"Loin de la foule déchaînée"

Par Cinealain


Avec Carey Mulligan, Matthias Schoenaerts, Michael Sheen, Tom Sturridge,


Production Britannique et Américaine

Loin de la foule déchaînée est une adaptation du roman homonyme de Thomas Hardy.

Publié en 1874, apporte la notoriété au romancier. Il marque l'apparition dans son oeuvre de la région imaginaire du Wessex, calquée sur son Dorset natal. Publié pour la première fois en français sous le titre Barbara, au Mercure de France en 1901, Far from the madding crowd parut en Angleterre en 1874, sans nom d'auteur tant le roman était osé pour l'époque.

Dans la campagne anglaise de l'époque victorienne, une jeune héritière, Bathsheba Everdeene doit diriger la ferme léguée par son oncle.

Libre et indépendante, elle dirige l'exploitation avec dextérité et décide d'en assumer seule la gestion provoquant le doute et l'insatisfaction de ses ouvriers.

Résolue à se marier uniquement par amour plutôt que par un quelconque arrangement conventionnel, elle témoigne en plus de sa beauté d'une assurance et d'une autonomie qui séduisent rapidement le jeune, beau et honnête berger Gabriel Olak

Bahsheba va bientôt être tiraillée par deux autres prétendants.

L'histoire d'origine et les adaptations qui en furent tirées donnaient une place équivalente à chacun des trois prétendants de la jeune femme, le film de Thomas Vinterberg modifie quelque peu cet équilibre puisque l'accent est davantage mis ici sur la complicité entre Batsheba et le fermier Gabriel Oak, incarné par Matthias Schoenae rts.

Thomas Hardy fut par le passé adapté à plusieurs reprises notamment pour Tess d'Urberville qui connut plusieurs versions, cela fait un certain temps qu'une oeuvre de l'écrivain anglais n'a pas été transposée sur grand écran. En effet, si l'on écarte Tamara Drewe qui est une lointaine adaptation de Loin de la foule déchaînée , le dernier film marquant tiré d'un roman de l'auteur est Jude de Michael Winterbottom, en 1996.

Remettre au goût du jour l'écrivain était l'un des postulats de base du film comme le souligne le scénariste
David Nicholls : "Contrairement à Jane Austen, ou aux soeurs Brontë, Hardy n'a pas été au cinéma depuis très longtemps, si bien qu'on avait le sentiment que c'était le bon moment pour s'emparer de nouveau de cette histoire hors du commun. Certes, il s'agit d'un roman profondément victorien, mais il n'existe guère de personnages comme Batsheba, aussi fougueuse et déterminée, coûte que coûte, à rester libre. Les questions qu'elle se pose sont toujours d'actualité : comment une femme peut-elle rester indépendante et forte dans un monde où, contrairement aux hommes, ses mérites ne sont pas toujours reconnus ?"

pour rédiger le scénario de Loin de la foule déchaînée , suite à l'adaptation d'un autre roman de Thomas Hardy, Tess d'Urberville dont il avait justement signé le scénario pour une adaptation en téléfilm sur la BBC, et qui les avait littéralement impressionnés.

À l'origine, Loin de la foule déchaînée est l'initiative de deux producteurs, Andrew Macdonald et Allon Reich, à la tête de projets audacieux et variés de ces dernières années. Cette nouvelle production a constitué l'occasion pour les deux hommes de s'atteler à un genre d'histoire et une période précise rappelant les films de James Ivory, grand spécialiste de films se déroulant à l'époque victorienne.

Le film de Thomas Vinterberg est une nouvelle adaptation du livre. La plus connue reste Loin de la foule déchainée de John Schlesinger de 1967 avec dans les rôles principaux, Julie Christie, Alan Bates, Peter Finch et Terence Stamp.

Réalisateur danois, auteur du cultissime Festen qui lui a valu le Prix du jury au Festival de Cannes 1998, Thomas Vinterberg signe ici son troisième film en anglais après I'ts All About Love en 2003 et Dear Wendy en 2005. Faire une adaptation d'un roman de Thomas Hardy peut surprendre pour l'un des cinéastes fondateurs du Dogme 95. Aimant les prises de risques, le réalisateur s'explique : "J'aime m'aventurer dans de nouveaux territoires. Dans cette histoire, les personnages sont fascinants et les revirements de situation sont constants, et c'est ce qui donne lieu à une formidable dramaturgie, quelle que soit l'époque."

L'oeuvre de Thomas Hardy se déroule dans le comté mi imaginaire, mi réel du Wessex, renvoyant à la région du Dorset dans le sud-ouest de l'Angleterre où l'auteur a vécu.

Avec ce roman où les paysages occupent une place primordiale, les lecteurs ont alors découvert ce que l'on peut appeler "Le pays de Hardy".

Pour Thomas Vinterberg, il était donc important de tourner son film dans le Dorset afin de s'imprégner le plus possible de l'âme des paysages à l'œuvre chez l'écrivain anglais. Hormis quelques scènes mises en boîte à la Claydon House dans le Buckinghamshire, tout le film fut donc tourné intégralement dans le Dorset.

En tournant sur pellicule, Thomas Vinterberg tenait à conférer une esthétique particulière à son film où l'accent serait mis sur les couleurs. Surtout, ce dont ambitionnait le réalisateur était de retrouver l'aspect spectaculaire à l'oeuvre dans certaines grandes fresques cinématographiques comme le mentionne le chef décorateur Kave Quinn : "Thomas tenait à ce que les paysages et les personnages aient une dimension spectaculaire, proche de films comme Docteur Jivago ou 1900, avec des arrières-plans grandioses."

L'action du film se passe en 1880, soit en pleine époque victorienne. Pour autant, Thomas Vinterberg ne voulait pas réaliser un énième film sur cette période avec les traditionnelles robes à crinoline allant avec. Il fallait également éviter de proposer une image trop terne comme c'est souvent le cas avec ce genre d'histoire. Le réalisateur prend le contre pied de ce que le spectateur attend en proposant un film avec des couleurs chatoyantes rappelant les grandes heures du Technicolor. Quant aux tenues des personnages et notamment celui de Carey Mulligan, il a également été question d'en proposer une vision inattendue puisque cette dernière ne se sépare jamais de sa veste en cuir, signe de son indépendance.

Entre la finalisation du casting et le début du tournage, il s'est passé un certain laps de temps. Ainsi, entre le premier rendez-vous entre Carey Mulligan avec Thomas Vinterberg et le clap de début du film, dix mois se sont écoulés ce qui a permis aux acteurs de suffisamment se préparer pour leur rôle. Les comédiens se sont donc installés dans le Dorset où ils ont pris des cours d'équitation et d'élevage du bétail tout en se familiarisant avec les techniques agricoles du XIX ème siècle. Selon les personnages qu'ils jouaient, les acteurs se sont également acquittés de tâches spécifiques. C'est ainsi que Tom Sturridge s'est formé à l'escrime pendant que Carey Mulligan et Matthias Schoenaerts se sont habitués à s'occuper des troupeaux de moutons.

Pour figurer le domaine de Batsheba, l'équipe du film a tourné au sein de la Mapperton House, splendide bâtisse de l'époque victorienne, située près de Beamintser. Idéalement entourée de terres cultivables et de bois, le domaine comprend également sa propre église, une écurie, une remise à calèches, un pigeonnier et une cour.

La mise en scène, irréprochable, mais très conventionnelle ne rappelle en rien les précédentes réalisations de Thomas Vinterberg. Je pense à Festen, bien entendu, La chasse également mais également Submarino qui m'avait submergé d'émotions. Rien de tout cela ici.

Le scénario, trop linéaire n'offre pas l'énergie nécessaire pour une quelconque envolée. Le spectateur reste plongé dans un très beau livre d'images au beau milieu duquel se déroule une intrigue, qui, aujourd'hui semble dépassée. La condition féminine ayant enfin trouvée une place plus honorable dans nos pays occidentaux, pour le moins. Et c'est très bien ainsi.

Matthias Schoenaerts, enfin, au charisme détonnant, n'étonne plus mais séduit complètement.

Un beau film quelque peu trop lisse pour en sortir émerveillé.