Genre: horreur, trash, hardgore (interdit aux - 18 ans)
Année: 2008
Durée: 1h15
L'histoire : Kevin est un homme effondré. Suite à un accouchement qui a mal tourné, il vient de perdre à la fois sa femme et son bébé. Résolu à ressusciter son épouse à n'importe quel prix, il va utiliser sortilèges et magie noire. Mais il ignore qu'il va, par la même, déchaîner des forces maléfiques dont la violence dépasse l'imagination.
La critique :
Olaf Ittenbach (Black Past, The Burning Moon), le "Kaiser" du gore cheap et outrancier, vient de trouver un successeur. Il s'appelle Brian Paulin et nous vient des Etats-Unis. Et avec Brian, ça déménage ! Un cinéma indépendant, limite underground, qui envoie du lourd, du très lourd ! Ce réalisateur s'est révélé en 2004 avec Bone Sickness, un film de zombies ultra sanglant qui rappelait étrangement les délires "Peter Jacksoniens" des débuts. En 2008, le bonhomme persiste et signe Fetus, un méchant trip démoniaco-gore fauché commes les blés, mais jouissif comme pas possible, pour qu'on apprécie ce genre particulier de cinéma. Ce film tourné en 16 mm fleure tellement bon l'amateurisme et le low coast qu'il en devient éminemment sympathique ! Ci-dessus, je faisais référence à Black Past.
Ce n'était pas innocent car la comparaison paraît inévitable entre les deux oeuvres.
Malgré son évident manque de moyens, et tout comme le film d'Ittenbach, Fetus revendique un propos sombre et un côté malsain que le spectateur perçoit aisément devant son écran. Vous avez "aimé" la séquence du bébé (comment dire ?) martyrisé dans A Serbian Film ? Alors, vous allez adorer Fetus car jamais un film n'aura autant maltraité les nouveaux nés. Un conseil à toutes les mamans : ne prenez pas Brian Paulin comme baby sitter !
Attention, SPOILERS ! Kevin (interprété par Brian Paulin lui-même) et sa femme Sarah nagent en plein bonheur. Ils s'aiment, ils viennent d'acquérir une belle maison et surtout, Sarah attend un heureux événement. Hélas, l'accouchement tourne au drame. Sarah meurt lors de l'opération, ainsi que le bébé. Kevin se retrouve seul et dévasté.
Inconsolable et dans l'impossibilité de faire son travail de deuil, il va perdre peu à peu le sens des réalités au point de décider de faire revenir sa femme d'entre les morts, et par n'importe quel moyen. En premier lieu, il se rend dans une boutique de nécromancie où un vendeur gothique lui propose un grimoire d'incantations sataniques. Mais les rites indiqués dans le livre nécessitent des sacrifices humains. Dès lors, Kevin va se transformer en tueur en série, enlevant des inconnus pour les achever dans un bain de sang, dans la cave de sa maison. Assailli de visions morbides, Kevin se met à confondre cauchemars et réalité (Et le spectateur ne comprend plus trop ce qui se passe).
Pour ressusciter Sarah, il essaie en vain de faire l'amour au cadavre de sa femme. Il voit un scorpion qui lui pique le pénis, une femme qui se poignarde le vagin pour en extraire une tête de nourrisson. Bref, il devient fou.
Il finira par réveiller un démon (qui a pris la forme d'un insecte géant) qui le dévorera lors d'un rituel particulièrement sanglant. Au programme, de la nécrophilie, des crânes déchiquetés, des foetus sévérement malmenés et des tripes qui volent dans tous les sens ! Ce petit film indépendant s'est taillé une certaine réputation sur le net chez les amateurs de gros gore qui tâche. Fetus est aussi (et surtout) connu pour son affiche ultra malsaine qui présente une femme ensanglantée arrachant une tête de bébé de ses entrailles. Scène que l'on voit effectivement dans le film.
La référence absolue du hardgore (profusion non stop d'hémoglobine en quantité industrielle) s'appelle Das Komabrutale Duell (Heiko Fipper, 2004). D'ailleurs, le terme "hardgore" fut créé pour lui. Mais ce film ressemblait plus à une vaste blague potache entre copains éméchés qu'à autre chose.
Fetus, même s'il délivre des hectolitres de faux sang, ne joue pas dans la même catégorie. Bien sûr, l'histoire ne casse pas trois pattes à un canard, le film paraît vraiment cheap (la faute notamment à des effets spéciaux d'une qualité approximative), et le scénario bifurque dès le milieu du film vers le n'importe "nawak". Pourtant, Fetus surprend par une atmosphère glauque, nauséabonde au possible. Et puis, le réalisateur ne se fixe pas de limite dans l'outrance et le politiquement correct.
Il maltraite donc avec un plaisir non dissimulé les petites poupées de latex qui lui servent de fetus. Ca démembre, ça éviscère, ça dépèce... En gros, on en a pour son argent. Il est à noter que Paulin utilise des effets spéciaux "à l'ancienne" sans avoir recours au numérique, ce qui donne un résultat plus authentique, même si certains sont à la limite de nous faire sourire.
Ce n'est pas parce que Fetus est un film américain qu'il a hérité d'un budget à la Spielberg. Encore une fois, le manque de moyens se voit nettement à l'écran. Oui, l'oeuvre de Brian Paulin transpire l'amateurisme, et le film a été souvent "dézingué" par les critiques aigris des blogs soi-disant spécialisés. Mais si les blogs avaient existé dans les années 1980, que n'auraient-ils pas écrit sur Evil Dead ou Bad Taste ? Or, ces péloches improbables, réalisées par des étudiants à peine sevrés, sont devenus d'énormes classiques au fil du temps. Alors dans Fetus bien sûr, les intentions sont brouillonnes, confuses et se percutent à la manière d'auto tamponneuses. Mais le réalisateur a des idées, lui, contrairement à d'autres.
Et puis, quel bonheur de constater qu'un jeune cinéaste ose enfin. Avec les moyens du bord, Brian Paulin ressuscite nos mémoires les séries B ou Z que nous avons tous aimé dans notre adolescence.
Je pense en premier lieu au cultissime Re-Animator qui, déjà, explorait l'idée d'une prolongation artificielle de la vie. Avec Fetus, Paulin nous sert sur un plateau une oeuvre hybride, à mi-chemin entre le gentil Re-Animator et le très méchant Black Past. Après ce film, Brian Paulin récidivera, toujours avec aussi peu de moyens, avec Bloodpigs, élu film le plus gore de l'année 2010 !
Il est clair que Fetus est loin d'être un chef d'oeuvre. Mais ne boudons quand même pas notre plaisir. Et réjouissons-nous d'avoir trouvé un jeune réalisateur qui va au bout de ses intentions, c'est-à-dire d'offrir un maximum de plaisir aux amateurs de gore. Pour cela, mon verdict sera très clément et ma note très surévaluée.
Note: 13/20