Le Festival de Cannes est ouvert depuis une semaine, déjà. A ce stade, nous devions laisser quelques impressions…
Louder Than Bombs, de Joachim Trier
C’est un exploit qui ne se produit pas chaque année. Chose exceptionnelle depuis l’ouverture du Festival de Cannes (il y a déjà une semaine) : il n’est pas tombé une seule goutte de pluie sur la Croisette. Peut-être furtivement, il y a quelques jours, en soirée, juste comme ça. Mais le soleil brille bel et bien toute la journée, et la chaleur nous écrase dans les files d’attente. On en a vu, des festivaliers tenant un numéro d’Ecran Total fixé sur leur tête en guise de couvre-chef. Avec l’air marin qui descend directement aux poumons, c’est un peu l’été avant l’heure ; et en plus on voit un tas de films ! Hélas, le temps presse, défile, et la fatigue s’accumule de jours en jours. On doit probablement être de petites natures, parce que, contrairement à d’autres festivaliers plus téméraires, on prend quand même le temps de manger, de nous détendre entre deux projections, et de dormir aussi. Du coup, forcément, on prend aussi un peu de retard sur nos articles. On essaye de parler avant tout de ce qui nous paraît essentiel, beau, touchant, émouvant, urgent. Mais il y a également un tas d’autres films dont nous aimerions écrire un petit quelque chose, ne serait-ce que quelques lignes pour saluer telle ou telle qualité. Le film de Denis Villeneuve, Sicario, par exemple. Ou Notre petite sœur, du japonais Hirokazu Kore-Eda. Ou encore Louder than bombs, de Joachim Trier. Mais, le Festival touchant à sa fin (les programmations sont de moins en moins riches), nous devrions trouver un peu plus de temps et de courage pour nous mettre à écrire quelques lignes, et rattraper notre petit retard, avant la cérémonie de clôture qui aura lieu dimanche.
Contrairement aux journalistes des Cahiers ou de Télérama, que l’on aime quand même fortement et que l’on lit régulièrement, nous ne sommes pas aussi exigeants, aussi compliqués. On aime à peu près tout ce qu’on nous montre, même si on a quand même eu du mal à trouver notre coup de cœur, ce film qui, en plus de manifester de belles qualités, nous fait complètement vibrer. Mountains may depart, de Jia Zhangke, a un peu rattrapé ce sentiment de frustration que l’on a entassé depuis mercredi dernier. On prie donc pour trouver dans cette fin de compétition LE film qui fasse pétiller nos rétines. On est persuadé d’une chose, on va le trouver. Si ce n’est pas le cas, on aurait tout de même bien tort de faire les fines bouches. Le plus gros de la sélection étant déjà derrière nous, on est quand même content d’affirmer avoir apprécié beaucoup d’œuvres, et surtout heureux d’avoir eu la chance de les découvrir. C’est vrai, si ne serait-ce qu’un tiers de tous les films à l’affiche chaque semaine avaient la qualité et l’intelligence des œuvres que nous avons découvertes, on passerait notre vie en salles ! Mais ce n’est pas le cas, peut-être heureusement parce qu’on a quand même qu’une vie. Quoiqu’il en soit, Cannes nous rappelle que, même si les auteurs sont parfois un peu dans le creux de la vague (à l’image du film de Gus Van Sant, hué par la presse, et que nous n’avons pas encore vu pour pouvoir en parler objectivement), il y a toujours bien pire ailleurs. Alors, on ne boude pas notre plaisir d’être ici, à Cannes, assis confortablement dans cette immense salle, l’auditorium Lumière, à découvrir des films pensés et conçus par des artistes. Peut-être que quand nous aurons trente ans de festival dans les pattes nous ne tiendrons pas le même discours. En attendant, on profite, et on n’estime ne pas avoir le droit de nous plaindre.