« Rebecca est une photographe de guerre de renommée internationale. Alors qu’elle est en reportage en Afghanistan pour suivre un groupe de femmes qui préparent un attentat suicide, elle est gravement blessée par l’explosion d’une bombe. De retour chez elle en Irlande, pour se remettre de ce traumatisme, elle doit affronter une autre épreuve. Marcus, son mari et Stéphanie, sa fille ainée de 13 ans, ne supportent plus l’angoisse provoquée par les risques que son métier impose. Rebecca, qui est déchirée entre les souffrances qu’elle fait subir à ses proches et sa passion de photoreporter, doit faire face à un ultimatum : choisir entre son travail et sa famille. Mais peut-on vraiment échapper à sa vocation, aussi dangereuse soit-elle ? Renoncera t-elle à couvrir ces zones de combats, et à sa volonté de dénoncer la tragédie humaine de son époque ? »
En ce début du mois de mai, les films qui vont paraître en tête d’affiche son typiquement des films qui vont disparaître de nos cinémas d’ici deux à trois semaines à cause du Festival de Cannes, mais également des films à gros budget qui vont accaparer toute la visibilité. Je parle notamment de Mad Max : Fury Road et A la poursuite de demain. Mais en attendant, ces outsiders du box-office ont une semaine pour convaincre une certaine partie du public et celui qui a la plus grande chance de visibilité se nomme L’Épreuve. Quatrième long-métrage dans la filmographie de Érik Poppe, mais première réalisation internationale pour cet ancien reporter de guerre. Ayant comme actrice principale Juliette Binoche, l’on peut croire que nous sommes un des premiers pays à donner sa chance au film, mais il n’en est rien. Nous sommes en réalité le dernier pays à le sortir dans nos salles obscures. Le film tourne au travers le monde depuis le mois d’août 2013 dans le but d’être vu dans un maximum de pays, par un public le plus large possible et dans un grand nombre de festival pour trouver de nouveaux distributeurs…
Au-delà de son aspect cinématographique, L’Épreuve est également un film qui propose une autre vision des ravages de la guerre. Une vue de l’intérieur par une photo-reporter de guerre qui se doit de choisir entre son métier à risque et sa vie de famille. Le film est intéressant grâce à cette mise en abime de ce métier qui au fil des années prend autant d’importance qu’il n’en devient dangereux. Un métier à risque adopté par des personnes fortes d’esprit comme de corps et qui n’ont qu’un but : ouvrir les yeux au monde sur des sujets aussi graves que le terrorisme et la guerre. Débutant par une séquence terrifiante en Afghanistan, durant laquelle le protagoniste assiste à la séance de préparation d’une femme dans le but d’effectuer un attentat terroriste, l’on croit que le film va prendre pour cible le terroriste et s’y heurter frontalement. Aussi terrifiante et douloureuse soit-elle grâce à l’exactitude de la représentation du métier de photo-reporter, cette séquence d’introduction va lancer une machinerie plus forte que le film lui-même : un scénario qui repose sur les conventions hollywoodiennes.
Dans sa construction et dans sa façon de développer les forces de convictions de chacun des personnages qui y participent, cette première séquence va être le point culminant du film. Tout ce qui va avoir lieu par la suite ne va être qu’une redite de cette courte, mais intense séquence. Pendant près de 2 heures, les personnages vont se chercher. Rebecca – personnage principal – va sans cesse se remettre en question et remettre en question son métier, tout en souhaitant garder ses convictions et ses croyances en les bienfaits de ce métier à risque. Elle a ce métier dans la peau, mais pour conserver sa famille elle va devoir s’en éloigner. Le film est une perpétuelle remise en question : « Suis-je capable de le faire ? Pourquoi ? Finalement non, c’est plus fort que moi… ». Cet aller-retour incessant est redondant et ennuyant, même si les protagonistes sont attachants. Cela étant le cas grâce aux belles interprétations de Juliette Binoche et Lauryn Canny qui mettent tout leur cœur dans leur personnage respectif.
Adoptant un point de vue intéressant puisque rarement, le métier de photo-reporter n’aura été aussi bien étudié dans un film, L’Épreuve n’en reste pas moins qu’un objet cinématographique qui tente des choses, mais qui n’arrive pas à se défaire de son envie de plaire. Très stylisé, le film possède une direction artistique qui ne fait pas dans la dentelle et ne sort pas des clichés habituels. Dans les zones de conflit, la lumière chaude et étouffante, alors qu’en Irlande, tout n’est qu’espace et la lumière y est claire comme de l’eau de roche. Soigné dans sa réalisation, qui prend soin à bien cadrer ses personnages afin d’appuyer le jeu des acteurs, L’Épreuve est un film qui cherche à trop en faire visuellement parlant, allant jusqu’à dénaturaliser le propos. C’est beau, mais c’est peu utile et les différents ralentis censés exacerbés la violence de certains propos ou chocs sont plus ridicule qu’autre chose.
L’Épreuve est un film que l’on a envie d’aimer et que l’on aime non-intentionnellement. Le propos est juste et mettre en lumière un métier tel que celui de photo-reporter de guerre avec la densité émotionnelle qui lui revient est une bonne chose. Les actrices donnent du corps et du charme aux personnages et la réalisation de Érik Pope nous offre son lot de beaux cadres et de belles images, chocs ou non. Néanmoins, L’Épreuve est un film dont la narration et l’écriture laissent fortement à désirer. Suivant les conventions hollywoodiennes et cette envie de faire douter encore et encore les personnages, le film ne surprenant pas. Au contraire, il frustre, car le propos de départ n’est pas là et le spectateur s’ennuie ferme. Ce n’est pas un film que l’on ne recommande pas, mais c’est un film qui aurait mérité mieux, même s’il aurait fallût passer par un amoindrissement du soin apporté à l’aspect visuel, qui ici passe au détriment de l’histoire qui nous est contée.