Chappie

Chappie
Dans un futur proche, la population, opprimée par une police entièrement robotisée, commence à se rebeller. Chappie, l’un de ces droïdes policiers, est kidnappé. Reprogrammé, il devient le premier robot capable de penser et ressentir par lui-même. Mais des forces puissantes, destructrices, considèrent Chappie comme un danger pour l’humanité et l’ordre établi. Elles vont tout faire pour maintenir le statu quo et s’assurer qu’il soit le premier, et le dernier, de son espèce.

Chappie – 4 Mars 2015 – Réalisé par Neill Blomkamp
Qu'on l'apprécie ou qu'on le déteste, Neill Blomkamp fait parti des jeunes réalisateurs qui comptent, sur la scène du cinéma international. Depuis 2009 et son carton surprise « District 9 » j'apprécie énormément son travail. Il a su s'imposer avec beaucoup de brio dans un milieu très concurrentiel par une patte et un style qui lui est propre. Toutefois, il connaît quelques ratés ! Elysium est un semi-échec, à la fois public et critique que moi-même je n'ai pas apprécié. Le petit dernier « Chappie » aura quant à lui aussi divisé, sur l'histoire, le ton mais aussi sur les compétences d'un cinéaste qui serait « surestimé » !!!
Comme pour District 9 ou le point de départ était l'un de ses courts métrages, le réputé « Alive in Joburg ». Chappie prend aussi ses racines dans l'un de ses courts, le tout premier précisément et qui s'intitule Tetra-Vaal. En 1min 30 on voit déjà les prémices de son style et surtout les contours de ce qu'allait être en partie « Chappie », un film de SF au service de l'autre …
Johannesburg en Afrique du Sud est une ville en proie a une grande criminalité. Le contexte économique n'aidant pas, les violences se font de plus en plus vives, plus sanglantes et que cela soit membre de gang ou policier, le tribut est lourd en vie humaine. Une situation qui ne peut plus durer. C'est ainsi que les autorités font appel a l'entreprise dirigée par Michelle Bradley, la fabrique a robot « Tetra-Vaal ». Pourquoi ? Pour simplement crée un robot capable de les aider efficacement la ou c'est trop dur, mais aussi pour diminuer les morts dans la police. Et deux philosophie s'oppose a l’intérieur de cette usine, les « scouts » crée par Deon Wilson et le programme Original de Vincent Moore. Très vite ce furent les « scouts » qui eurent du succès. Plus précis, plus rapide, plus téméraire et potentiellement indestructible, ils s'acquittent admirablement de leurs taches. Poussé par le succès du travail de Deon, Tetra-vall ne cesse pas d'améliorer ces modèles et de contribuer au bien être de la population. Deon Wilson quant à lui espère passer a l'étape supérieure en créant la première intelligence artificielle et après bien des galères, il y est arrivé ! Son seul but, des a présent c'est de pouvoir le tester.
Il repense ainsi a un modèle de scout qu'il a envoyer a la casse car il était irréparable. Un robot parfait pour tester son IA mais hélas rien ne se passera comme prévu, car les membres d'un gang le kidnappe. Leurs buts étant de faire en sorte que Deon leur donne une télécommande capable d'éteindre les robots pendant leurs braquages, mais quand ils s’aperçoivent qu'il a un robot dans sa voiture, ils le forcent a le programmer pour les aider a commettre des crimes. Au pied du mur Deon utilise l'IA a peine crée et donne naissance à Chappie ….

Chappie
Le plus surprenant dans ce film au final, c'est que la SF n'est pas vraiment le point important du film car « Chappie » est différent des précédentes réalisation de Neill Blomkamp. Pourtant c'est bien le travail du sud-africain, avec sa générosité, son style et ses influences. Mais la différence n'est pas incompatible avec la cohérence qui le caractérise et c'est bien là l'essentiel. Alors que District 9 ou encore le bancal Elysium étaient tournés vers la SF, avec tout ce qu'il y a de plus exubérant comme des exosquelettes, des extraterrestres ou encore une station orbitale pour riche. Son nouveau film « Chappie » est plus terre a terre, Johannesburg dans le film n'a rien d'improbable par exemple et tout les éléments de SF y compris Chappie sont la pour servir des interrogations bien contemporaines. Ce conte aussi inattendu qu'agréable permet a Neill Blomkamp dans une logique imparable et en totale adéquation avec ce qu'il a fait précédemment de poser un regard critique sur notre monde mais surtout sur sa ville de naissance Johannesburg et son pays l'Afrique du Sud.
Comme lors de ses deux films précédents, Neill Blomkamp signe le script de son film. Plein de générosité et de passion, son histoire est parsemé d'influence diverses. Il brasse un éventail assez large allant de Masamune Shirow avec « Appleseed », a divers films de robots comme AI, I Robot, Short Circuit et Automata mais aussi le grand classique de Paul Verhoeven, l'intemporel « Robocop ». Jamais en panne d'inspiration, il ne fait pas l'erreur de trop en faire. Et tout ce qu'il en tire est retranscrit a l'écran avec beaucoup de justesse même si certains éléments sont du déjà vu. L'usine Tetravaal par exemple c'est l'équivalent de l'OCP de Robocop, le robot du personnage de Hugh Jackman c'est le ED-209, Chappie rappelle beaucoup le robot de « Short Circuit » et une partie de son design est directement inspiré des mechas de Appleseed ! Rien de gênant au final car c'est très bien digéré, Blomkamp nous le dégueule pas avec prétention en nous montrant son « égo » à l’œuvre mais bien pour servir son intrigue. Qui d'un point de vue SF nous transporte dans un futur ou l'IA fonctionnelle n'est pas une utopie, ou les androïdes sont légions mais ou le facteur humain est la plus grande des inconnus. Du simple quidam jusqu'à l'ingénieur Wilson, le genre humain n'est pas a la hauteur et il fait aussi preuve d'une grande immaturité devant un tel progrès.
Ceci est la partie visible du film, celle que l'on devine et qui saute aux yeux. Pourtant si l'on prend l'histoire telle qu'elle est, on est plus dans un récit qui rappelle Hellboy et le conte comme on le connaît que l'histoire de SF pure. Et tel le personnage de Mignola, l'androide « Chappie » est un enfant dans un monde qui n'est pas pour lui et c'est là que le film prend réellement toute son ampleur. Il casse le rythme avec le début du film pour basculer ensuite sur un rythme plus lent et parler du monde d'aujourd'hui. C'est bien sur par l'intermédiaire de Chappie que le réalisateur va développer plusieurs thèmes intéressants et universels, tout en restant très terre à terre. Blomkamp se concentre sur la naissance, l'évolution et les conséquences de l'arrivée de Chappie mais aussi a un niveau plus global sur les discriminations que subissent les minorités dans le monde.
Chappie
Si l'apparence de Chappie semble être celle d'un robot adulte et débrouillard, l'IA développée par Deon Wilson (Son créateur) et qu'il lui transmet, fait de lui un enfant. Un jeune droide surdoué mais aussi un mouton noir ! Une notion évoquée dans le film à maintes reprises et avec beaucoup de tendresse par Yolandi. Pour parler de la différence de Chappie mais aussi celle du couple qui l'éduque. On pourra constater que tout les référents adultes sont tous imparfaits, avec de solide défauts mais aussi avec une incapacité chronique a guider Chappie dans la bonne direction. Deon Wilson dans toute sa candeur ne pense qu'a lui et ne voit en Chappie qu'une expérience de plus. Appliquant avec tout le pragmatisme d'un scientifique son abécédaire de l'apprentissage. Hélas au passage Il oublie la particularité de son test ainsi que le monde dans lequel ils vivent. Tout le contraire de ses parents adoptifs Yolandi et Ninja. Ces deux ex musiciens pas gâtés par la vie font tout l'inverse de Wilson. Maladroitement ils le confrontent à l’extérieur, a la jungle de Johannesburg sans le préparer et le résultat est catastrophique. Maltraité, heurté et chahuté, sa confrontation fut un calvaire et les bénéfices proches du néant, Chappie perdit toute confiance vis a vis du monde mais aussi vis a vis d'eux, Yolandi mais surtout Ninja sont perdu devant cet enfant à part. Et c'est en partie grâce à ça que l'émotion émerge et se crée. De l'apprentissage a ses premières désillusions, on est touché, émerveillé ou encore terrifié par ce qu'il vit !
L'histoire si poignante soit elle, c'est aussi une allégorie des luttes contre les discriminations que subissent les minorités en Afrique du Sud et dans le monde. Symbolisé par le personnage de Hugh Jackman (Vincent Moore), ancien militaire au service d'un monde qu'il souhaite réactionnaire. Son but est d'imposer son immense machine de guerre mais devant l'efficacité des « scouts », il ne peut plus le développer et ses motivations a continuer malgré tout reste flou …. jusqu'à la création de Chappie. Mais pourquoi s'obstiner a vouloir imposer un robot forcément moins bon si ce n'est pour des considérations personnelles ? Car Moore et son Robot sont les symboles d'un monde qui va mal et replié sur lui même. Foncièrement totalitariste et hostile a toutes forme de progrès, il pourrait tout aussi bien être raciste, homophobe, transphobe et milité pour des partis réactionnaire, façon Tea Party américain tant son fanatisme est prononcé. Vincent Moore n'a qu'un seul but, c'est d'éliminer Chappie, qu'il considère comme une anomalie, une erreur de la nature …
La fin que je ne dévoilerai pas est logique et pleine d'espoir. Neill Blomkamp clôture son conte de SF avec ce qu'il faut de drame, d'émotion, de tension et d'humanité. Moderne dans son approche et surprenant dans son traitement, ce troisième film a hélas laissé beaucoup de monde sur le bord de la route. Notamment par une promotion inadéquate, vendant le film comme un pur moment d'action, alors qui n'en est rien. Toutefois on ne pourra reprocher au film de Blomkamp son intégrité, sa technique et une direction artistique irréprochable. Le récit est maîtrisé dans sa majeure partie, avec un rythme adéquat dicté par les codes du conte ! Auquel Blomkamp en tirera toute sa différence, entre la SF, le conte et le groupe de rap-rave Die Antwoord, le mélange est vraiment original. Les touches d'humour compensant l'univers dangereux que décrit le réalisateur. Et le montage si ce n'est quelque effet de transition un peu rude entre certaines séquences, il se tient bien. Comme les nombreux effets-spéciaux du film, que l'on doit en partie aux artistes de Weta Workshop. La motion-capture qui a été utilisée pour créer Chappie est bluffante, ce qui n'est pas étonnant vu le niveau de cette entreprise. Sharlto Copley y est aussi pour beaucoup car il donne vraiment « vie » a Chappie et l'intégration au niveau visuel est très réussi. Ce qui sonne juste par rapport au travail du chef-op attitré de Blomkamp, le talentueux Trent Opaloch.

Chappie
Les bémols que j'ai relevé dans le film viennent de l'histoire. Il y a pas mal d'incohérences qui font grincer des dents, notamment au niveau de l'usine Tetravaal. Souvent affirmé comme surprotégé, les deux personnages que son Moore et Wilson font un peu ce qu'ils veulent sans que cela ne surprenne personne ! Ce n'est jamais surveillé ni protégé ! Le gang de Ninja est Yolandi qui relâchent Deon alors qu'il peut partir et les dénoncer a la police ou encore le coup du casque Neuronal qui marche sur une machine. On peut aussi ajouter des personnages qui ne sont pas très bien écrit, voir inexistant et qui font un peu peine à voir. Ensuite je n'ai pas de sympathie particulière pour la bande originale qui me semble un peu trop monocorde même si certaines chansons de Die Antwoord sortent du lot.
Le film peut aussi se targuer d'un casting surprenant. Bon y retrouve le désormais habitué, l'excentrique et génial Sharlto Copley qui est un CHAPPiE hors-norme, le contraire de Dev Patel et de Sigourney Weaver, totalement transparent et sans nuances mais ils ne sont pas aidés par des personnages peu travaillés. Jose Pablo Cantillo et Brandon Auret ont des rôles à part qui ne servent à mon sens que de faire valoir, même si il faut leurs reconnaître une certaine présence. Le bad guy du film est assuré par monsieur Hugh Jackman ! Avec un look improbable il m'a assez perturbé car pendant une partie du film, on ne comprend pas sa motivation et comme Jackman n'a pas était très fin, c'était assez pénible mais quand on comprend, le personnage prend de l'ampleur et même si il en fait un peu trop, cela colle à merveille a ce fanatique. Mais le plus surprenant reste la découverte de Ninja et Yolandi Visser, deux acteurs amateurs, membre du groupe de rap-rave Die Antwoord. Ils jouent en quelques sortes leurs propres rôles et même si ils en font énormément, cela sonne toujours vrai, ce qui permet de croire en ces deux ex musiciens aux destins si particuliers.
Un conte à la croisée des chemins !

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