La Petite Boutique des Horreurs - 1960 ("Feed Meeeeeeeeeee !")

Par Olivier Walmacq

genre: comédie noire, horrifique, épouvante
année: 1960
durée: 1h10

l'histoire : Le jeune Seymour, employé d'un minable fleuriste, est propriétaire d'une mystérieuse plante qu'il a baptisé Audrey Junior par amour pour Audrey, sa jolie collègue de travail. Mais la plante se nourrit de sang humain, parlant pour réclamer sa nourriture et grandissant de façon inquiètante : elle devient très vite une attraction touristique. Bientôt, Seymour est obligé de lui fournir de nombreuses victimes et se retrouve pourchassé par la police

La critique :

C'est à partir de 1955 que Roger Corman, réalisateur et producteur, débute sa carrière au cinéma. Roger Corman va essentiellement se spécialiser dans les productions indépendantes et donc dans les séries B. Tout au long de sa carrière, il va refuser d'adhérer au système hollywoodien qu'il exècre et vitupère. Paradoxalement, le cinéaste va lancer de nombreux talents, notamment Jonathan Demme, Ron Howard, Joe Dante, James Cameron, ou encore Francis Ford Coppola.
C'est ainsi qu'il se taille une réputation de réalisateur prolifique, pour le meilleur mais aussi pour le pire. Entre autres, on lui doit plusieurs adaptations d'Edgar Allan Poe. 

Le Corbeau et La Chute de la Maison Usher sont considérés comme des films cultes. Hélas, Roger Corman va aussi produire et réaliser de nombreux nanars. Certains sont même classés parmi les pires abominations de l'histoire du Septième Art. C'est par exemple le cas de It Conquered The World. En 1960, Roger Corman tourne La Petite Boutique des Horreurs en l'espace seulement de deux jours. Doté d'un budget limité (seulement 27 000 dollars) et pressé par les producteurs, Roger Corman tourne dans l'urgence mais avec une certaine célérité.
Au niveau de la distribution, cette comédie horrifique réunit Jonathan Haze, Jackie Joseph, Dick Miller et Jack Nicholson. A l'époque, ce dernier n'est pas encore la star qu'il va devenir par la suite. Pourtant, il est amusant de voir l'acteur en gros plan sur l'affiche du film.

Au départ, la réalisation de La Petite Boutique des Horreurs tient sur un pari ridicule. Gene Corman, le frère de Roger, le défie de filmer un long-métrage à partir d’un ancien décor recyclé figurant une devanture de magasin. Pari tenu. Et peu importe si le film est médiocre. En l'occurrence, La Petite Boutique des Horreurs fait partie des bons crus de Corman.
Par la suite, le film sera même considéré comme un classique de la comédie horrifique. A défaut d'être un grand film, La Petite Boutique des Horreurs se laisse regarder avec un certain intérêt. Attention, SPOILERS ! Le jeune Seymour, employé d'un minable fleuriste, est propriétaire d'une mystérieuse plante qu'il a baptisé Audrey Junior par amour pour Audrey, sa jolie collègue de travail.

Mais la plante se nourrit de sang humain, parlant pour réclamer sa nourriture et grandissant de façon inquiétante : elle devient très vite une attraction touristique. Bientôt, Seymour est obligé de lui fournir de nombreuses victimes et se retrouve pourchassé par la police. Lorsqu'un petit commerce devient une entreprise fleurissante (c'est le cas de le dire...), tel est le thème principal de La Petite Boutique des Horreurs. Notre plante vorace et carnivore va révéler toute la couardise et l'esprit de lucre qui règnent autour de cette vaste entreprise.
Tous les personnages de cette comédie sont des êtres cupides, mercantiles et prêts à sacrifier leur propre mère pour l'appât du gain.

Ce qui explique pourquoi il n'y a pas vraiment de héros, ni de personnages qui se détachent particulièrement dans cette comédie qui fait (parfois) mouche. La star du film, c'est évidemment la plante de service, assez volubile, il faut bien le dire, et écholalique, avec ses "Feed Meeeeeeeeeeee ! ", qu'elle ressasse en permanence. Incontestablement, Roger Corman possède un concept en or et assez amusant. Hélas, le réalisateur et producteur ne l'exploite pas toujours à sa juste valeur.
Le caractère volontièrement outrancier de cette comédie finit par lasser. Si certains gags sont réussis, d'autres sont assez lourdauds et passent à côté de leur cible. A la rigueur, le seul protagoniste qui se démarque un peu, est une sorte de bénêt et de nigaud du village. Ce personnage candide va devenir l'instrument criminel de notre plante monstrueuse et exerçant une fascination hypnotique.

Au niveau de la mise en scène, le film fonctionne comme une pièce de théâtre. Roger Corman ne s'embarrasse pas avec les détails superflus. Le film va clairement à l'essentiel. Quant à l'interprétation, elle est loin d'être irréprochable. Certains personnages sont beaucoup trop caricaturaux. Ensuite, certains acteurs ne délivrent pas non plus un grand numéro.
Pourtant, la magie fonctionne par instants. Cette farce horrifique n'en demeure pas moins sympathique, à défaut de nous transcender sur sa courte durée (à peine une heure et dix minutes de bobine). Curieux que ce film ait engendré un tel succès et soit devenu cet objet de culte par la suite. Néanmoins, on reconnaît bien le style de Corman, à savoir cette capacité à tourner et à mettre en boîte une pellicule en moins de 48 heures.

Note: 13/20

 Alice In Oliver