[CRITIQUE] : The Voices

Présenté récemment au festival de Gérardmer (où il remporta le prix du public et le prix du jury), The Voices, la comédie horrifique freudienne de Marjane Satrapi débarque dans nos salles.

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Après Persepolis, Poulet aux prunes et La Bande des Jotas, on n’attendait pas Marjane Satrapi sur un projet comme The Voices. Le film retrace l’histoire de Jerry (Ryan Reynolds), un gentil garçon qui, lorsqu’il ne prend pas ses médicaments, entend les voix de son chien et de son chat. Mais surtout, ces-derniers poussent le jeune célibataire à commettre d’horribles meurtres en série. Un mélange des genres risqué pour la cinéaste franco-iranienne, qui s’essaye pour la première fois au film d’horreur. Mais par dessus tout, c’est évidemment le choix de Ryan Reynolds pour interpréter ce personnage tragi-comique qui nous apparaît comme le plus surprenant. En effet, on n’imagine pas forcément l’interprète inexpressif de Green Lantern et du remake d’Amityville comme l’acteur idéal pour le rôle de Jerry. Mais contre toute attente, c’est bien la principale qualité du film. Ryan Reynolds se révèle bluffant, ici totalement à contre-emploi. De plus, rappelons que Reynolds incarne aussi remarquablement le chat et le chien (choix parfaitement justifié puisque les voix qu’il entend ne sont que des créations de son esprit). La caractérisation de son personnage s’avère elle aussi très efficace et réussie, en faisant rapidement pénétrer le spectateur dans sa psyché. En épousant le point de vue de son personnage, Satrapi peut ainsi jouer sur la perception de la réalité, alternant un monde rose-bonbon et un univers plus sombre en fonction de ses états d’âme. Le film va constamment fonctionner sur ces deux modes, tour à tour comédie-romantique potache et véritable slasher dans la lignée de Maniac. 

Hélas, le film montre rapidement ses limites. Malgré une exposition efficace dans son dispositif, le film joue toutes ses cartes dès le premier quart-d’heure et ne réserve rien de plus pour la suite, faute à un scénario bien trop mécanique. Si le premier meurtre de Jerry surprend, le scénario paresseux de Michael R. Perry se contente de répéter ce schéma sur presque deux heures de métrage. Une fois bien installé dans son programme, le film déroule tranquillement sans jamais dévier de sa trajectoire. Pour un film qui se voudrait subversif et inclassable, The Voices est finalement d’un conformisme effarant. On est bien loin des jeux de massacre jouissifs d’Alex de la Iglesia. Néanmoins, Marjane Satrapi reste une cinéaste intéressante et parvient à distiller une ambiance absurde détonante, mais on aurait aimé la voir s’épanouir dans un projet plus libre et personnel. Jamais hilarant, jamais vraiment terrifiant, le film pèche par son manque de folie et son caractère extrêmement répétitif. C’est bien le principal problème d’un film qui semble avoir été créé uniquement pour son concept. De plus, le film bâcle les thèmes psychanalytiques qu’implique son sujet. Le chien fait figure de conscience morale tandis que le chat incarne le « ça », la partie chaotique de Jerry : le personnage doit réussir à accepter sa condition afin de trouver la paix intérieure. Pour l’originalité, on repassera !

Au final, The Voices est loin d’être le film iconoclaste qu’il promettait, mais reste toutefois plus que sympathique et propose quelques passages amusants. Le film est disponible dans nos cinémas depuis le 11 mars dernier.