The Sacrament (2013), est le dernier long métrage (en date) de Ti West, avec Amy Seimetz, Kentucker Audley et Gene Jones (que des gens que je ne connais absolument pas).
The Sacrament c’est l’aventure de 3 journalistes qui, suite à l’invitation de la sœur de l’un d’entre eux, débarquent dans une communauté reculée du monde, où, règnent (en apparence forcément), bonheur et paix. Quelques spoilers à signaler pour la suite.
Bien que le nom d’Eli Roth (producteur du film, et réalisateur des surestimés Hostels,) soit visible avant tout, c’est bien Ti West qui est réalisateur. Il est une figure émergente du cinéma de genre, à l’origine des remarqués The house of the devil (2009), et The innkeepers (2010).
The Sacrament est tourné en found footage, format que je ne supporte plus, et qui élimine d’office dorénavant les œuvres de ce type, de mes listes de films à voir. Mais certains passent entre les mailles du filet! Il se trouve que pour combiner l’aspect réel reportage et exonération de scènes qui donnent envie de vomir au spectateur, Ti West a eu la simple mais bonne idée de mettre en scène des professionnels. Qui savent cadrer donc.Soulagement.
Ti West joue la carte à fond « reportage authentique », en contextualisant les faits, en les datant au fur et à mesure du film. Voici donc l’histoire d »Eden Parish », (la paroisse d’Eden, référence pas du tout grossière en passant), communauté imaginaire, qui est en fait la description quasi exacte du Temple du peuple, secte du début des années 50 en Amérique du Sud, dirigée par un certain Jim Jones, et qui est principalement connue pour le suicide collectif de presque 1000 personnes en 1978. Ambiance.
Les similitudes sont pour autant troublantes: mêmes idéologies (rassemblement des minorités, des exclus, des toxicomanes…), même protocole pour les suicides avec les mêmes zones d’ombre (empoisonnement collectif avec quelques assassinat à la mitraillette), même profil du gourou ( les 2 personnages s’appelles « Père », toxicomane animé d’un esprit révolutionnaire contre les conditions de ce monde), mêmes éléments extérieurs bien accueillis puis qui vont s’avérer gênants (les journalistes dans le film, et pour le Temple du Peuple, le député Leo Ryan qui venait contrôler les conditions de vie, suite à des remontées d’informations inquiétantes), la tentative de fuite de quelques adeptes,etc…Autant dire que la réalité rejoint la fiction bien comme il faut.
Avant d’aller plus loin, il faut savoir que malgré que The Sacrament soit classé dans les films d’horreur, ça n’en est absolument pas un. Le film ne fait pas peur, ne contient rien de gore, ce n’est pas son but. C’est plutôt un thriller dramatique.
Comme c’est toujours plus sympa de finir par le meilleur, commençons par les défauts du film. The Sacrament souffre essentiellement d’interprétations approximatives des acteurs. En effet, seul Gene Jones est assez remarquable en gourou. Un bon mélange de protecteur, père, directif mais donnant l’illusion d’un champ libre, et avec surtout un sens de la répartie assez désarmant (la scène d’interview l’illustre parfaitement).
L’autre souci du film ce sont les quelques effets qui sonnent faux: la petite fille sourde et muette apparaissant et disparaissant comme un fantôme, l’un des journalistes qui se laisse aller à une partouze et qui devient un personnage complètement oublié, alors que c’est l’une des connexions essentielles du film (la présence de sa soeur à Eden Parish), le pilote totalement paniqué, prêt à laisser les journalistes en cas de retard, qui les attend finalement tranquillement alors qu’il s’est pris une balle dans l’épaule….Du coup, ça rame un peu pour contribuer au côté réel que The Sacrament voudrait retranscrire.
La réussite du film se situe au niveau de la narration, très bien écrite (tout comme les dialogues), pour un film de ce genre, avec une escalade dans le drame, qui paraît naturelle. Une présentation forcément idyllique du lieu par la sœur reste malgré tout sobre, et comme le spectateur sait que quelque chose de louche se trame, le contraste entre les deux n’est pas brutal. D’ailleurs la scène de suicide collectif reste étrangement calme, un calme inquiétant.
Ce qui m’a frappée dans The Sacrament, c’est son réelle humilité. Le discours et les illusions de la communauté sont forcément attendues et classiques. En revanche, les adeptes n’ont font pas des tonnes, expliquent des choses très simples que l’on retrouve 1000 fois dans tous les discours, notamment politiques, associatifs, d’aujourd’hui (le vivre ensemble, le respect de la nature, le rejet du matérialisme,etc…). D’où le renvoi, clair mais simple, vers le spectateur, sur le fait qu’il faut s’interroger sur ses valeurs, et leur place dans le monde d’aujourd’hui. Quelles actions ont un réel impact pour l’amélioration de notre monde?Quelles sont les limites? Qu’est ce que l’on peut accepter ou non? A défaut de proposer des réponses, on peut se poser des questions, (si l’on décide de voir un peu au delà d’un simple thriller).