Culte du dimanche : Conversation Secrète de Francis Ford Coppola

Par Fredp @FredMyscreens

Dimanche de remise de Palme d’Or oblige, nous revenons, comme tous les ans, sur l’un des films ayant reçu la récompense suprême de la Croisette. Et c’est Francis Ford Coppola que nous nous intéressons cette fois avec l’un de ses films les plus méconnu de sa période faste et pourtant l’un des plus appréciés, Conversation Secrète.

En 1973, Francis Ford Coppola sort du succès phénoménal du Parrain et de son Oscar mérité du meilleur film et meilleur scénario. Il se retrouve alors sous les feux des projecteurs, enfin reconnu par ses pairs comme un grand cinéaste et par les studios comme un réalisateur rentable et particulièrement doué. Evidemment, la suite entre rapidement en chantier mais avant cela, le réalisateur va profiter de sa nouvelle position pour mettre en scène un scénario qui lui trotte dans la tête depuis bien longtemps.

Inspiré à la fois par les récents événements du Watergate et par Blow Up d’Antonioni (film qui inspira également Brian DePalma et son Blow Out), il écrit Conversation Secrète. Il suit Harry Caul, spécialiste de la filature engagé dans une mission pour suivre un couple et enregistrer leurs conversations. C’est alors qu’il découvre sur l’enregistrement que le couple est en danger de mort. Alors que doit-il faire ? Donner la bande à son patron au risque qu’un drame se produise ou la conserver à ses risques et périls. Voilà un dilemme qui va le ronger avant que son commanditaire ne décide finalement pour lui.

Le film s’inscrit donc, comme Les Hommes du Président ou bien bien d’autres films dans une vague de film paranoïaques dont il est l’un des fers de lance après le Watergate, représentatif d’une société qui ne peut plus se fier au pouvoir et se rend compte de tout ce qu’implique l’espionnage. Avec un style de mise en scène plutôt sobre mais qui ne s’efface jamais, rendant toujours service à l’histoire et nous entraînant dans la psyché du héros, Coppola s’intéresse finalement bien plus à son personnage qu’à l’histoire d’espionnage qu’il raconte.

En effet, ici tout repose sur les épaules de Gene Hackman, impeccable, qui campe un Harry Caul reconnaissable en un clin d’œil avec son imperméable gris et sa démarche particulière. L’air toujours ailleurs, absorbé par le dilemme qui le ronge et le rend paranoïaque (à juste titre), nous comprenons petit à petit toute la solitude qui l’habite. Ce thème est une constante dans le cinéma de Coppola et ici cette solitude pèse particulièrement sur le héros. Alors la moindre intervention extérieure à son univers restreint nous interroge forcément.

Cette dimension intimiste et psychologique est renforcée par le choix de la bande-son. En effet, ici, pas d’orchestre mais une alternance entre piano ou saxo pour une ambiance jazz imprévisibles et renfermée qui ne fait qu’accentuer cette immersion dans l’univers de Harry Caul qui se resserre sans arrêt pour nous offrir l’un des films d’espionnage les plus intéressants de cette décennie et en même temps l’un des plus personnels de son réalisateur qui se permettait aussi de révéler Harrison Ford.

Le résultat est une réussite encensée encore une fois par la critique à sa sortie en 1974. Une réussite telle que cette Conversation Secrète remportera la Palme d’Or comme son modèle Blow Up quelques années auparavant. Le réalisateur enchaîne ensuite avec la 2e partie du Parrain qui sortira la même année. Les deux films se retrouvent alors en compétition aux Oscars où Call s’inclinera face à Don Corleone.