Ecrire un court-metrage – part 1

Par William Potillion @scenarmag

Cette nouvelle série d’articles vise à vous donner des conseils pour écrire un court-métrage. Nos sources sont essentiellement ce qui se pratique outre-atlantique. En Europe, nos conseils peuvent peut-être prêter à polémique.
Nos articles concernent les scripts d’au maximum 30 pages (environ une trentaine de minutes si vous avez bien formaté votre scénario). Deux raisons à cela : au-delà de trente pages, vous aurez besoin d’une intrigue secondaire afin de maintenir l’intérêt du lecteur (sachant que vous n’avez matériellement pas le temps dans un court-métrage d’ajouter des intrigues secondaires ou des B-Stories) ; les festivals programment rarement des courts de plus de trente minutes.

Dans Le Vagabond de 1915, Charlot sauve une jolie jeune fille menacée par trois voleurs. Pour le remercier de son geste désintéressé, le père de la jeune fille offre un travail dans sa ferme à Charlot. Mais celui-ci ne connaît rien aux travaux de la ferme et enchaîne les gaffes.
Puis les trois voleurs reviennent rôder près de la ferme et propose à Charlot de voler l’argent du fermier et de partager le butin. Faisant mine d’accepter mais loyal envers le fermier, Charlot prévient ce dernier du complot.
Blessé au cours de la tentative de vol, Charlot est soigné par la jeune fille dont il est follement amoureux. Mais celle-ci ne partage pas son sentiment et lorsque le prétendant légitime se présente, Charlot laisse un mot et s’en va.

Le Vagabond de Chaplin illustre les caractéristiques des premiers courts du cinéma. Un personnage ordinaire pris dans un filet d’événements extraordaires parvient à surmonter les épreuves et à vaincre son antagoniste d’une façon passionnante et étonnante.
Nous nous limitons aux récits mais d’autres types de courts sont possibles (Le chien andalou de Bunuel et Dali par exemple) ainsi que les films de propagande.

Les films d’animation (5 à 8 minutes généralement) lorsqu’ils sont narratifs, c’est-à-dire qu’ils possèdent un protagoniste dont la personnalité a été travaillée (qu’elle que soit la forme que ce dernier emprunte, souris ou autre) et qui a un objectif à accomplir entrent dans les conseils que nous vous donnerons au cours de cette série d’articles.
L’intrigue se développe donc autour des efforts faits par le protagoniste pour réaliser son but alors qu’il en est empêché par la situation ou habituellement un antagoniste. Ce type d’intrigue où le héros se bat pour atteindre son but abonde d’actions et de conflits. L’accent n’est donc pas mis sur le personnage (son arc dramatique n’est pas considéré) mais plutôt sur le comique des situations censé provoquer le rire du lecteur.

Il nous faut préciser que l’on ne peut pas réellement vivre du court-métrage. De nombreux festivals en Europe et ailleurs font la promotion du court-métrage mais cela nourrit peu les auteurs. Cependant, surtout en Europe, d’ailleurs, le court-métrage continue à prospérer et ne doit donc pas être méprisé.
D’autant plus que des initiatives vers une reconnaissance du court-métrage (voire même une renaissance) sont de moins en moins frileuses en termes de retombées économiques.
En 1965, Paris vu par… a réuni les courts-métrages de six réalisateurs de la Nouvelle Vague : Jean Douchet, Jean Rouch, Jean-Daniel Pollet, Éric Rohmer, Jean-Luc Godard et Claude Chabrol.
Evénement rare mais qui prouve que tout est possible. Une chose est sûre cependant : l’intérêt du public pour le court-métrage ne s’est jamais fait aussi fort que ces dernières années. Raison suffisante pour se lancer dans l’aventure, à notre avis (surtout si votre budget est ridicule).

Peut-on vraiment parler d’une différence entre un long métrage et un court-métrage ?
Dans un long, le lecteur s’attend à des développements assez poussés des personnages, l’intrigue est certainement plus complexe, une ou plusieurs intrigues secondaires sont à l’œuvre et généralement l’histoire est découpée selon une structure en trois actes (ce n’est évidemment pas la seule structure possible).
La problèmatique d’écriture d’un court-métrage cependant ne possède pas son propre langage. Elle ne refait pas le monde, elle le simplifie tout simplement et octroie une liberté d’invention qu’un long parfois ne peut s’offrir.

Cette simplification (qui ne signifie pas que la qualité sera moindre) consiste principalement en un nombre de personnages plus restreint (habituellement trois ou quatre) et une seule intrigue (il n’y a matériellement pas le temps d’en implanter plusieurs).
Les personnages quant à eux ne perdent pas en développement. Il est tout à fait possible de travailler en profondeur la psyché d’un personnage dans un court-métrage en se concentrant sur un trait de caractère significatif de ce personnage (ce qui n’en fait pas pour autant un stéréotype).
La liberté d’expression d’un court-métrage provient de la plus grande latitude à employer des métaphores ou autres dispositifs littéraires, un luxe que le script d’un long-métrage se permet difficilement.
En fin de compte, l’élaboration d’un court-métrage consiste à raconter l’histoire de quelque chose qui arrive à quelqu’un. Rien de plus mais rien de moins.
Dans un script de long-métrage, le personnage est jeté dans un déséquilibre et il va passer le reste de l’histoire à tenter de retrouver cet équilibre. Avec un court, le retour à un état d’équilibre du personnage n’est plus nécessaire. Un choix s’impose de lui-même au personnage au début de l’histoire (peut-être un dilemme) puis la fin survient par l’acceptation ou le refus de ce choix.
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DILEMMES

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