Réalité est la dernière curiosité de Quentin Dupieux, cinéaste français à l’imagination débordante. Un film intelligent, fidèle à l’univers déjanté du réalisateur. Deux mots pour en parler.
Quentin Dupieux, aussi connu dans le monde de la musique sous le pseudonyme de Mr Oizo, fait partie de ces cinéastes, ou plutôt de ces artistes, dont on attend toujours avec impatience et curiosité les nouvelles œuvres. Il y a déjà près de cinq ans, il usait des codes du thriller pour conter un récit autant barré qu’innovant. L’histoire de ce pneu de voiture, devenu serial killer, errant dans le désert et séduit par la beauté sensuelle de Roxane Mesquida, nous avait à la fois amusé et épaté par sa maîtrise et son génie. Et c’est avec cette même liberté que Quentin Dupieux a écrit puis tourné Réalité, un « film choral » où cette fois Alain Chabat tente d’enregistrer le cri de douleur parfait qui vaudrait à son producteur « l’Oscar du meilleur gémissement« , et où une petite fille trouve dans les entrailles d’un sanglier une cassette VHS bleue.
Tout le monde pourrait écrire et filmer n’importe quoi. Pourtant, ce qui pourrait paraître n’avoir aucun sens, sert ici plusieurs causes : tout d’abord, critiquer intelligemment le processus de production hollywoodien, nuisance évidente à la création; ensuite, dépasser les limites de la narration et de l’inventivité, toujours avec la même intelligence dans la réalisation. En apparence Réalité semble être un vrai sac de nœuds, sans logique, ininterprétable, futile. Mais le scénario, parfaitement entremêlé, se dénoue, certes avec le même grain de folie, mais surtout avec maestria. Toujours intriguant, l’œuvre de Dupieux amuse, souvent fascine, et n’en devient jamais lassante, ou ennuyeuse. Le spectateur se retrouve, quasi-littéralement, impliqué dans ce jardin surréaliste, proche du rêve ou parfois même du cauchemar, au point d’en sentir lui-même la déroute, ou d’être imprégné par la même confusion émanant de l’oeuvre. Une fois de plus, Quentin Dupieux bouscule les convenances cinématographiques et les limites de la narration et y apporte une dimension novatrice, avec une étrange subtilité et beaucoup de créativité. Vous n’en ressortirez pas indemnes.