Chopper (L'histoire vraie du plus grand criminel australien)

Par Olivier Walmacq

genre: drame (interdit aux - 16 ans)
année: 2000
durée: 1h34

l'histoire : Mark Chopper n'a pas eu une enfance facile, entre une mère dévote et un père qui n'aime pas beaucoup qu'on lui résiste. Aussi pour s'affirmer, il rêve depuis ses plus tendres années de devenir un vrai dur, un criminel de la pire espèce, de ceux dont on parle dans les journaux. 

La critique :

En France, on se souvient encore de Jacques Mesrine, un criminel notoire, tristement célèbre pour son statut d'ennemi public n°1 auprès de la police judiciaire. Ce voyou hors-norme, se moquant et ridiculisant à la fois la justice et la police française, n'est évidemment pas le seul à avoir joué les trouble-fêtes et les histrions de service. A l'étranger, d'autres psychopathes ont eux aussi marqué les esprits.
C'est par exemple le cas de Mark Chopper Read, un criminel australien, décédé en 2013, à l'âge de 59 ans. Sa mort serait presque passée inaperçue si ce scélérat n'avait pas fait l'objet d'un film, intitulé Chopper, et réalisé par les soins d'Andrew Dominik en 2000.

Ce long-métrage retrace évidemment la vie de ce renégat en se basant notamment sur les romans écrits par Mark Chopper lui-même, et auteur de plusieurs best-sellers. Au niveau de la distribution, le film ne réunit pas vraiment d'acteurs très connus. Seul Eric Bana, dans le rôle de ce prisonnier rétif, aux pulsions incontrôlables et incoercibles, fait figure d'exception.
Attention, SPOILERS ! 
En voulant s'imposer comme le caïd dans le quartier de haute sécurité d'un pénitencier australien, où il est incarcéré pour avoir monté un attentat contre un juge, Chopper assassine Keithy George. Cet incident, très courant en prison, va être un évemenent capital dans le déroulement de sa vie.

A la fois trahi, craint et acclamé par des milliers de fans à travers le monde, Chopper nous mène par le bout du nez à travers son histoire. Il ment comme il respire, charitable au tempérament chaud, ce tueur en série peut tourner toute une situation en sa faveur et peut se justifier sans être débusqué ni cerné dans sa propre mythomanie manipulatrice. Présenté en compétition dans différents festivals, le film d'Andrew Dominik va rapidement se tailler une certaine réputation auprès des médias, des critiques et de la presse cinéma. Mieux encore, Chopper crée la sensation et une certaine polémique au festival de Stokholm et au festival de Cognac où il remporte plusieurs récompenses.
Pourtant, le réalisateur, Andrew Dominik, ne dispose pas d'un très gros budget.

Il doit alors composer avec les moyens du bord, ce qui ne se ressent absolument pas à l'écran. Au contraire, le long-métrage se distingue par une mise en scène soignée, appliquée et par plusieurs séquences millimétrées, s'acharnant à suivre et éventuellement à comprendre le point de vue de son personnage principal. Ainsi, la première partie du film, qui se déroule presque exclusivement dans un pénitencier hautement surveillé, prend la forme d'un quasi documentaire.
Dans Chopper, les personnages secondaires ne présentent presque aucun intérêt. Tout du moins, ils ne sont que des individus lambdas, des petites frappes et de vulgaires quidams, destinés à servir d'appâts à Mark Chopper.

En l'occurrence, le portrait de ce prisonnier musclé, tatoué et charismatique est pour le moins retors et complexe. En effet, Andrew Dominik nous présente un psychopathe en puissance, d'une humeur labile, tantôt sensible et limite débonnaire, tantôt ultra violent et sanguinaire. Narquois, d'une intelligence redoutable, paranoïaque, manipulateur et mythomane, Mark Chopper semble être le seul à connaître réellement la vérité et la réalité de ses actes souvent barbares et criminels.
D'ailleurs, Andrew Dominik ironise. C'est par exemple le cas lorsque Chopper doit raconter et expliquer le meurtre de Sammy le Turc. Les flics doivent alors composer avec plusieurs versions des faits. Dans un premier temps, la version du meurtre tourne au véritable vaudeville.

Puis, repoussé dans ses derniers retranchements, Chopper raconte un version beaucoup plus mélodramatique. Enfin, à un autre moment, le prisonnier se fait presque passer pour une victime alors qu'il est le responsable de cet assassinat dans les règles. Une fois en liberté, Chopper se transforme en redoutable prédateur. En prison, il était une sorte de guide, de modèle et même un parangon d'insubordination contre l'autorité judiciaire. A l'extérieur, Chopper nourrit également de grandes ambitions en venant titiller la mafia et les grands noms du banditisme.
Impavide, il n'hésite pas à attaquer frontalement certains grands chefs omnipotents, pourtant redoutés par les voyous les plus imprudents. Dans cette seconde partie du film, Chopper se transforme en une sorte d'animal brutal, qui cogne et rudoie sa petite amie. Retour à la case prison.

Avec les années, Chopper est devenu une star et une célébrité auprès des médias. Sa détention ressemble à un véritable Empyrée terrestre tant le prisonnier suscite à la fois l'admiration de ses comparses et de ses nouveaux matons. Mieux encore, l'intéressé écrit désormais des romans, des opuscules retraçant sa vie de renégat. Pourtant, ce n'est pas la presse qui se sert de lui à des fins mercantiles, mais l'inverse. Pour Mark Chopper, c'est à nouveau l'occasion de faire parler de lui dans les journeaux.
Contre toute attente, Andrew Dominik parvient à rendre ce malade mental terriblement attachant ! Si le film ne manque jamais d'humour, il pose néanmoins tout un tas de questions sur ce criminel devenu populaire. Le long-métrage interroge notamment sur le pouvoir médiatique, notre admiration envers ce genre de psychopathe qui brave tous les interdits ; et sur notre société apathique, anomique et dépassée par la violence qu'elle engendre. Sur ce dernier point, le film propose plusieurs séquences assez déroutantes et sanglantes. C'est par exemple le cas lorsque Mark Chopper se découpe et s'arrache la quasi totalité de son oreille devant les yeux médusés de quelques prisonniers.
Dans son style, le film est parfois surréaliste et cherche clairement à décontenancer le spectateur. Paradoxalement, le long-métrage y perd parfois en fluidité et finit aussi par agacer. Néanmoins, le long-métrage peut s'appuyer sur l'extraordinaire performance d'Eric Bana, totalement investi dans son personnage.

Note: 15/20

 Alice In Oliver