« Tireur d’élite des Navy SEAL, Chris Kyle est envoyé en Irak dans un seul but : protéger ses camarades. Sa précision chirurgicale sauve d’innombrables vies humaines sur le champ de bataille et, tandis que les récits de ses exploits se multiplient, il décroche le surnom de « La Légende ». Cependant, sa réputation se propage au-delà des lignes ennemies, si bien que sa tête est mise à prix et qu’il devient une cible privilégiée des insurgés. Malgré le danger, et l’angoisse dans laquelle vit sa famille, Chris participe à quatre batailles décisives parmi les plus terribles de la guerre en Irak, s’imposant ainsi comme l’incarnation vivante de la devise des SEAL : « Pas de quartier ! » Mais en rentrant au pays, Chris prend conscience qu’il ne parvient pas à retrouver une vie normale. »
« Pas le chef-d’œuvre escompté, mais un bon film de guerre savamment orchestré. »
Clint Eastwood, cinéaste depuis son plus jeune age avec à son actif pas moins de 16 prix dont 3 Golden Globes du Meilleur Réalisateur pour Bird, Impitoyable et Million Dollars Baby, 2 Oscars du Meilleur Réalisateur pour Impitoyable et Million Dollars Baby, ainsi que 2 Oscars du Meilleur Film pour encore une fois Impitoyable et Million Dollars Baby, est depuis quelques années reconnu comme un réalisateur imprévisible, qu’un réalisateur ou acteur de grand talent. Néanmoins, Clint Eastwood reste une légende du septième art. Des films connus de tous, des personnages emblématiques, mais avant tout, des collaborations mémorables notamment dans les années 70 avec Sergio Leone. Aujourd’hui, la légende renoue avec un film dans la droite lignée de ceux qui ont bâti sa légende en tant qu’acteur avec un biopic dédié au Navy SEAL Chris Kyle. Acclamé par le public américain avec prêt de 300 millions de dollars de recettes à la surprise générale, pourquoi American Sniper a-t-il tant fait parler de lui au pays de l’oncle Sam ?
Plongé au cœur d’une Irak enflammée par les conflits, Chris Kyle devient petit à petit le légendaire soldat reconnu encore aujourd’hui comme un héros de guerre pour avoir tuer plus de 200 personnes le temps de conflits aussi terribles que douloureux. Au travers de ce soldat dont le caractère et la personnalité reflètent l’image que le monde se fait du soldat américain patriotique à l’émotivité plus proche de la machine que de l’être humain, Clint Eastwood dépeint avec une ferveur patriotique une réalité qui n’a jamais été autant d’actualité que depuis le début du conflit irakien sous Georges W. Bush Junior. Central au récit mis en image par le cinéaste, Chris Kyle représente l’archétype même du soldat américain burné à l’accent Texan inaudible qui, suite aux évènements du 11 septembre 2001, à décidé de mettre sa vie au service du pays qu’il considère comme le plus grand et le plus beau du monde. Les Américains sont les plus forts, les plus beaux et sans eux le monde serait perdu, telle pourrait être la devise de Chris Kyle, mais ce n’est pas pour autant ce que nous racontent Clint Eastwood et Jason Dean Hall, auteur du scénario, qui n’est autre que l’adaptation de la biographie co-écrite par Chris Kyle, Scott McEwen et Jim DeFelice.
Au delà de la caractérisation des personnages et plus particulièrement du protagoniste, dont les réflexions et envies forment la structure émotionnelle du scénario, Clint Eastwood va au-delà de ce personnage et dépeint une Amérique meurtrie par les conflits à répétition qui tuent des milliers d’innocents et blesses tout autant de familles à l’internationale. En essayant de faire de Chris Kyle un héros de guerre, voire plus, fait de toute évidence que le long-métrage reste patriotique, car la charge émotionnelle du film s’imprègne de la caractérisation du protagoniste, mais il n’en reste pas pour autant patriotique jusqu’à la moelle. Au travers de quelques séquences bien pensées où le cadrage resserré sur le visage fermé et doutant du personnage, on retrouve non pas le sens du patriotisme, mais une envie de critiquer les conflits et ces soldats qui comme celui-ci, a décidé en connaissance de cause, de fonder une famille civile, mais trouve les émotions et pulsions dont il a besoin au sein de sa seconde famille : la guerre. Malheureusement, il ne s’agit que d’une boucle qui revient vers le propos initial qui est de faire de Chris Kyle un héros de guerre, un martyr.
Film de guerre dans la lignée de Green Zone réalisé par Paul Greengrass en 2008, American Sniper emprunte à Grengrass son envie de faire de la ville un terrain de conflit, mais va avant tout piocher au cœur des westerns de Sergio Leone, en faisant un parallèle audacieux de mise en scène entre la zone couverte par le sniper et la ville régit par un truand qui va venir se confronter au héros. Du haut de son bâtiment, Chris Kyle domine l’arène où va avoir lieu le combat, poussant les méchants à sortir de leur cachette afin qu’il se charge de les tuer, ses coéquipiers n’étant pas assez dégourdis. La référence au western va plus loin, avec l’arrivée d’un antagoniste, permettant un duel à distance qui va s’allonger le temps de plusieurs séquences. Menées tambour battant avec non pas une caméra mobile comme chez Grengrass, mais avec une accumulation de plans fixes qui, découpés de manière intensive et jamais utilisée à plus de trois reprises, les scènes de guerre n’ont ces derniers temps, jamais été aussi intenses et percutantes. Le montage aidant à avoir une succession de plans aux durées n’excédant jamais les trois secondes durant un conflit, Clint Eastwood réussi grâce à un nombre incalculable de cadres uniques, à rendre une réalisation majoritairement fixe, intense et dynamique. On regrettera cependant une envie discutable de monter crescendo dans le spectaculaire afin de finir sur une séquence d’action censée être plus époustouflante que les autres, alors qu’au final il n’en est rien, au contraire.
Immense succès-surprise du Box Office américain avec plus de 300 millions de dollars de recettes, American Sniper est le film évènement du moment, mais n’est pas pour autant le chef-d’œuvre de Clint Eastwood. C’est avec ce film que le cinéaste renoue avec le film de guerre, mais c’est surtout au travers de ce film qu’il nous offre une morale floue à nos yeux qui flirte entre le patriotisme abject ayant pour but de rendre hommage à une personne qui a tué plus de 200 autres êtres humains et la critique du système américain en place depuis 2001. Ayant du mal à bien cerné le propos fondamental que le cinéaste souhaite faire passé, le spectateur se raccrochera néanmoins au film de lui-même, en temps que véritable film de guerre à la mise en scène suffisamment solide pour offrir aux spectateurs en manque de sensations, des scènes d’assauts percutantes et dynamiques. Porté avec brio par Bradley Cooper impressionnant de plan en plan, on regrettera cependant une sous-utilisation de tous les personnages qui gravitent autour de lui, sa femme en première ligne, incarnée par Sienna Miller. American Sniper n’est pas le chef-d’œuvre escompté, mais reste un beau film, un bon film de guerre savamment orchestré.