Jupiter Ascending

Par Inglourious Cinema @InglouriousCine
Née sous un ciel étoilé, Jupiter Jones est promise à un destin hors du commun. Devenue adulte, elle a la tête dans les étoiles, mais enchaîne les coups durs et n'a d'autre perspective que de gagner sa vie en nettoyant des toilettes. Ce n'est que lorsque Caine, ancien chasseur militaire génétiquement modifié, débarque sur Terre pour retrouver sa trace que Jupiter commence à entrevoir le destin qui l'attend depuis toujours : grâce à son empreinte génétique, elle doit bénéficier d'un héritage extraordinaire qui pourrait bien bouleverser l'équilibre du cosmos…

Jupiter Ascending – 4 Février 2015 – Réalisé par Andy et Lana Wachowski
Si Andy et Lana Wachowski n'ont plus connu de gros succès depuis Matrix Révolutions, ils ne se sont jamais imposés de limites et chaque nouveau projet est la promesse d'une surprise garantie. Ce qui fait d'eux des réalisateurs à part sur la scène hollywoodienne toujours plus prompt à jouer la sécurité que l'audace, une qualité dont ne manque pas les Wachowski, ce qui a permis de donner Speed Racer, Cloud Atlas et tout récemment Jupiter Ascending. Un space-opéra gargantuesque, un conte de fée magique croisé à une Odysée humaine hors-norme …
La rencontre des parents de Jupiter ne manqua pas de magie, ni de romantisme, le coup de foudre instantané entre deux personnes aux caractères opposés. Hélas ce qui devait être une vie comme les autres, se transforma en cauchemar pour Aleksa. Le père de Jupiter se fit tuer lors d'un cambriolage et elle dut fuir son pays natal la Russie. En fuite sur un immense cargo, a mi chemin entre l'ouest et l'est, elle mit au monde une fille sur l'eau, entouré de proches, un bébé qu'elle nommera Jupiter ! Elle grandira toujours avec un œil tourné vers les étoiles comme faisait son père, espérant la tête penchée sur une cuvette qu'un avenir meilleur l'attend, elle, la femme de ménage. Ce qui ne tardera pas à venir, car Jupiter se trouvera être la pièce maîtresse d'une guerre impliquant la fratrie des Abrasax ou elle seule pourra s'interposer face au destin funeste de la planète Terre.


Caine Wise est un guide de choix pour Jupiter mais aussi pour nous simple spectateur. Car si le film et le récit sont d'une facture plus classique il n'en est pas moins riche. En plus les Wachowski ne sont pas des simples réalisateurs, ce sont des créateurs et des conteurs d'histoires. Un talent qui va s'exprimer ici avec une histoire qui leurs ressemblent et qui prend racine aussi bien dans le conte de fée, que dans l'épopée mythologique ou encore dans le film de SF ! Pour construire le récit, les Wachowski empruntent énormément au conte de fée, tant dans sa structure que dans la caractérisation des personnages.
L'histoire de Jupiter est celle d'une Cendrillon des étoiles ! Mais aussi celle d'une belle tombant amoureux de sa bête ou encore celle d'une Blanche-Neige échappant a l'influence malfaisante d'une famille qui ne lui veut que du mal. Et c'est avec ce mélange étonnant que le film trouve son rythme de croisière, il y tire ses nombreuses qualités mais aussi l'un de ses défauts, a savoir un cheminement relativement classique ! Car la progression de Jupiter dans l'intrigue est assez linéaire. Cependant cela reste terriblement passionnant, grâce à un univers riche en surprise mais aussi par la cohérence qu'il engendre avec l'ensemble de leur filmographie.

Pour moi c'est vraiment le point fort du long-métrage. L'esthétique globale est sublime et réserve des surprises à chaque lieu visité. Quelque soit la demeure, celle de Balem, de Kalique ou de Titus, les designs diffèrent et rendent a merveilles de l'identité du personnage en question. L'industrialisation massive de Jupiter (La planète) toutes dans des tons très sombres pour Balem le despote, un vaisseau très grandiloquent pour Titus le séducteur et enfin une planète et un palais très floral, aux tons pastels et rassurants pour Kalique. Entre des influences sortant tout droit de la Renaissance et de l'art baroque, c'est un émerveillement pour les yeux même si parfois on frôle la surenchère, presque logique pour des personnages divins. Mais ça laisse entrevoir des possibilités complètement illimités car au delà de deux planètes hormis la Terre, on a encore rien vu ! Une sensation qui continue quand on se penche sur les vaisseaux spatiaux, tous plus grands les uns que les autres ! Le plus intéressant d'un point vue visuel étant les petits navettes de combats, module de combat compact ou armure de combat énorme et rapide qui peut se transformer en espèce d'oiseau de métal se déployant avec majesté. On peut aussi ajouter a tout cet univers que nous offres les Wachowski, cet immense bestiaires fait d'hybrides, de personnages anthropomorphique, de lézards ailés, d’androïdes, de petits hommes gris et le tout s'en presque avoir cette impression de déjà-vu fatale a toutes créations d'envergures !!!


Et si la direction artistique de Hugh Bateup est irréprochable, comme les responsables des décors ou encore des costumes, la réalisation des Wachowski est une nouvelle fois de plus, un modèle d'inventivité. Du début à la fin, c'est très bien rythmé, laissant suffisamment de place aux deux personnages principaux pour exister, mais aussi pour apprécier l'élégance et la finesse de la partition de Michael Giacchino ! Certains l'accuseront d'etre un peu longuet, voire fouillis mais il faut bien présenter ce qui se dresse devant nous et à ce jeu là, c'est bien fait. Surtout dans l'apport des personnages extra-terrestres dans l'environnement terrien car ils dépassent les lois de cet environnement.
Ce qui donne une sensation de liberté assez agréable et aussi un terrain de jeu ludique car si les scènes d'actions vraiment dantesques se comptent au nombre de 2, elles n'oublient jamais d'utiliser le décor à leurs avantages. Ce que l'on sentira du début à la fin, de la plus minimes des scènes d'actions jusqu'au climax final, ce sont des models de mise en scène qui ne recule devant rien et aux effets spéciaux d'une grandes qualités ! Mes préférés étant celle ou Caine utilise ses bottes anti-gravité, pourquoi ? Car elles mettent en exergue des combats qui sont littéralement en 3 dimensions.


Mais le film ne s’arrête pas à une simple coquille, jolie et rythmée, c'est aussi un long-métrage remplit des thèmes cher a Andy et Lana Wachowski. Comme lutter contre l'ordre établi et chercher à être libre, a ne pas être entravé par quoi que ce soit. C'est une nouvelle charge contre le modèle de société « capitaliste » ; contre ce consumérisme omniprésent qui nous obsède et qui peut annihiler toute capacité de réflexion. Le produit devenant progressivement l'humain, le dominant devient le dominé et ainsi de suite. C'est un point de vue qu'ils expriment dans Matrix, dans Cloud Atlas et le segment Sonmi-451 ou encore ici avec le principe de « Moisson » et de sérum tiré de la matière humaine. Mais le film pousse aussi au dépassement, au droit a la différence, au changement de vie, symbolisé en partie par Caine Wise (La différence), par Jupiter Jones qui cherche l'ascension, vers une vie meilleure, tout en faisant des ponts avec les diverses œuvres réalisées les Wachowski en personne.
Au final j'ai beau avoir été enthousiasmé par Jupiter Ascending, je pense quand même qu'il aurait pu être encore mieux et surtout beaucoup moins confus. Coincés par une ambition démesurée et par la volonté de livrer a tout prix une œuvre dense, riche et complexe, les Wachowski ont surchargé leurs films d'immensément de détails, comme si la peur de ne pas pouvoir faire une suite les avait paralysés. Et on se dit que certaines choses auraient pu attendre, d'autre non, pour mieux les développer mais hélas il n'en est rien, ce qui laisse un léger goût d'inachevé mais qui une fois digéré passe mieux, enfin seulement pour ceux qui n'auront pas décroché ! Et un autre point fâcheux qui n'aide pas le film, c'est la faiblesse du principal antagoniste du film. Balem est une caricature mal dégrossi d'un parrain de la mafia spatiale, il n'est pas très menaçant, il ne semble jamais savoir ce qu'il souhaite et oh mon dieu que ses crises de colère sont risibles ! Un méchant très mal écrit et c'est assez étonnant venant des Wachowski …


Pour finir, un petit mot sur l'équipe du film. Le casting se défend même si au premier coup d’œil on peut être sceptique sur certains choix. La belle de ce conte est jouée par Mila Kunis, une actrice plus habituée des comédies mais qui sait y faire, notamment pour dédramatiser la situation ubuesque dans laquelle elle est engagée ! Un humour et un charme doublé d'un vrai tempérament qui font de son personnage, une femme forte qui ne se laisse pas faire. Mon coup de cœur va pour une fois à Channing Tatum qui incarne un hybride appelé Caine Wise ! Bête insoumis mais aussi un immense chasseur, il donne beaucoup de corps a ce personnage fracassé dont l'intensité n'a d'égal que la coolitude de ses bottes anti-gravité. Le gros point faible hélas vient non pas de la présence d'Eddie Redmayne en Balem Abrasax mais bien d'une interprétation complètement foireuse ! Toujours dans la surenchère, il n'arrive jamais a nous faire croire ce qu'il dit ou ce qu'il est sensé représenté. Les seconds rôles bien qu'un peu primaires dans leurs développements, se démarquent suffisamment pour exister. Je pense bien sur à Douglas Booth dans la peau du charmeur Titus Abrasax, à Tuppence Middleton dans la peau de la vénéneuse Kalique Abrasax ou encore le sympathique Sean Bean qui pour une fois SPOILER ne meurt pas !!! 
Ce n'est pas parfait, on frise parfois l'indigestion mais c'est le prix à payer pour avoir droit à quelque chose d'original, d'ambitieux et divertissant !