Il y a une quinzaine de jours le groupe Future Islands, originaire de Baltimore, passait à la Cigale. Si vous ne les connaissez pas, vous pouvez encore vous rattraper. Ce trio (Samuel Herring au chant, William Cashion à la basse et J. Gerrit Welmers aux claviers) formé en 2006 délivre une pop accessible mais pas commerciale, propulsée par des synthés accrocheurs et une basse puissante (une vraie hein pas un truc fait par ordinateur).
Ils en sont déjà à leur quatrième album, mais c'est avec le dernier sortis en 2014 et intitulé Singles que leur notoriété commence à grimper. Notamment grâce à une fameuse performance au Late Show de David Letterman qui a fait le buzz.
Moi je l'avoue, je ne les ai découverts que l'année dernière. Mais quelle découverte. Singles est un très bon album, dont chaque chanson relègue les tubes pop qui passent à la radio au rang de m**de qui leur va bien. On passe du single qui reste dans la tête avec Seasons (Waiting On You) au magnifique et mélancolique Fall From Grace. Ce concert m'a permis de découvrir également leur deuxième album datant de 2010, In Evening Air. Toujours pop mais plus violent, plus direct, cet album est une bonne claque musicale malheureusement restée peu connue.
Mais au-delà d'une musique puissante et accrocheuse, le groupe se distingue par son élément le plus important: Samuel Herring, son chanteur et front man. En écoutant leurs albums, sa voix surprend, d'abord. Puis on s'y habitue et on se rend compte que c'est de là que vient tout le charme du groupe. Herring nous attire avec lui dans sa musique, grâce à sa voix grave et magnifique (il pourrait facilement se reconvertir dans un groupe de métal) et à ses paroles simples mais efficaces. Il dégage une énergie et une sincérité qui ne peuvent que toucher. Ce qui est confirmé et même amplifié quand on le voit en live. Jusqu'au 2 avril, je n'avais vu des concerts du groupe que sur Youtube. Et déjà je m'étais rendu que quelque chose d'inhabituel habitait cet homme. Sa façon improbable de danser, cette voix qui peut partir dans tous les sens à n'importe quel moment et ce regard si fort. J'attendais donc beaucoup de ce concert à La Cigale. Et je n'ai pas été déçu. Petit résumé.
La première partie, assurée par Chiffon ( https://chiffon.bandcamp.com/album/marble) est loin d'être mémorable et tout le monde attend la suite. Bien deux heures après l'heure indiquée sur les billets, le groupe arrive donc enfin sur scène. Ça commence avec Give Us The Wind, que je ne connaissais pas, mais tout le monde est déjà à fond. Le groupe enchaîne avec Back In The Tall Grass, que je connais déjà beaucoup mieux, chanson mid-tempo qui semble ne jamais vraiment commencer, ce qui lui donne une sensation toute particulière. Les trois musiciens sont tranquilles, bougent très peu et se contentent de jouer leur partition au mieux tandis que la foule danse. Mais à ce moment, des goûtes de sueur coulent déjà du chanteur. Herring ne chante pas, il est possédé. Tout son corps vibre au son de la musique, ne laissant personne indifférent. Il combine les différents gimmicks de danse qu'on lui connait bien (dont la magnifique danse de jambes du Moskau de Dschinghis Khan http://peffou.free.fr/gif/Moskau.gif) à une mise en scène des chansons parfois délirante, parfois émouvante (le regard vers le ciel lors de A Song for Our Grandfathers). Une ou deux fois, il s'agenouille et se met à pleurer. On ne sait plus dans ces moments où est la sincérité et où est le jeu. Qu'est-ce qui est vrai, qu'est-ce qui est faux dans ce qu'Herring nous montre de lui ? Mais même si c'est faux, tout le monde est convaincue, dont moi, et chaque fois que le chanteur montre un signe de faiblesse sentimentale, toute la salle se met à crier pour le soutenir. Les chansons plus pop et dansantes, comme Balance ou Spirit, on un succès énorme et personne ne peut s'empêcher de bouger. Le rappel sur la grandiose Vireo's Eye et la très calme Little Dreamer finissent d'achever tout le monde. Le concert fut un peu court (1h30 pas plus) mais intense. On se rappelle longtemps des regards qu'adresse le chanteur à la foule, fixant parfois une seule personne pendant un certain temps, comme pour traverser son âme. Future Islands ne produit peut-être pas la musique la plus originale du moment, mais a su se créer une réelle réputation de donneurs de concerts mémorables , qui est justifiée je vous l'assure.