Imitation Game, critique

Par Fredp @FredMyscreens

Un sujet historique et secret, un acteur impliqué dans un rôle difficile, il n’en faut pas plus pour parler d’Imitation Game pour les Oscars et ce, malgré son grand manque de personnalité et son formatage pour la cérémonie … les Weinstein ne s’y sont pas trompés et s’occupent de la sortie du film aux USA.

Après le triomphe aux Oscars du Discours d’un Roi en 2011, les Weinstein ont trouvé leur nouveau poulain pour obtenir une statuette dorée en février. On replonge en Angleterre pendant la seconde guerre mondiale pour s’intéresser à un personnage méconnu qui a pourtant changer le cours de l’histoire. Et en plus ce personnage à quelques problèmes personnels. Ajoutez à cela un réalisateur tout entier au service de son histoire (comprenez par là qu’il est complètement transparent et lisse) mais qui vient du grand Nord (Morten Tyldum qui avait réalisé le caustique Head Hunters) et une pléiade d’acteurs hype dans les premiers et seconds rôles et vous avez bien tous les ingrédients du produit formaté pour les récompenses … mais maintenant la méthode se voit quand même beaucoup.

Pour l’histoire, nous nous intéressons donc à Alan Turing, mathématicien, cryptologue qui a réussi à décrypter la fameuse machine Enigma qui permettait aux allemands de communiquer pendant la seconde guerre mondiale. Un fait resté secret afin de pouvoir gagner la guerre mais qui a permis également d’incroyables avancées dans le domaine de l’informatique. Bref, nous avons là un portrait d’un homme brillant bien que connaissant quelques problèmes psychologiques et identitaires (à la limite de l’autisme, homosexualité) qui connaîtra un destin tragique sur lequel toute la vérité ne sera faite que lors de lorsque la reine Elizabeth II le graciera à titre posthume en 2013.

Le contexte historique est passionnant, les sujets (décryptage d’Enigma, l’homosexualité pendant cette période, l’espionnage) fascinants. Mais malheureusement cela ne suffira pas pour alimenter un scénario qui aurait un peu de relief. Car si Imitation Game débute sur une tirade nous invitant à bien prêter attention à tous les éléments qui vont être raconté, il n’y a en fait pas besoin de beaucoup réfléchir tant tout est expliqué de manière très pédagogique pour que tout le monde puisse tout comprendre (avec des sauts dans le temps avec un interrogatoire qui sont particulièrement inutiles). Ce qui incitait donc à l’attention totale se révèle donc très vite inutile et dessert même le film car si on pensait alors s’embarquer dans un jeu d’énigmes ou un thriller d’espionnage, on en sera très loin.

D’autant plus que l’histoire se révèle particulièrement lisse en sans grandes embûches. Avec la réalisation plus que transparente (qui nous rappelle à travers de courtes séquences assez laide que le film se passe pendant la guerre et qu’il y a des morts … des fois qu’on ai oublié) de Tyldum. Et finalement, le sujet qui aurait été le plus intéressant, à la fois émotionnellement et politiquement, n’est évoqué qu’à travers une scène touchante et un carton juste avant le générique de fin alors que l’on attendait justement d’en savoir plus sur sa condamnation. Aucune polémique ou atteinte au gouvernement, on restera en permanence très en surface afin de glorifier tout le monde et ne froisser personne, restant le plus consensuel possible afin d’avoir une statuette.

Qu’y a-t-il donc à tirer de cet Imitation Game sans grande folie ? Et bien il faut tout de même accorder au film son sujet qui reste intéressant et 2h qui passent plutôt vite. Mais surtout, le film ne serait rien sans un Benedict Cumberbatch comme souvent brillant, tirant le film vers le haut à lui tout seul même si parfois cela peut sembler cliché. Et on peut être sûr que si le film a du succès, c’est bien parce que le talentueux comédien est en pleine hype. Il fera d’ailleurs même de l’ombre aux seconds rôles dispensables joués par Keira Knightley, Mark Strong, Matthew Goode ou Charles Dance.

Imitation Game est donc effectivement un film qui imite certains de ses prédécesseurs pour accéder aux cérémonies de récompenses, quitte à n’avoir aucune personnalité dans son rapport à l’histoire, au personnage et à la réalisation. Il en ressort alors un petit drame plaisant mais trop consensuel pour y attacher vraiment de l’importance.