont nous comprenons pourtant les motivations (repousser l’art du jazz). Un personnage si marquant que l’acteur mérite amplement une nomination à l’oscar du meilleur second rôle. Le duel entre les deux acteurs, entre les deux personnages, est d’une intensité folle, l’un de ces face à face comme il n’y en a que peu au cinéma.

Avec Whiplash pour premier film, Damien Chazelle entre directement dans la catégorie des réalisateurs sur lesquels on peut fonder beaucoup d’espoir prochainement, ceux qui arrivent à maîtriser parfaitement leur sujet pour les pousser à font et faire ressentir tout l’intensité qu’éprouvent leurs personnages à des spectateurs qui en ressortent lessivé, abasourdis. Une vraie claque !