Titli, une chronique indienne
Avec : Shashank Arora, Shivani Raghuvanshi, Ranvir Shorey
De Kanu Behl
Inde, 2015, 2h04
Date de sortie, 6 mai 2015
Festival de Cannes 2014, section Un certain regard
Synopsis
ans un quartier pauvre de la banlieue de Delhi, Titli, troisième d’une fratrie de criminels, veut échapper au déterminisme familial en s’enfuyant du domicile paternel. Empêché dans sa décision par le vol de ses économies, marié de force, il se voit reproduire instinctivement le même comportement qu’il rejetait chez ses frères. Il est très surpris quand Neelu, sa jeune épouse, montre les mêmes envies d’indépendance. Ensemble, ils vont tout tenter afin de s’échapper du carcan familial….
« Bienvenue dans la banlieue de Delhi, sa misère qui colle à la peau, son économie parallèle, son système patriarcal qui broie les individus. Ce premier long métrage indien, présenté l’an dernier à Cannes dans la section Un certain regard, est un choc » Télérama.
A propos du film
Kanu Behl s’est inspiré de sa propre histoire et de son rapport à son père, pour créer le scénario de Titli, Une chronique indienne. Il a ainsi tiré beaucoup de son sentiment d’oppression que lui imposait son père, sentiment que possèdent beaucoup de jeunes Indiens. Fils d’un réalisateur et d’une comédienne, Kanu Behi réalise, après plusieurs documentaires, Titli, Une chronique indienne, son premier long-métrage.
En hindi, titli signifie papillon, c’est aussi le nom du personnage principal du film. Le réalisateur explique ce choix, »C’est l’une des créatures dont la métamorphose est la plus radicale, passant d’une chenille laide et sans vie à un magnifique papillon. Le titre du film est à prendre au second degré. Le voyage de Titli est presque à l’opposé de la trajectoire du papillon. D’un garçon innocent et opprimé, il se transforme à son tour en oppresseur. »
Avec Titli, Une chronique indienne, Kanu Behl veut rompre avec la tradition de Bollywood qui utilise presque uniquement des faux décors. Ainsi, presque l’intégralité du film a été tournée dans des décors réels à Dehli. De plus, dans un soucis de réalité, le réalisateur a recruté énormément d’acteurs non-professionnels.
Dans son film, Kanu Behl montre la séparation qui se creuse entre les deux parties de Delhi. Il explique : « D’un côté, (il y a) les gens qui sont dans la ville, qui consomment, veulent être servis à toute heure, et de l’autre, les gens qui ne font pas partie de ce monde, qui sont à la marge, rejetés, et qui sont chargés de servir ceux qui veulent être servis. Jour après jour, ils sont repoussés de plus en plus loin. (…) Siddharth et moi voulions que ces deux mondes se rencontrent. ». On est à l’opposé des romances à l’eau de rose bollywoodiennes et à mi-chemin entre le drame social et le polar poisseux. Le film se situe un peu entre « Affreux, sales et méchants » de Scola et « Les Affranchis » de Scorcesse
Le réalisateur montre la place de plus en plus importante des femmes indiennes dans la société, mais également la difficulté qu’elles rencontrent encore à s’imposer dans un monde d’hommes. Il explique : « Titli, Une chronique indienne a toujours été conçu comme un film anti-patriarcal. Toutes les femmes sont fortes et font entendre leurs voix. Neelu, Sangeeta ou même l’avocate, sont des personnages qui pensent et agissent, dirigés par leur conscience. Mais comme elles n’ont jamais eu de pouvoir physique ou financier pour s’imposer, elles sont malgré tout souvent laissées à la merci des hommes et leur lutte pour s’échapper est d’autant plus longue et difficile. » DansTitli, toutes les femmes dépeintes sont fortes et elles incarnent l’avenir, le vent du changement, la belle fuite en avant.
L’une des qualités du film est la beauté des portraits livrés par le réalisateur. La psychologie des personnages est complexe et mise en valeur par des plans courts, des silences pesants suivis de crises violentes inattendues.
Titli production indépendant distribuée par une major de Bollywood
Pour produire et distribuer Titli, Kanu Behl a réussi à associer une production indépendante, Dibakar Banerjee Productions (Kanu Behl a été l’assistant du cinéaste Dibakar Banerjee et a co-écrit Love, Sex aur Dhokha avec lui), et l’immense machine bollywoodienne Yash Raj Films qui enchaîne les blockbusters (le dernier en date,Dhoom:3, a explosé les records au box-office). Pour Kanu Behl, l’association est gagnante : avec DBP, il garde sa liberté créative ; avec Yash Raj, il assure que la distribution de son film couvrira au moins les multiplexes des grands centres urbains, où vit la majorité de ses spectateurs potentiels. Pour Yash Raj , il s’agit de ne pas passer à coté de cette nouvelle génération de cinéastes, qui émerge en Inde.